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Histoire de l'Europe > La France  > Le XIXe siècle > [la Seconde RĂ©publique / Le Second Empire]

 
Le coup d'Etat du 2 décembre 1851
Le Deux-DĂ©cembre Ă  Paris
Aperçu Les prémices Le coup d'Etat à Paris La résistance en province
Tout se trouva prêt à la date choisie par le président et ses complices. Les mesures essentielles furent prises dans la nuit du 1er au 2 décembre 1851. C'étaient l'impression et l'affichage des décrets et des proclamations du président de la République notifiant officiellement le coup d'État; l'occupation nocturne du palais de l'Assemblée nationale pour empêcher toute réunion des représentants; l'occupation par les troupes des principaux points stratégiques de Paris pour prévenir ou réprimer toute résistance; l'arrestation nocturne des chefs éventuels de cette résistance, c.-à-d. les généraux et militaires influents, les représentants les plus énergiques, les chefs socialistes; la saisie de tous les journaux républicains ou parlementaires qui auraient pu donner le signal de la résistance ou servir de centre de ralliement. Ces actes furent préparés et exécutés par le duc de Morny, ministre de l'Intérieur; Maupas, préfet de police; le général Leroy de Saint-Arnaud, ministre de la Guerre, et le général Magnan, commandant en chef de l'armée de Paris. Nous avons vu déjà quel fut le rôle de ces hommes dans la préparation du coup d'État. Outre eux et les autres confidents de la première heure, on jugea prudent de s'en assurer deux autres : M. de Saint-Georges, directeur de l'Imprimerie nationale, et M. Vieyra, le nouveau chef d'état major de la garde nationale.

Le soir du 1er dĂ©cembre Ă©tait un lundi; le prĂ©sident tenait sa rĂ©ception ordinaire; en mĂŞme temps avait lieu Ă  l'OpĂ©ra-Comique la première, reprĂ©sentation d'une pièce de M. de Saint-Georges, frère du directeur de l'Imprimerie nationale; ce dernier y assistait ainsi que M. de Morny, qui, après dix heures, se rendit Ă  l'ElysĂ©e. A onze heures du soir, les invitĂ©s Ă©taient partis; Vieyra s'Ă©tait engagĂ© Ă  empĂŞcher de battre le rappel de la garde nationale, ce qu'il effectua en faisant crever les caisses des tambours. Morny, Saint-Arnaud, Maupas et Mocquart, chef de cabinet du prĂ©sident, restaient seuls avec lui. Vers minuit, un aide de camp, M. de BĂ©ville, vint prendre les manuscrits des dĂ©crets et proclamations pour les porter Ă  l'Imprimerie nationale. Le commandant Fleury la fit occuper par la gendarmerie; les compositeurs, consignĂ©s depuis la veille, travaillèrent surveillĂ©s chacun par deux agents de police; le sens des manuscrits, habilement dĂ©coupĂ©s, leur Ă©chappait. Quand les affiches eurent Ă©tĂ© imprimĂ©es et tirĂ©es Ă  un grand nombre d'exemplaires, elles furent portĂ©es Ă  la prĂ©fecture de police. A l'ElysĂ©e, Louis-NapolĂ©on avait Ă©crit aux ministres qui n'Ă©taient pas confidents pour les congĂ©dier; au ministère de l'intĂ©rieur, Morny remplaçait M. de Thorigny. Vers trois heures du matin, la gĂ©nĂ©ral Magnan reçut l'ordre de marcher. A partir de cinq heures et demie du matin, l'armĂ©e et la police agirent parallèlement, exĂ©cutant les diverses parties du plan avec une prĂ©cision mĂ©thodique et sans que rien mit obstacle Ă  la consommation. A huit heures du matin, tout Ă©tait fait. 

