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| La découverte du monde > Le ciel | 
| Les étoiles variables |  | 
|  | Les
premières observations d'étoiles changeant de luminosité
remontent à l'Antiquité, mais elles étaient habituellement interprétées
comme des phénomènes atmosphériques ou des "étoiles nouvelles" (novae).
La véritable histoire des étoiles variables commence en 1596 lorsque
David
Fabricius observe une étoile dans la constellation de la Baleine
qui disparaît puis réapparaît. Il la nomme Mira Ceti ("la Merveilleuse
de la Baleine"). Son cycle de variation de luminosité, d'environ 332 jours,
sera plus tard établi par Johannes Holwarda. C'est la première étoile
variable périodique reconnue, bien que sa nature physique reste alors
un mystère complet. Un autre jalon important est posé en 1669 par Geminiano Montanari, qui note que l'étoile Algol (la "Tête du Démon" dans la constellation de Persée) varie en éclat. Son caractère périodique est confirmé en 1782 par John Goodricke. Celui-ci observe méticuleusement Algol et détermine sa période de variation à un peu moins de trois jours. Il émet alors une hypothèse révolutionnaire pour l'époque : l'étoile est éclipsée à intervalles réguliers par un compagnon sombre qui orbite autour d'elle. Cette explication, correcte, fait d'Algol le premier système binaire à éclipses connu et marque une avancée conceptuelle majeure en montrant que la variabilité peut être due à une cause extrinsèque. Pour ce travail, la Royal Society lui décerne la médaille Copley. Goodricke découvre également la variabilité de Delta Cephei et de Beta Lyrae avant sa mort prématurée à 21 ans. Le XVIIIe et le XIXe siècles voient le nombre d'étoiles variables connues augmenter lentement, grâce au travail patient d'observateurs amateurs et professionnels. Friedrich Wilhelm Argelander, puis son successeur Eduard Schönfeld, systématisent leur étude, introduisant des méthodes de comparaison visuelle avec des étoiles de magnitude connue pour estimer la luminosité des variables. Ces catalogues jettent les bases de la collaboration internationale, qui deviendra essentielle dans ce domaine. L'introduction de la photographie dans l'astronomie à la fin du XIXe siècle révolutionne la recherche d'étoiles variables. Des plaques photographiques du ciel, prises à différents moments, peuvent être comparées pour révéler des changements de luminosité. Cette technique permet une augmentation spectaculaire du nombre de découvertes. À l'Observatoire de Harvard, sous la direction d'Edward Charles Pickering, une équipe d'astronomes femmes, connues sous le nom de "Calculatrices de Harvard" ("Harvard Computers"), analyse des centaines de milliers de plaques photographiques. Parmi elles, Williamina Fleming découvre des dizaines de novae et d'étoiles variables. C'est au sein de cette même équipe qu'Henrietta Swan Leavitt fait, au début du XXe siècle, une découverte qui va changer la face de l'astronomie. En étudiant des milliers d'étoiles variables dans les Nuages de Magellan, de petites galaxies satellites de la nôtre, elle se concentre sur une classe particulière d'étoiles pulsantes découvertes par Goodricke : les Céphéides. En 1908, puis de manière plus détaillée en 1912, Leavitt publie un résultat fondamental : il existe une relation directe entre la période de pulsation d'une Céphéide et sa luminosité intrinsèque. Plus une Céphéide est lumineuse, plus sa période de variation est longue. Cette relation période-luminosité est une véritable pierre de Rosette pour les astronomes. Comme toutes les Céphéides d'un Nuage de Magellan sont à peu près à la même distance de la Terre, leur magnitude apparente est directement liée à leur magnitude absolue. La relation de Leavitt permet donc de déterminer la luminosité absolue d'une Céphéide simplement en mesurant sa période. En comparant cette luminosité absolue à sa luminosité apparente vue depuis la Terre, on peut en déduire sa distance. Les Céphéides deviennent ainsi des "chandelles standard" pour mesurer les distances cosmiques. Dans les années qui suivent, des astronomes comme Harlow Shapley utilisent la relation de Leavitt pour mesurer la taille de notre propre galaxie, la Voie Lactée, et la position de notre Système solaire en son sein. Il montre que nous ne sommes pas au centre, mais dans une zone périphérique. Le débat culmine dans les années 1920 avec la question de la nature des "nébuleuses spirales". Sont-elles de petits objets à l'intérieur de notre Galaxie ou d'immenses "univers-îles" situés bien au-delà ? C'est Edwin Hubble, utilisant le puissant télescope Hooker de 100 pouces de l'Observatoire du Mont Wilson, qui tranche définitivement la question. En 1923-1924, il réussit à identifier des étoiles Céphéides dans la nébuleuse d'Andromède (M31). En appliquant la loi de Leavitt, il calcule une distance d'environ 900 000 années-lumière (une valeur révisée plus tard, mais l'ordre de grandeur était correct). Cette distance prouvait sans équivoque qu'Andromède était une galaxie à part entière, bien à l'extérieur de la Voie Lactée. L'univers venait de s'agrandir de façon spectaculaire. Parallèlement, la compréhension physique des étoiles variables progresse. Arthur Eddington développe dans les années 1910 et 1920 la théorie de la structure interne des étoiles. Il propose que la variabilité des Céphéides n'est pas due à une cause extérieure, mais à des pulsations radiales de l'étoile elle-même, un cycle d'expansion et de contraction gouverné par un déséquilibre entre la force de gravitation et la pression de radiation interne. Sa théorie de la valve explique comment l'opacité de l'hélium ionisé dans les couches stellaires peut piéger puis libérer de l'énergie, entretenant ainsi les