| Samuel Parker est un évêque d'Oxford, quelquefois confondu avec Matthew Parker, archevêque de Canterbury, et éditeur de la Bible des évêques, naquit en 1600, et mourut en 1688. Mêlé à tous les débats politiques et religieux, non seulement d'Angleterre, mais du XVIIe siècle, il paraît dans l'histoire de la philosophie comme adversaire de Descartes et de Spinoza, comme panégyriste de Platon, comme partisan d'un mysticisme orthodoxe. Parker était en possession d'une science très variée, mais moins solide et moins précise que variée. Membre de la Royal Society de Londres, il se distinguait de ses confrères par la verve d'un esprit parfois railleur et par une singulière facilité de travail. Sa véritable aptitude était cependant pour la dialectique et pour la polémique. Les ouvrages où il discute principalement les doctrines du cartésianisme sont intitulés, le premier, Tentamina physico-theologica de Deo (1669, et 1673, in-8) ; le second, Disputationes de Deo et providentia divina. Le point de vue commun à ces deux livres est celui d'un spiritualisme mystique et essentiellement religieux. L'auteur y reproche à Descartes de laisser l'existence de Dieu sans armes suffisantes contre l'athéisme. La preuve ontologique, celle qui est tirée de l'idée même de Dieu et de celle d'une perfection suprême, ne le satisfait pas : il l'appelle même un sophisme (Disputat., p. 24). Il y substitue des arguments téléologiques et physiques, c'est-à-dire pris dans l'ordre et l'harmonie du monde, dans ses rapports admirables de convenance qui éclatent à travers toute la création, dans les parties comme dans l'ensemble (Tentamina, p. 157 sqq.). Parker loue cependant le philosophe français de n'avoir pas cherché à réfuter l'athéisme par l'impossibilité de démontrer un enchaînement perpétuel de causes et d'effets dans l'univers (Tentamina, v. fin.). Un autre reproche adressé à Descartes, c'est d'avoir proscrit, à l'exemple de Bacon et de Gassendi, les causes finales, la téléologie du monde physique. Descartes, à entendre Samuel Parker, aurait eu le tort de prétendre raisonner sur l'infini, «-prétention que ne doit avoir nul homme, si profond qu'il soit, parce que l'esprit humain n'a aucune certitude, pas même en géométrie, dès qu'il veut toucher à l'infini. » C'est sur ce point, ajoute l'évêque d'Oxford, que devait porter le doute de Descartes (Disputat., p. 538 sqq.). Parker n'est pas juste lorsqu'il assimile le doute cartésien au pyrrhonisme même (ubi supra, p. 553 sq.) et qu'il l'accuse de réduire la science au désespoir (p. 538). Il n'est pas seulement partial, il est dans l'erreur, quand il soutient que déduire l'existence de Dieu de l'idée de perfection, c'est insinuer, par un sophisme subtil, qu'il y a plusieurs divinités (Disputat., p. 21). Il excède de même les limites du vrai en qualifiant Descartes d'esprit inconséquent, inconstans. Ajoutons toutefois que Parker est beaucoup plus équitable et moins intolérant envers ce glorieux adversaire, que ne le sont tant de ses compatriotes, tels que Pitcairn et Hobbes. Ce dernier, du reste, est également combattu avec vigueur et succès, entre Vanini et Gassendi, dans les Disputationes de Deo. A tous ces philosophes modernes, matérialistes ou spiritualistes, Parker préfère Platon. L'écrit destiné à recommander les doctrines de l'Académie mérite encore d'être consulté. Dans cet exposé prétendument libre et impartial de la philosophie platonicienne, Free and impartial account of the platonic philosophy, in-4, 1666 l'auteur n'est pourtant pas tout à fait indépendant. Il s'égare à chercher des analogies entre les Dialogues et l'Évangile, il ne sait pas assez apercevoir les différences qui séparent le platonisme du christianisme. Il faut néanmoins lui savoir gré d'avoir rappelé à ses contemporains le goût des Pères pour cette philosophie, d'avoir ramené les théologiens de son pays à l'étude de cette philosophie, de l'avoir défendue contre les censures des inquisiteurs, qui n'y voyaient qu'une source impure d'abominables hérésies; enfin, de l'avoir vantée, sans décrier Aristote et d'autres antagonistes de Platon. Son tort capital consiste à n'avoir pas voulu reconnaître les nombreuses et profondes affinités du platonisme avec le cartésianisme. Ce qui domine dans ses divers ouvrages, c'est un certain manque de méthode, et un penchant décidé pour le mysticisme. (C. Bs.). | |