La police fit poser les affiches et arrĂŞta les adversaires du prĂ©sident, dĂ©fenseurs les plus redoutĂ©s de la constitution. Les affiches furent apposĂ©es par les afficheurs ordinaires de la prĂ©fecture escortĂ©s de sergents de ville. Les arrestations furent opĂ©rĂ©es par les commissaires de police. Il est Ă  remarquer que, sur les quarante-huit commissaires, aucun ne refusa de s'associer au crime; il s'agissait de se rendre complice du crime de haute trahison et d'arrĂŞter Ă  domicile seize reprĂ©sentants du peuple, inviolables d'après la constitution et, de plus, environ soixante dĂ©mocrates influents, chefs possibles des barricades. Les principales arrestations Ă©taient celles du gĂ©nĂ©ral Changarnier, du gĂ©nĂ©ral Bedeau, du gĂ©nĂ©ral de Lamoricière, du gĂ©nĂ©ral Cavaignac et du colonel Charras, qui auraient pu retenir ou ramener les soldats dans le devoir; tous furent surpris au lit et conduits Ă  Mazas, oĂą vinrent les rejoindre les reprĂ©sentants Thiers, Greppo, lieutenant Valentin, Martin Nadaud, Baune, capitaine Cholat, Lagrange, Miot, Roger (du Nord) et les questeurs de l'AssemblĂ©e, Baze et le gĂ©nĂ©ral LeflĂ´ (Le FlĂ´). La plupart des chefs dĂ©mocrates dĂ©signĂ©s par la police furent Ă©galement arrĂŞtĂ©s sans pouvoir rĂ©sister. 

A sept heures du matin, les affiches étaient posées et les arrestations accomplies. Voyons ce qu'avait fait l'armée. La première mesure et la plus grave était l'occupation du palais de l'Assemblée nationale. Celle-ci était gardée par un bataillon d'infanterie de ligne qu'on changeait tous les jours et par une batterie d'artillerie; la garnison, casernée dans les dépendances, obéissait au lieutenant-colonel Niox, commandant militaire de l'Assemblée, dont l'énergie était bien connue et la loyauté à l'abri de toute séduction. La lâcheté du président Dupin était notoire et il était certain qu'il n'essayerait rien; en revanche, les deux questeurs Baze et le général Leflô étaient très résolus. Le palais fut surpris àa six heures du matin par le colonel Espinasse du 42e de ligne qui avait fourni le bataillon de garde; il l'occupa sans résistance; le lieutenant-colonel Niox et les questeurs furent arrêtés. Au même moment, l'armée de Paris se mettait en mouvement, la brigade Ripert occupait le Palais-Bourbon, la brigade Forey le quai d'Orsay, la brigade Dulac le jardin des Tuileries, la brigade de Cotte la place de la Concorde, la brigade Canrobert enveloppait l'Elysée; les lanciers du général Reybell et la division de grosse cavalerie du général Korte se massaient dans les Champs-Elysées

A huit heures du matin, les imprimeries de tous les journaux rĂ©publicains, le National, le Siècle, la RĂ©publique, la RĂ©volution, l'Avènement du peuple, etc., et de la plupart des journaux conservateurs Ă©taient occupĂ©es par des soldats; seuls la Patrie et le Constitutionnel, feuilles bonapartistes, continuaient de paraĂ®tre. Non seulement on Ă´tait la parole aux journaux, qui auraient pu dĂ©tromper la population sur la nature de l'acte auquel il assistait, mais, par l'occupation des imprimeries, on empĂŞchait l'impression d'affiches, proclamations, dĂ©crets de l'AssemblĂ©e qui pussent donner Ă  la rĂ©sistance lĂ©gale la publicitĂ© indispensable. 

La résistance à Paris.
A huit heures du matin, l'exécution matérielle du coup d'Etat était terminée. Quelle allait être la résistance?

Nous examinerons ici successivement la résistance parlementaire et la résistance républicaine et insurrectionnelle à Paris. Une page distincte est consacrée à la résistance dans les départements

La résistance intitutionnelle.
La résistance parlementaire s'organisa dans la matinée du 2 décembre. Le président de l'Assemblée nationale, le pusillanime Dupin, fut avisé par le colonel Espinasse de ce qui se passait. Il fit convoquer à domicile ses collègues. Cependant, plusieurs réunions privées avaient lieu : des membres de la gauche s'assemblaient chez Yvan, secrétaire de l'Assemblée, d'autres chez Crémieux; des membres de la droite, chez Odilon Barrot, signaient une protestation, déclaraient la déchéance du président de la République, convoquaient la haute cour et les conseils généraux (Od. Barrot, Tocqueville, Dufaure, Lafayette, Passy, de Broglie, Duvergier de Hauranne, V. Lefranc, B. Delessert, etc.). D'autres, plus nombreux, se groupaient chez le vice-président Daru; à dix heures, ils essayaient de pénétrer dans le palais législatif d'où les soldats les repoussaient violemment. Vers le même moment, une quarantaine de membres qui s'étaient introduits dans la salle des séances en étaient expulsés sur l'ordre de Morny, et le président Dupin, qu'ils avaient amené, s'empressait de tourner les talons. Quelques-uns de ces députés furent arrêtés; de même ceux de la réunion Crémieux. Les membres de la réunion Daru, les plus nombreux, décidèrent de tenir une séance à la mairie du Xe arrondissement (auj. VIIe arrondissement de Paris), rue de Grenelle, près de la Croix-Rouge. A cette séance vinrent près de trois cents députés de la droite et de la gauche.