pulsations. Dans les années qui ont suivi, le fondement posé par la relation période-luminosité des Céphéides a été à la fois consolidé et complexifié. Dans les années 1940, pendant les black-out de la Seconde Guerre mondiale à Los Angeles, Walter Baade, utilisant le télescope Hooker du Mont Wilson, a pu observer le centre de la galaxie d'Andromède avec une clarté sans précédent. Ses observations, publiées en 1944, ont révélé une distinction fondamentale : il existe deux populations d'étoiles. La Population I, jeune, riche en métaux et située dans les bras spiraux des galaxies, et la Population II, plus vieille, pauvre en métaux et présente dans les amas globulaires et les bulbes galactiques. Il a surtout démontré qu'il existait deux types de Céphéides, chacune associée à une population et possédant sa propre relation période-luminosité. Les Céphéides classiques (de Population I) sont intrinsèquement plus lumineuses que les Céphéides de type II. Cette découverte a eu un impact considérable : elle a permis de résoudre des incohérences et a doublé l'échelle de distance de l'univers précédemment calculée par Hubble. Toutes les distances extragalactiques devaient être multipliées par deux. Parallèlement, l'attention s'est portée sur d'autres types d'étoiles pulsantes. Les étoiles de type RR Lyrae, moins lumineuses que les Céphéides mais plus nombreuses, ont été reconnues comme d'excellents indicateurs de distance pour les objets de Population II, comme les amas globulaires au sein de notre propre Galaxie. Leur étude a permis d'affiner notre connaissance de la structure et de l'âge de la Voie Lactée. Le développement de la photométrie photoélectrique dans les années 1950 a constitué une révolution technique. En remplaçant la plaque photographique subjective par des photomultiplicateurs électroniques, les astronomes pouvaient désormais mesurer les variations de luminosité avec une précision et une rapidité inégalées. Cela a ouvert la voie à la découverte de variations très subtiles et rapides, impossibles à détecter auparavant. C'est ainsi qu'on a pu étudier en détail les pulsations de courte période des étoiles de type Delta Scuti ou les micro-variations de naines blanches pulsantes. La théorie a également progressé de manière significative. Les modèles informatiques, de plus en plus sophistiqués, ont permis de confirmer et d'affiner la "théorie de la valve" d'Eddington. Les physiciens stellaires ont compris que la zone d'ionisation de l'hélium était bien le moteur des pulsations des Céphéides et des RR Lyrae. Ces modèles ont également prédit l'existence d'une bande d'instabilité dans le diagramme de Hertzsprung-Russell, une région spécifique de température et de luminosité où les étoiles sont enclines à pulser, ce qui fut confirmé par les observations. L'exploration de l'univers à différentes longueurs d'onde, au-delà du spectre visible, a révélé des formes de variabilité entièrement nouvelles. L'avènement de la radioastronomie et de l'astronomie en rayons X et gamma a mis en lumière les phénomènes les plus violents et énergétiques. On a découvert les pulsars, des étoiles à neutrons en rotation rapide, dont les faisceaux de rayonnement balayant l'espace sont perçus comme des pulsations extraordinairement régulières. On a identifié des variables cataclysmiques, des systèmes binaires serrés où une naine blanche accrète de la matière d'un compagnon, conduisant à des explosions thermonucléaires récurrentes à sa surface (novae). Les binaires X ont montré une variabilité intense lorsque la matière tombant sur une étoile à neutrons ou un trou noir est chauffée à des millions de degrés. Le domaine des étoiles jeunes a également apporté son lot de découvertes. Les étoiles de type T Tauri, des étoiles pré-séquence principale, ont montré des variations irrégulières liées à leur formation, à l'instabilité de leurs disques d'accrétion et à une activité magnétique intense. Les étoiles éruptives (flare stars), des naines rouges, présentent des sursauts de luminosité soudains et spectaculaires, bien plus puissants que les éruptions solaires. L'ère spatiale a transformé radicalement l'étude des étoiles variables. Libérés des distorsions et de l'opacité de l'atmosphère terrestre, les télescopes spatiaux comme Hubble ont permis d'observer des Céphéides dans des galaxies encore plus lointaines, affinant la mesure de la constante de Hubble qui est un paramètre central des modèles de l'expansion de l'univers. Des missions dédiées comme Hipparcos, puis plus récemment Gaia, ont mesuré les positions et les distances de milliards d'étoiles avec une précision astrométrique inégalée, calibrant de manière absolue les relations période-luminosité et découvrant des millions de nouvelles variables. Enfin, depuis la fin du XXe siècle, les grands relevés automatisés au sol (comme OGLE, ASAS-SN ou ZTF) scrutent le ciel nuit après nuit. En comparant des millions d'images, leurs algorithmes identifient en temps réel des milliers d'événements variables, des supernovae lointaines aux microlentilles gravitationnelles, un phénomène prédit par Einstein où le passage d'un objet massif devant une étoile d'arrière-plan amplifie temporairement sa lumière. Aujourd'hui, l'étude des étoiles variables, avec son sous-domaine l'astérosismologie pour celles qui pulsent, est une discipline mature. Elle ne sert plus seulement à mesurer les distances, mais à sonder l'intérieur même des étoiles. Tout comme les sismologues étudient les tremblements de Terre pour comprendre l'intérieur de notre planète, les astronomes analysent les "tremblements d'étoiles" pour déterminer leur masse, leur âge, leur composition chimique et leur structure interne. | 
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