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Au sens le plus
général, l'état d'un corps est
la situation dans laquelle il se trouve. Le terme peut prendre des acceptions
plus particulières, par exemple lorsqu'on parle des états de la matière,
ou encore, en mécanique, quand on veut qualifier l'ensemble des
valeurs prises à un instant donné par tous les paramètres (grandeurs
physiques) utilisés pour décrire un système. Dans ce contexte, on décrit
un état physique par son vecteur d'état (ou fonction d'onde). L'évolution
des états d'un système est gouvernée par son équation d'état.
Pour s'en tenir ici seulement à quelques
remarques sur les états de la matière, on notera que classiquement
les physiciens ont reconnu seulement trois états des corps, ou trois façons
d'être de la nature, bien distinctes d'aspect et de propriétés quand
on envisage certains corps; ce sont l'état solide,
l'état liquide, et l'état gazeux.
Il s'agit d'une simplification. On sait aujourd'hui que d'autres états
peuvent être définis, correspondant à des propriétés de la matière
bien distincte, à commencer par l'état des plasma,
qui est celui d'un gaz entièrement ionisé, ou encore les états que peuvent
présenter la matière molle (verres, pâtes).
L'état solide est caractérisé par ce
fait que le volume d'un poids donné d'un corps est bien déterminé et
que sa forme est indépendante du vase où il se trouve, dans l'état liquide,
le volume d'un poids donné d'un corps est bien déterminé, mais sa forme
dépend de celle du vase où on le met. Dans ces deux états, les corps
sont à peu près incompressibles, de fortes variations de pression ne
produisant que des faibles variations de volume; c'est pour cela que, lorsque
le poids est donné, on connaît le volume d'une façon très approchée,
à l'aide d'une constante particulière à chaque corps et qui se nomme
poids spécifique. Dans l'état gazeux, le volume d'an corps n'est pas
connu quand on tonnait son poids; sa forme n'est pas déterminée davantage,
car il occupe entièrement le volume du vase qui le contient. Il faut donc
pour définir une masse de gaz donner autre chose que son volume; il faut
donner la pression à laquelle ce volume a été mesuré. L'acier, l'eau,
l'air représentent trois types de corps solide, liquide, gazeux.
Tous les corps, on l'a déjà noté, ne
présentent pas de phénomènes aussi tranchés. La glue marine, par exemple,
est un corps d'apparence solide, mais placée dans une assiette elle s'étend
peu à peu. La cire à cacheter a l'aspect d'un solide, mais un bâton
de cette substance supporté seulement par ses extrémités se courbe lentement.
Ce sont des corps intermédiaires entre les corps vraiment solides et les
corps vraiment liquides; le plomb fortement comprimé peut s'écouler Ã
travers des orifices; les corps pâteux sont d'autres exemples de corps
jouissant de propriétés intermédiaires. Les gelées sont des corps solides
qui, en général, ne s'écoulent pas comme la glace, mais on peut les
déformer d'une façon beaucoup plus considérable que les solides véritables.
Il existe de même des états intermédiaires
entre l'état gazeux et l'état liquide : quand on chauffe à la main un
tube de verre contenant de l'acide carbonique liquide, on constate qu'Ã
mesure que la température s'élève, le ménisque qui sépare le liquide
du gaz qui le surmonte prend des contours de plus en plus vagues pour disparaître
ensuite complètement; un peu avant ce moment, le ménisque fait place
à des stries que l'on voit osciller dans le tube quand on l'agite; il
y a alors bien peu de différence entre le liquide qui remplit le bas du
tube et le gaz qui en occupe le sommet.
En prenant des corps qui ne présentent
pas ces phénomènes transitoires, on peut avoir des types bien distincts
de les trois états classiques : l'état solide est caractérisé par une
cohésion qui nécessite l'emploi de forces considérables si l'on veut
modifier la situation relative des molécules et les atomes des corps.
Dans l'état liquide, cette cohésion empêche les molécules de se disperser,
mais les forces les plus légères les font rouler en quelque sorte les
unes sur les autres. Dans l'état gazeux, la force de cohésion est ou
nulle ou très faible.
Un des caractères les plus importants
qui distinguent les trois états classiques est la quantité de chaleur
considérable qui préside aux changements d'états. Pour amener un corps
solide à l'état liquide sans changer sa température, il faut lui fournir
une quantité de chaleur considérable capable, quand il s'agit de l'eau,
d'élever sa température de 80°; cette quantité de chaleur mesure le
travail des forces moléculaires dans
le phénomène de la fusion. Pour transformer un liquide en gaz, il faut
fournir une quantité de chaleur encore plus considérable. Ces quantités
de chaleur, nommées chaleurs latentes parce qu'elles n'élèvent pas la
température du corps, sont beaucoup plus considérables que celles qui
sont nécessaires pour faire varier d'un degré la température des corps.
Pour les corps pâteux, on observe que ce que l'on peut appeler la chaleur
de fusion, au lieu d'être absorbée à une température bien déterminée
comme dans les corps solides, point de fusion, se répartit le long d'un
certain intervalle de température qui correspond au phénomène de ramollissement
qui amène progressivement le corps de l'état solide parfait à l'état
liquide parfait.
L'état gazeux tel qu'on l'observe dans
la plupart des cas correspond à un certain nombre de propriétés que
la théorie des gaz explique par l'hypothèse de molécules animées de
mouvements rapides de translation et se choquant un grand nombre de fois
par seconde, de sorte que la trajectoire
d'une molécule pendant un temps donné se compose d'un nombre immense
de portions de trajectoires de très courtes longueurs constamment interrompues
par des chocs. Le chemin de libre parcours d'une molécule dépend évidemment
du nombre de molécules qui se trouvent dans un espace d'un volume déterminé.
Quand ce nombre diminue d'une façon considérable, on obtient un système
dans lequel le libre parcours d'une molécule devient une longueur de plusieurs
millimètres que Crookes a pu mettre en évidence.
Un gaz raréfié à ce point peut évidemment présenter des propriétés
très différentes de celles de l'état gazeux ordinaire. Aussi Crookes
considérait-il la matière à cet état comme distincte des gaz et il
l'appelait matière radiante. Ce qui, selon lui pouvait empêcher de considérer
cet état comme un état gazeux proprement dit, c'est l'absence d'une chaleur
latente véritable correspondant à ce changement de propriétés. (A.
Joannis). |
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