Un dĂ©cret de dĂ©chĂ©ance fut votĂ© Ă  l'unanimitĂ© et la haute cour convoquĂ©e pour juger le prĂ©sident et ses complices; le pouvoir exĂ©cutif Ă©tait dĂ©fĂ©rĂ© Ă  l'AssemblĂ©e nationale. Cette rĂ©union fut dissoute par la force. A trois heures de l'après-midi, les dĂ©putĂ©s furent arrĂŞtĂ©s et Ă©crouĂ©s Ă  la caserne du quai d'Orsay. Un appel nominal a constatĂ© la prĂ©sence de deux cent vingt dĂ©putĂ©s Ă  cette dernière sĂ©ance. Nous reproduisons leurs noms : 

Albert de Luynes, d'Andigné de La Chasse, Anthony Thouret, Arène, Audren de Kerdrel (Ille-et-Vilaine), Audren de Kerdrel (Morbihan), de Balzac, Barchou de Penhoen, Barrillon, Odilon Barrot, Barthélemy Saint-Hilaire, Banchard, Gustave de Beaumont, Béchard, Béhaguel, de Belvèze, Benoist d'Azy, de Bernardy, Berryer, de Berset, Besse, Beting de Lancastel, Blavoyer, Bocher, Boissiau, de Botmiliau, Bouvatier, de Broglie, de La Broise, de Bryas, Buffet, Caillet du Tertre, Gallet, Camus de la Guibourgère, Canet, de Castillon, de Cazalès, amiral Cécile, Chambolle, Chamiot, Champanhet, Chaper, Chapot, de Charancey, Chassaigne, Chanvin, Chazant, de Chazelles, Chégaray, de Coislin, Colfavru, Colas de La Motte, Coquerel, de Corcelles, Cordier, Corne, Creton, Daguilhon-Pujol, Dahirel, Dambray, de Dampierre, de Brotone, de Fontaine, de Fontenay, Desèze, Desmars, de La Devansaye, Didier, Dieuleveult, Druet-Desvaux, Abraham Dubois, Dufaure, Dufougerais, Dufour, Dufournel, Marc Dufraisse, Pascal Duprat, Duvergier de Hauranne, Etienne de Falloux, de Faultrier, Faure (Rhône), Favreau, Ferré des Ferris, de Flavigny, de Foblant, Frichon, Gain, Gasselin, Germonière, de Gicquiau, de Goulard, de Goyen, de Grandville, de Grasset, Grelier-Dufougeroux, Grévy, Grillon, Grimault, Gros, Guillier de La Tousche, Harscouët de Saint-George, d'Havrincourt, Hennecart, Hennequin, d'Hespel, Houel, Hovyn Tranchère, Huot, Joret, Jouannet, de Kéranflech, de Kératry, de Kéridec, de Kermasec, de Kersauson-Penendreff, Léo de Laborde, Laboulie, Lacave, Oscar de Lafayette, Lafosse, Lagarde, Lagrenée, Laîné, Lanjuinais, Larabit, de Larcy, J. de Lasteyrie, Latrade, Laureau, Laurenceau, général Lauriston, de Laussat, Lefebvre de Grosriez, Legrand, Legros-Desvaux, Lemaire, Emile Leroux, Lespérut, de Lespmois, Lherbette, de Linsaval, de Luppé, Maréchal, Martin de Villers, Maze-Saunay, Mèze, Armand de Melun, Anatole de Melun, Mérintié, Michaut, Mispoulet, Monet, de Montebello, de Montigny, Moulin, Murat-Sistrière, Alfred Nettement, d'Olivier, général Oudinot de Reggio, Paillet-Duparc, Passy, Ernile Péan, Pécoul, Casimir Perier, Pidoux, Pigeon, de Piogé, Piscatory, Proa, Prudhomme, Querhoent, Randoing, Raudot, Raulin, de Ravinel, de Rémusat, Renaud, Resal, de Rességuier, Henri de Riancey, Rigal, de La Rochette, Rodat, de Roquefeuil, des Retours de Chaulieux, Rouget-Lafosse, Rouillé, Roux-Carbonel, Sainte-Beuve, de Saint Germain, général de Saint-Priest, Salmon (Meuse), Sauvaire-Barthélemy, de Serré, de Sesmaisons, Simonot, de Staplante, de Surville, de Talhouet, Talon, Tamisier, Thuriot de La Rosière, de Tinguy, de Tocqueville, de La Tourette, de Trêvenoue, Mortimer-Ternaux, de Vatimesnil, de Vendoeuvre, Vernhette (Hérault), Vernhette (Aveyron), Vézin, Vitet, de Vogüé.
Il est curieux de constater combien ces hommes, unanimes à protester au nom du droit outragé, se montrèrent peu hommes d'action, insoucieux de s'entourer de forces capables de les protéger, peu disposés à donner le signal de la résistance à main armée. Leur arrestation en masse marque le terme de la résistance parlementaire.

