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Dampier

William Dampier est un navigateur anglais, nĂ© Ă  East Coker (Somersetshire) en 1652, mort Ă  Londres en 1715.  Son père Ă©tait fermier, et le destinait au commerce; mais Dampier Ă©tant devenu orphelin de fort bonne heure, son tuteur lui fit interrompre son Ă©ducation , et peu après le jeune William faisait, en qualitĂ© de mousse, puis de matelot, divers voyages dans la marine royale, Ă  Terre-Neuve et aux Indes orientales. 

Quand la guerre Ă©clata entre l'Angleterre et la Hollande, Dampier sert Ă   bord d'un bâtiment de guerre. Une maladie l'ayant forcĂ© de quitter le service, Dampier occupa pendant six mois une place de contre-maĂ®tre sur les plantations du colonel Helyar, Ă  la JamaĂŻque. BientĂ´t las de cette existence tranquille, il s'embarqua sur un caboteur, Ă  bord duquel il fit divers voyages. A Kingston, en 1675, il s'associa Ă  une compagnie d'industriels, avec lesquels il fit une expĂ©dition Ă  la baie de Honduras, pour y chercher une cargaison d'acajou. Il revint en Angleterre en 1678, et y publia une excellente description de la baie de Honduras. Il se marie et rĂŞve de faire le commerce en grand avec les Antilles et l'AmĂ©rique centrale.

L'annĂ©e suivante, il part pour l'AmĂ©rique du Sud, dans le but d'y continuer le commerce des bois; mais, Ă  la JamaĂŻque, il se joignit, avec ses anciens associĂ©s, Ă  une bande de boucaniers qui prĂ©paraient une descente sur la cĂ´te espagnole. Ces boucaniers, au nombre de 331, Anglais pour la plupart, commencèrent leur expĂ©dition en traversant l'isthme de Darien. Parmi eux se trouvait Lionel Wafer, si connu par sa remarquable description de Darien. Les hardis aventuriers s'embarquèrent Ă  Santa-Maria, sur des canots et sur un petit navire qu'ils trouvèrent Ă  l'ancre près de la ville; puis ils commencèrent leurs courses dans la mer du Sud. BientĂ´t maĂ®tres de plusieurs vaisseaux richement chargĂ©s, ils abandonnèrent leurs canots pour s'embarquer sur leurs nouvelles prises. Après avoir Ă©cumĂ© la mer le long de la cĂ´te qui avoisine Panama, ils firent voile au sud vers le PĂ©rou. Ils touchèrent Ă  l'Ă®le de Gorgona (au large de la cĂ´te pacifique de la Colombie) puis Ă  celles de Juan Fernandez (Ă  l'Ouest du Chili). 

De là les boucaniers poursuivirent leur route au sud avec un médiocre succès. Ils prirent cependant un navire appelé le San-Rosario, arrivant de Callao avec un chargement de vin, d'eau-de-vie, d'huile, de fruits et d'une somme d'argent qui, répartie entre les boucaniers, donna 80 dollars à chacun. Sur la côte du Chili, ils retrouvèrent les îles de l'archipel qui avait déjà été découvert par Sarmianto, et leur donnèrent la nom du duc d'York (Duke of York's islands). Ils doublèrent le cap Horn à une assez grande distance de la terre, et tombèrent au milieu des glaces flottantes. lis arrivèrent peu après aux Antilles, où leur commandant Sharpe et quelques-uns de ses compagnons furent jugés comme pirates, sur la demande de l'ambassadeur espagnol, mais acquittés faute de preuves suffisantes.

Le 23 aoĂ»t 1683, William Dampier partit encore pour une expĂ©dition dans l'ocĂ©an Indien. Cette expĂ©dition comptait environ 70 aventuriers, au nombre desquels se trouvaient Edward Davis, Lionel Wafer et Ambroise Cowley. Elle Ă©tait commandĂ©e par John Cook. Elle partit du Chesapeake Ă  bord d'un vaisseau de 18 canons. Nos aventuriers se dirigèrent d'abord vers la cĂ´te de GuinĂ©e. Au Sierra-Leone, ils s'emparèrent d'un navire danois portant 36 canons, muni et approvisionnĂ© pour un long voyage. En 1695, Dampier, se sĂ©parant de l'expĂ©dition, partit sur le Cygnet, qui l'avait rejointe en route, et qui Ă©tait commandĂ© par le capitaine Sivan. Après de longues vicissitudes, Dampier quitta le Cygnet aux lles Nicobar, et regagna l'Angleterre en 1691, pendant que le capitaine et la plus grande partie de l'Ă©quipage continuaient Ă  pirater dans les mers indiennes. 

