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On appelle poèmes
orphiques toute une littérature poétique et philosophique
dont le point de départ, se perd dans la nuit des temps, se rattachant
à la personnalité fabuleuse d'Orphée ,
dont les oeuvres les plus récentes sont contemporaines des origines
du christianisme
et sorties des écoles néo-platoniciennes.
Platon,
Aristote,
Diodore,
Pline,
Plutarque,
plusieurs Pères de l'Église
font allusion à ces poèmes; trois fragments surtout, relatifs
à Zeus
considéré comme principe et maître universel, cités
l'un par Aristote, les deux autres par Justin le Martyr, ont un caractère
manifeste d'antiquité, alors que d'autres sont d'évidence
beaucoup plus récents.
On peut dès lors ranger en deux
catégories les textes de cette littérature. La première,
de beaucoup la moins étendue et la plus difficile à déterminer
avec certitude, comprend les poèmes
théogoniques greffés dès le VIIIe
siècle sur l'oeuvre d'Hésiode,
poèmes que la critique de Schoemaun, de Welcker, de Gerhard et de
Flach a isolés pour la plupart de la Théogonie
hésiodique, des Travaux et des Jours ,
etc., sans compter certains passages d'Homère
signalés par Wolff et ses disciples. Ils
ont pour auteurs ou des sectateurs inconnus de la religion des Mystères
ou les poètes attitrés de cette religion, Phérecyde
de Scyros, Cercops, Onomacrite surtout, qui dans ses fonctions de reviseur
de l'épopée
homérique ( L'Iliade ,
L'Odyssée )
et sans doute des oeuvres d'Hésiode, se substitua plus d'une fois
aux auteurs originaux. C'est ce que Lobeck a appelé les produits
de cette époque indécise où les philosophes poétisaient,
où les poètes eux-mêmes s'essayaient à la philosophie.
En dehors des interpolations qui se sont glissées dans les oeuvres
célèbres de la période épique, il y a encore
un certain nombre de vers, cités et commentés par les écrivains
du siècle de Périclès comme
remontant à une vénérable antiquité.
La deuxième catégorie des
poèmes orphiques se compose de vers absolument apocryphes, inconnus
aux temps de Platon et d'Aristote,
fabriqués les uns par les néoplatoniciens
qui, cherchant à raffermir le polythéisme ,
prétendaient consacrer par des textes anciens leurs spéculations
et leurs fantaisies; les autres par les Pères
de l'Église
grecque, en vue de leur polémique avec les défenseurs du
polythéisme, pour les besoins surtout de cette thèse, en
elle-même insoutenable, que la sagesse mosaïque ( Moïse ,
Ancien
Testament ),
a laissé son empreinte dans les idées
de l'hellénisme primitif sur la notion divine et les rapports de
Dieu
avec le monde ( Aristobule).
L'écho de cette littérature a pénétré
dans l'esprit latin par le canal des livres sibyllins ( Sibylle )
et c'est à elle qu'il faut faire hommage des idées messianiques
qui étonnent si fort dans l'Églogue à Pollion
de Virgile.
Les poèmes orphiques qui nous sont
parvenus sont : Argonautica ,
poème épique du IVe siècle
ap. J.-C. (éd. Schneider. Iéna, 1803); 88 hymnes chantés
dans les mystères (éd. Dietech, Erlangen, 1822); les Lithica,
chants sur la vertu magique des pierres ,
qui paraissent dater du IVe siècle
ap. J.-C. (éd. Abel, Berlin, 1880). La versification des ces poèmes
offre des analogies frappantes avec celle de
Nonnus
et de Quintus de Smyrne .
Une preuve plus certaine du peu d'antiquité de ces prétendues
poésies orphiques, c'est le ton déclamatoire qui y règne,
la profusion des ornements poétiques, un fréquent emploi
de l'archaïsme et du néologisme,
et même des hébraïsmes. (J.-A. H.).
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En
librairie - Francis Vian, Argonautiques
orphiques, Belles Lettres (série grecque), 1988. - Dino Campana,
Les
chants orphiques, Via Valeriano, 2001. |
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