Il faut placer ici le rĂ©cit de l'action de la haute cour de justice, tribunal suprĂŞme de la RĂ©publique qui avait mandat de statuer sur le sort du prĂ©sident de la RĂ©publique dans le cas d'un crime comme celui qui venait de s'accomplir. Comme les dĂ©putĂ©s de la majoritĂ©, ces magistrats firent leur devoir, au pied de la lettre, mais sans se soucier de faire rĂ©ellement Ă©chec aux criminels. Il semble qu'ils aient voulu seulement mettre leur honneur et leur responsabilitĂ© Ă  couvert. La haute cour se rĂ©unit soit spontanĂ©ment, soit en vertu du dĂ©cret rendu par l'AssemblĂ©e Ă  la mairie du Xe arrondissement. Etaient prĂ©sents : le prĂ©sident Ardouin, les juges Pataille, Delapalme, Auguste Moreau, Cauchy,  les supplĂ©ants QuĂ©nault et Grandet. Ils rendirent l'arrĂŞt suivant : 

« La Haute cour, vu les placards imprimés et affichés sur les murs de la capitale, et notamment celui portant : Le président de la République, l'Assemblée nationale est dissoute, etc.; lesdits placards signés : Louis-Napoléon Bonaparte, et plus bas : le ministre de l'intérieur, signé Morny; attendu que ces faits et l'emploi de la force militaire dont ils sont appuyés réaliseraient le cas prévu par l'article 68 de la constitution; déclare qu'elle se constitue; dit qu'il y a lieu de procéder en exécution dudit article 68; nomme pour son procureur général M. Renouard, conseiller à la cour de cassation et s'ajourne à demain midi pour la continuation de ses opérations. »
La Haute cour fut dissoute Ă  cinq heures par trois commissaires de police et un dĂ©tachement de la garde rĂ©publicaine. 

Le lendemain 3 décembre, elle se réunit de nouveau au palais de justice à midi et, constatant que les obstacles matériels à l'exécution de son mandat continuaient, elle se sépara définitivement. Les membres de ce haut tribunal ne furent nullement inquiétés par le vainqueur; ils conservèrent leurs sièges à la cour de cassation et prêtèrent serment de fidélité au prince-président. On voit combien étaient minimes les garanties que le pouvoir judiciaire offrait à la constitution.

Les tentatives dont nous venons de parler avaient épuisé les moyens prévus par la constitution pour réprimer un coup d'Etat. Il ne restait plus qu'à mettre la force au service du droit et à appeler aux armes le peuple pour faire face à la police et à l'armée complice de la haute trahison.

Les dĂ©putĂ©s de la gauche, qui avaient pris peu de part Ă  ces manifestations platoniques firent seuls des efforts positifs pour vaincre les auteurs de l'attentat commis contre la constitution et l'AssemblĂ©e nationale. Ils procĂ©dèrent comme en 1830 et en 1848, mais rencontrèrent un pouvoir plus fort et une foule indiffĂ©rente. Nous avons Ă©numĂ©rĂ© les forces dont disposait le prince Louis-NapolĂ©on. Que pouvait-on. leur opposer? L'attitude du peuple parisien Ă©tait fort inquiĂ©tante. 