On dit que Dampier abandonna ses compagnons d'aventure parce qui il Ă©tait fatiguĂ© de leurs excès. Il s'Ă©tait cachĂ©, assure-t-on, dans une des Ă®les Nicobar, et avait laissĂ© appareiller sans lui le Cygnet, puis il avait gagnĂ© dans un canot le comptoir anglais d'Achem, dans l'Ă®le de Sumatra, s'Ă©tait engagĂ© sur un bâtiment marchand, et avait fait quelques voyages au Tonkin, Ă  Malacca, Ă  Madras (auj. Chennai) et Ă  Bencoolen (Bengkulu City, Ă  Sumatra). Il paraĂ®t mĂŞme qu'Ă  Bencoolen il remplit les fonctions de directeur de l'artillerie. Ce fut de lĂ  qu'il s'embarqua pour l'Angleterre, oĂą il arriva le 16 septembre 1691. Presque immĂ©diatement après, Dampier publia son Voyage autour du monde (New Voyage round the world, in-8) qu'il dĂ©dia au prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© royale, Charles Montague, plus tard comte de Halifax, un des mĂ©cènes de ce temps-lĂ . Un second volume suivit bientĂ´t (1699), ainsi qu'un Discourse of Winds, ouvrage très remarquable pour une Ă©poque oĂą la science mĂ©tĂ©orologique n'Ă©tait pas nĂ©e. 

Lorsque Guillaume III ordonna qu'une expĂ©dition fĂ»t envoyĂ©e pour rechercher de nouveaux pays, et pour examiner quelques contrĂ©es dĂ©jĂ  dĂ©couvertes en particulier la Nouvelle-Hollande (Australie) et la Nouvelle-GuinĂ©e (1699), William Dampier, chaudement recomman dĂ© Ă  amirautĂ© par lord Montague, fut choisi par le comte de Pembroke pour diriger l'expĂ©dition. Le Roebuck, vaisseau de la marine royale, armĂ© de 12 canons, fut Ă©quipĂ© tout exprès et fourni de provisions pour un long voyage. 

William Dampier appareilla le 26 janvier 1699, et, après avoir fait escale au BrĂ©sil, il se dirigea vers l'Australie. Il y aborda après un voyage de six mois, par 26° de latitude sud, et jeta l'ancre, peu de jours après, dans la baie mĂŞme Ă  laquelle Dick Hertoge, qui avait dĂ©couvert ce pays, avait lĂ©guĂ© son nom. Reprenant ensuite sa route vers le nord, il trouva un archipel s'Ă©tendant sur une longueur de plus de 20 lieues et qui a Ă©tĂ© explorĂ© plus tard par le capitaine King. 

Dampier, qui espérait se frayer un passage jusqu'au continent, fit quelque chemin à travers les chenaux compliqués qui séparaient ces îles. A l'une d'elles, sur laquelle il aborda pour chercher de l'eau, il donna le nom d'île du Romarin (Rosemary island). Il rebroussa ensuite chemin et continua sa route dans la direction du nord. Quittant les côtes de l'Australie, il cingla vers la Nouvelle-Guinée, qu'il reconnut le 1er janvier 1700; puis, poursuivant sa route à l'est, et se tenant éloigné du continent, il revit, le 27, une terre qu'il supposa être la partie orientale de la Nouvelle-Guinée. De là il suivit la côte dans les directions du sud-sud-ouest et de l'ouest, donnant des noms aux principaux havres et promontoires, jusqu'à ce que, ayant quitté le fort Montague, il découvrait au nord une mer ouverte, tandis qu'en même temps une espèce de terre lui apparaissait au sud-ouest. Il s'aperçut ainsi qu'il avait entièrement fait le tour de la terre qu'il avait d'abord supposée être la Nouvelle-Guinée, et que maintenant il naviguait dans le détroit, par lequel les deux pays étaient séparés. Dampier donna le nom de Nouvelle-Bretagne à cette terre qu'il avait distinguée de la Nouvelle-Guinée, et celui de Dampier au détroit qui sépare les deux îles.

L'expédition gagna ensuite, par une toute nouvelle, Céram, dans l'archipel des Moluques, d'où il fit voile directement pour l'Angleterre. La traversée fut d'abord assez heureuse; mais, en arrivant à l'île de l'Ascension, le Roebuck, vieux navire, fit une voie d'eau et coula bas, sans que Dampier et son équipage eussent le temps de sauver autre chose qu'une partie des purovisions et des voiles, qui leur servirent à se dresser des tentes sur le rivage. Deux mois après cet accident, trois navires de guerre anglais étant venus jeter l'ancre auprès de l'Ascension, recueillirent Dampier et ses compagnons, et les ramenèrent en Angleterre. Peu après Dampier publia la relation de son voyage.

CondamnĂ© Ă  une grosse amende (1702) par une cour martiale pour avoir maltraitĂ© et fait emprisonner son lieutenant, Dampier n'en fut pas moins choisi l'annĂ©e suivante pour commander une expĂ©dition dans les mers du Sud par des armateurs anglais qui avait  Ă©quipĂ© deux vaisseaux le Saint-George de 26 canons, et le Cinq-Ports de 16. Dampier mit son pavillon sur le Saint-George. Le capitaine Thomas Stradling commanda le Cinq-Ports.