La résistance dans les rues de Paris.
L'ouvrier hostile aux parlementaires qui l'avaient massacrĂ© en juin 1848, puis persĂ©cutĂ©, restait indiffĂ©rent Ă  une querelle entre eux et le prĂ©sident; il Ă©tait plutĂ´t gouailleur. Ses sentiments ne furent modifiĂ©s que peu Ă  peu, lorsqu'il constata la conduite du prĂ©sident envers les principaux dĂ©mocrates; toutefois, jusqu'Ă  la fin du conflit, la grande majoritĂ© de la population ouvrière s'abstint de prendre part Ă  la lutte. Ce ne fut qu'une minoritĂ© assez faible qui prit les armes. 

La bourgeoisie, qui Ă©tait encore en grande majoritĂ© libĂ©rale, se sentait directement frappĂ©e par le coup d'Etat; après un moment de stupeur elle manifesta nettement sa rĂ©pulsion. Mais elle ne pouvait rien par elle-mĂŞme. Son humeur pacifique l'empĂŞchait d'agir par la force; la garde nationale qu'elle recrutait Ă©tait dĂ©sorganisĂ©e; elle ne tenta mĂŞme pas de prendre les armes. Or seule la garde nationale qui avait culbutĂ© Louis-Philippe eĂ»t pu mettre en Ă©chec Louis-NapolĂ©on. II faut ajouter que les bourgeois avaient peine Ă  prendre au sĂ©rieux ce prĂ©tendant, deux fois vaincu et emprisonnĂ©, et s'attendaient toujours Ă  voir quelque gĂ©nĂ©ral fidèle Ă  la lĂ©galitĂ© mettre un terme Ă  son entreprise. 

Rien ne se fit donc le 2 décembre. Toutefois, le mécontentement général se donna jour au moment d'une promenade exécutée dans la matinée par le président. Il défila devant les troupes qui l'acclamèrent; mais, dès qu'il les dépassa, la foule l'accueillit par le cri de : Vive la République! Vive la Constitution! Dès lors Louis-Napoléon resta à l'Élysée, attendant que tout fût fini.

Les dĂ©putĂ©s de la gauche savaient que tout essai de rĂ©sistance entourĂ© de formalitĂ©s lĂ©gales Ă©tait condamnĂ© d'avance Ă  un Ă©chec. Il n'y avait qu'une chose Ă  faire, un appel aux armes. Une proclamation fut rĂ©digĂ©e, imprimĂ©e et affichĂ©e qui rĂ©tablissait le suffrage universel et invitait les citoyens Ă  faire leur devoir en dĂ©fendant la constitution menacĂ©e. Elle fut signĂ©e par : 

Michel (de Bourges), Schoelcher, général Leydet, Mathieu (de la Drome), Lasteyras, Brives, Breymand, Joigneaux, Chauffour, Cassal, Gillaud, Jules Favre, Victor Hugo, Emmanuel Arago, Madier de Montjau, Mathé, Signard, Ronjat (de d'Isère), Viguier, Eugène Sue, de Flotte. Dans la soirée, on élut un comité de résistance composé de Victor Hugo, Carnot, Jules Favre, Michel de Bourges, Madier de Montjau, Schoelcher, de Flotte.
La police, qui traquait les représentants, ne put réussir à s'en emparer. Cependant de vaines tentatives étaient faites pour publier les journaux républicains; on arrivait seulement à imprimer des protestations, les décrets de l'Assemblée, etc. L'agitation croissait, mais la journée .et la soirée du 2 décembre s'écoulèrent sans qu'une cartouche fût brûlée.

Le matin du 3 dĂ©cembre la situation n'avait pas changĂ©. Les bonapartistes Ă©taient maĂ®tres du terrain, mais l'opinion restait menaçante. Le prĂ©sident avait constituĂ© son nouveau ministère : Morny Ă  l'IntĂ©rieur, Saint-Arnaud Ă  la Guerre, Fould aux Finances, Turgot aux Affaires Ă©trangères, Rocher Ă  la Justice, Ducos Ă  la Marine, Fortoul Ă  l'Instruction publique, Magne aux Travaux publics, Lefèvre-DuruflĂ© Ă  l'Agriculture et Commerce. De plus on avait formĂ© nue commission consultative destinĂ©e Ă  remplacer provisoirement le Parlement. Mais les hommes notables se rĂ©cusaient ou se tenaient Ă  l'Ă©cart; en dehors des gĂ©nĂ©raux, nul n'adhĂ©rait ouvertement au coup d'Etat. L'ÉlysĂ©e Ă©tait vide; nul n'y apportait ses hommages. On attendait. Le prĂ©fet de police commençait Ă  s'affoler; les patrouilles multipliĂ©es fatiguaient les soldats. La tactique proposĂ©e par les chefs les plus intelligents du parti dĂ©mocratique Ă©tait de faire le vide autour des conspirateurs, de harasser l'armĂ©e par une sĂ©rie de petits engagements, construisant des barricades, mais les Ă©vacuant Ă  la première attaque, de manière Ă  Ă©viter tout choc avec un adversaire dont la supĂ©rioritĂ© matĂ©rielle Ă©tait Ă©crasante. 

Morny devina cette tactique et fit tout pour la déjouer. Durant les jours de crise il fut le véritable chef : c'est lui qui dirigea l'exécution du coup d'Etat, parant aux difficultés avec une souplesse d'esprit et une énergie que rien ne lassait; réconfortant et raillant Maupas, indiquant au général en chef la méthode : masser ses forces au lieu de les éparpiller; laisser les insurgés se grouper, s'engager à fond, élever des barricades sérieuses, puis les écraser en bloc et d'un seul coup.

Abordons maintenant le rĂ©cit des Ă©vĂ©nements. Les rues Ă©taient Ă  peu près vides : la première division et la division de cavalerie occupaient les Champs-ElysĂ©es et les Tuileries; la seconde, la rive gauche de la Seine; la troisième, I'HĂ´tel de ville et le faubourg Saint-Antoine; contre ces soixante mille hommes, les rĂ©publicains n'Ă©taient qu'une poignĂ©e d'hommes rĂ©solus, Ă  peine armĂ©s. Les dĂ©putĂ©s de la gauche, assemblĂ©s au nombre d'une quarantaine salle Roysin, voulurent soulever le faubourg Saint-Antoine; revĂŞtus de leurs Ă©charpes, suivis de quelques centaines d'ouvriers, ils improvisèrent une petite barricade au coin des rues de Cotte et Sainte-Marguerite. Ils ne pouvaient espĂ©rer le succès; ils voulaient seulement produire un effet moral, montrer aux soldats et au peuple l'image vivante de la loi et, s'il le fallait, mourir pour lui susciter des dĂ©fenseurs. Quand les soldats parurent, huit reprĂ©sentants debout sur la barricade. les haranguèrent; sept marchèrent vers les soldats qui ouvrirent leurs rangs sans les frapper; un coup de feu parti de la barricade provoqua une dĂ©charge qui tua le reprĂ©sentant Baudin et un ouvrier. 

Ce tragique Ă©vĂ©nement ne put modifier les sentiments des ouvriers du faubourg qui restèrent chez eux. Dans les quartiers Ă©loignĂ©s, l'impression fut profonde et au centre de Paris, autour des rues du Temple, Saint-Martin, Saint-Denis, les barricades s'Ă©levèrent. De mĂŞme Ă  Belleville. Les quartiers riches huaient les partisans de l'ElysĂ©e. Le ministre de la  guerre fit afficher une proclamation dĂ©clarant que « tout individu pris construisant ou dĂ©fendant une barricade ou les armes Ă  la main, serait fusillĂ© ». Ce parti pris de froide cruautĂ© Ă©tait sans exemple dans l'histoire des rĂ©volutions parisiennes et contraire Ă  toutes les lois.

La tactique suivie par les républicains fut en général de harceler la troupe, défendant à peine les barricades contre les colonnes, mais les réoccupant après leur passage. On se battit cependant rue Aumaire, rues Beaubourg, Greneta et Transnonain et soixante à quatre-vingts hommes furent tués ou fusillés. A ce moment, le mouvement révolutionnaire se dessinait très puissant; partout des rassemblements que ne dissipaient qu'un instant les charges de cavalerie et les patrouilles. La foule était unanime contre le président. Dans la soirée du 3 décembre, sa défaite devenait probable. C'est alors que fut tenu un grand conseil de guerre entre Saint-Arnaud, Magnan et de Morny qui fit prévaloir son plan : concentrer les troupes, éviter le contact de la population qui les ébranlait, laisser construire des barricades, puis agir brusquement et écraser toute résistance.

La journĂ©e du 4 dĂ©cembre fut dĂ©cisive; deux faits se produisirent qui brisèrent la rĂ©sistance; les hommes les plus vaillants du parti rĂ©publicain furent en grande partie tuĂ©s, blessĂ©s ou pris dans une sĂ©rie de combats de barricades livrĂ©s au contre de Paris; la population fut terrifiĂ©e par le massacre des boulevards. 