Navigateur fort habile, Dampier paraĂ®t avoir Ă©tĂ© un assez mauvais commandant. Il avait vĂ©cu trop longtemps avec les boucaniers pour savoir conserver une dignitĂ© de conduite propre Ă  lui concilier la respect de ses infĂ©rieurs, et son excessive familiaritĂ© laissait s'Ă©tablir entre son Ă©quipage et lui une Ă©galitĂ© de rapports nuisible au service, et le rĂ©duisait ensuite, pour maintenir la discipline, Ă  user d'une extrĂŞme sĂ©vĂ©ritĂ©. Il faut joindre Ă  cela que les vaisseaux lacĂ©s sous ses ordres convenaient mal Ă  expĂ©dition projetĂ©e; les Ă©quipages Ă©taient dĂ©sordonnĂ©s et mutins; nulle harmonie n'existait dans le corps des officiers. Une prise faite sur la cĂ´te du PĂ©rou amena entre Dampier et Stradling une altercation, Ă  la suite de laquelle chacun des deux fit voile de son cĂ´tĂ©. 

Le Cinq-Ports retourna aux îles Juan-Fernandez, et c'est ici que se place l'histoire du marin Alexander Selkirk, abandonné sur l'île Mas a Tierra et qui passe pour être le prototype de Robinson Crusoé. Le Saint-George continua sa route. Mais bientôt Dampier s'étant pris de querelle avec son premier lieutenant, nommé Clipperton, celui-ci, après avoir embauché 21 hommes de l'équipage, s'enfuit sur une petite barque récemment capturée, et dans laquelle était la plus grande partie des provisions et des munitions. Après la désertion du lieutenant Clipperton, Dampier attaqua le galion de Manille, mais sans réussir à s'en emparer, et sa défaite ajouta au mécontentement de ses équipages.

Dampier voulait néanmoins continuer croiser dans les mers du Sud; mais la majorité de ses hommes refusa de le suivre. Une prise d'environ 70 tonneaux fut équipée par ceux qui voulaient aller aux Indes; 37 matelots s'embarquèrent sur ce petit bâtiment, et le Saint-George se trouva réduit à 29 hommes d'équipage. Sans se décourager, le capitaine alla piller la ville de Puna, et croisa le long de la côte du Pérou, jusqu'à ce que son navire ne fût plus capable de tenir la mer. Il s'embarqua alors sur un brigantin qu'il avait pris aux Espagnols, et, après avoir dépouillé le Saint-George, il le laissa coulant sur ses ancres auprès dune petite île voisine de la côte.

Lorsque Dampier arriva aux Indes orientales, il ne put exhiber sa commission, probablement dérobée par les mécontents qui l'avaient quitté; son navire et sa cargaison furent en conséquence saisis par les Hollandais, et lui-même passa quelques mois en prison.

A son retour en Angleterre, Dampier se trouva passionnĂ©ment attaquĂ© dans une relation que venait de publier Funnell, un de ses compagnons, revenu avant lui. Sa rĂ©ponse, qu'il intitula Vindication (1707) oĂą  il cherche Ă  se justifier d'avoir pris part Ă  l'expĂ©dition des boucaniers contre les possessions hispano-amĂ©ricaines, ne consiste qu'en assertions contraires, aussi peu appuyĂ©es de preuves que celles de l'accusation.

En 1711, des armateurs de Bristol, ayant équipé deux forts navires, armés l'un de 30, l'autre de 26 canons, avec 321 matelots d'équipage, pour aller piller les établissements espagnols dans la mer du Sud, donnèrent le commandement de cette nouvelle expédition au capitaine Woodes Rogers, et Dampier, rendu humble par ses revers, accepta les fonctions de pilote. Le voyage jusqu'à l'océan Pacifique s'accomplit sans difficulté, et l'expédition eut un succès complet. Elle fut même l'occasion de récupérer Alexander Selkirk, abandonné sur son île plus de quatre ans plus tôt. On captura le galion d'Acapulco, et l'on revint en Angleterre par les Indes orientales, après avoir fait le tour du globe en trois ans et trois mois.

Depuis ce moment, le reste de la vie de William Dampier est à peu près complètement inconnu. Il est à présumer que notre aventurier ne reprit plus la mer, puisqu'il n'est plus fait mention de lui dans les relations des voyages entrepris à la suite de celui du capitaine Woodes Rogers. Il s'éteignit à Londres au printemps 1715.

La meilleure édition de ses voyages autour du monde est celle de 1799 (4 vol. in-8). Ils ont été partiellement traduits en français (Amsterdam, 1711-1712, 5 vol. in-12). Ses écrits, outre l'intérêt dramatique dont ils sont pleins, méritent l'attention par les renseignements hydrographiques qu'on y rencontre. Les relations de Dampier sont intéressantes, ses descriptions sont vives et animées, et les faits qu'il avance sont généralement d'une grande exactitude. Son style clair, franc et net, ses plans et ses cartes, d'une précision extraordinaire pour le temps, lui assurent une place parmi les grands écrivains de voyage et les grands géographes. (PL / B.-H. Gausseron).

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