Au matin du jeudi 4 décembre, l'attitude de la foule était de plus en plus hostile au coup d'Etat. Elle s'amassait dans les rues, applaudissant à la lecture des appels aux armes imprimés durant la nuit. Il avait fallu faire aux soldats des distributions d'argent après les distributions de vivres. Le préfet de police avait interdit la circulation des voitures et décrété qu'on disperserait les rassemblements sans sommations. Conformément au conseil de Morny, les troupes avaient été retirées. De la rue Montmartre à la rue du Temple et au canal Saint-Martin, des barricades se multipliaient. Les plus fortes étaient rue Saint-Denis en vue des boulevards, rue des Petits-Carreaux, autour des rues Montmartre et Saint Martin, au cloître Saint-Merri, au coin des rues du Temple et Rambuteau; la mairie du Ve arrondissement (faubourg Saint-Martin) fut occupée; les-armuriers donnaient des armes. Toute la population élégante des boulevards et de la chaussée d'Antin encourageait la résistance, criant « A bas les traîtres! » au passage des aides de camp et des pelotons. Sur la rive gauche, le quartier latin s'agitait, les étudiants ébauchaient des barricades; à La Chapelle, aux Batignolles, à Montmartre, on remuait. Morny vint examiner la situation; le moment lui parut venu d'agir.

« Les barricades étaient déjà nombreuses et suffisamment fortes pour que leurs défenseurs fussent tentés d'accepter le combat. La nombre de ceux-ci n'était pas assez considérable pour que l'issue de la lutte fût douteuse; mais ils formaient un noyau d'élite, comprenant les hommes les plus énergiques du parti républicain, ouvriers et bourgeois; s'il leur était donné d'entretenir pendant une journée la guerre d'escarmouches, leur nombre allait se décupler et la matinée du lendemain les aurait trouvés formidables. En enveloppant par de grandes masses de troupes les quartiers où ils étaient retranchés, en attaquant avec vigueur, on pouvait écraser, d'un seul coup, ce que le Paris révolutionnaire comptait d'hommes les plus intrépides. L'occasion était opportune pour faire la guerre de ville comme l'entendait M. de Morny. En « frappant ferme » sur les boulevards, on allait couper court à l'opposition bourgeoise; il n'y aurait pas à redouter de voir le lendemain, ainsi qu'en février, les uniformes de la garde nationale mêlés aux blouses et aux paletots des insurgés. » (E. Ténot).
D'autre part, les soldats reposés, bien nourris et abreuvés, isolés de la foule, étaient prêts à tout. La méthode suivie en cette circonstance fut la cause déterminante du succès de l'Elysée.

Vers deux heures de l'après-midi, les troupes se mirent en marche. La division Carrelet, brigades de Bourgon, de Cotte, Canrobert, avec quinze bouches Ă  feu et la cavalerie du gĂ©nĂ©ral Reybell, se dĂ©ploya sur les boulevards; la brigade Dulac occupa la pointe Sainte-Eustache; les brigades Marulaz et Herbillon prirent position près de l'HĂ´tel de ville au dĂ©bouchĂ© des rues du Temple, Saint-Martin et Saint-Denis; la brigade de Courtigis balaya le faubourg Saint-Antoine; la division Renault occupa le Luxembourg, l'OdĂ©on, le PanthĂ©on, la place Maubert. Le quartier gĂ©nĂ©ral de l'insurrection (de la rue Montmartre Ă  la rue du Temple) Ă©tait enveloppĂ© par trente mille hommes de troupes rĂ©gulières. Les rĂ©publicains Ă©taient environ douze cents, huit Ă  neuf cents du cĂ´tĂ© des boulevards, quatre cents tout au plus du cĂ´tĂ© opposĂ©. 

La foule massée sur les boulevards s'écartait devant les troupes de la division Carrelet, les accueillant par des cris hostiles. Des premiers coups de feu furent tirés à la barricade du Gymnase, qui barrait le boulevard. Elle fut rapidement enlevée comme celles de la porte Saint-Denis, du Château d'Eau, par la brigade Bourgon, qui attaqua ensuite la rue du Temple, tandis que la brigade de Cotte se portait rue Saint-Denis, la brigade Canrobert et les lanciers du général Reybelll restant sur les boulevards. La brigade de Bourgon emporta successivement les barricades de la rue du Temple et des rues voisines; les brigades Dulac, Marulaz et Herbillon opéraient un mouvement convergent; le canon fut souvent employé, notamment contra la grande barricade de la rue Rambuteau, qui résista près d'une heure. La lutte fut encore plus vive à celle de la rue Saint-Denis, où tombèrent le colonel et le lieutenant-colonel du 72e de ligne, repoussé avec perte; elle ne fut évacuée qu'à quatre heures et demie quand les cent cinquante défenseurs se virent tournés; rue des Petits-Carreaux, la résistance fut aussi vive; non moins faubourg Saint-Martin contre la brigade Canrobert qui fut longtemps arrêtée par la barricade de la rue des Vinaigriers. Vers cinq heures du soir, la bataille était finie. Cependant une centaine de républicains, désespérés de la défaite et ne voulant pas y survivre, se reformèrent à neuf heures du soir dans la rue Montorgueil; c'est là que fut tué Denis Dussoubs, qui avait revêtu l'écharpe de député de son frère. Un grand nombre de prisonniers furent fusillés sur-le-champ, selon la menace du ministre de la guerre. Ces exécutions, que ne peut expliquer l'acharnement de la lutte où les soldats étaient vingt-cinq contre un, contribuent à donner au coup d'Etat du 2 décembre son caractère de cruauté réfléchie. Mais ce qui souilla à jamais la mémoire de ses auteurs, ce fut la fusillade des boulevards.

Bien qu'on l'ait affirmé, il paraît inadmissible que ce massacre ait été prémédité; il est également prouvé qu'il ne fut pas provoqué par des coups tirés des maisons sur les soldats. Ceux-ci (brigades Canrobert, de Cotte, Reybell) stationnaient ou défilaient lentement sur la ligne des boulevards couverts de colonnes serrées d'infanterie avec çà et là des pièces de douze et des obusiers, particulièrement en haut du boulevard Poissonnière. Les fenêtres étaient garnies de monde, des curieux surtout, peu sympathiques à l'armée, poussant parfois des cris hostiles au président. Les soldats, excités contre la population, exaspérés par son attitude, hantés de la crainte des guerres de fenêtres, étaient tout disposés à se croire entourés d'ennemis prêts à faire feu; leur surexcitation nerveuse était extrême; quelques officiers, comme le colonel Rochefort, se sont abandonnés à de véritables accès de folie furieuse, se ruant sur les gens qui criaient : Vive la République! à la terrasse de Tortoni, les sabrant et égorgeant à plaisir. L'exaltation des simples soldats se comprend. A trois heures, des coups de feu, tirés sur la tête de colonne, boulevard Bonne-Nouvelle, amenèrent une explosion. Les premiers pelotons ripostèrent, tirant sur les fenêtres des maisons. De proche en proche, l'émotion se communiqua par la contagion de l'exemple; sur toute la ligne des boulevards Bonne-Nouvelle, Poissonnière, Montmartre et des Italiens, l'un après l'autre chaque peloton fit feu sur les maisons, massacrant les spectateurs inoffensifs sur qui cette grêle de balles tomba pendant plus d'un quart d'heure. Le témoignage d'un officier anglais, William Jesse, témoin oculaire, est d'une précision extrême : les décharges se succédaient avec une régularité parfaite, chaque compagnie apprêtant ses armes et tirant à son tour. Quelques minutes après, la première décharge des canons fut braquée sur le magasin Sallandrouze qui fut éventré par les obus et la mitraille. Un grand nombre de spectateurs tombèrent sous cet ouragan de plomb; les estimations sur le nombre des morts varient de cent à huit cents. Longtemps après que la panique fut calmée par les efforts des officiers, on continua de tirer sur quiconque traversait le boulevard ou sur des groupes inoffensifs dans les rues adjacentes. Une scène analogue se passa sur les quais de la rive droite, mais ne fit à peu près pas de victimes.

Ce massacre, sans exemple dans les guerres civiles et dont la seule excuse est qu'il ne fut pas prĂ©mĂ©ditĂ©, produisit un effet extraordinaire, DĂ©sormais, on savait que les auteurs  du coup d'Etat ne reculeraient devant rien; l'Ă©pouvante inspirĂ©e aux spectateurs et Ă  ceux qui avaient Ă©chappĂ© se propagea dans toute la bourgeoisie parisienne et jusqu'au peuple. La stupeur fut gĂ©nĂ©rale; la ville Ă©tait terrorisĂ©e encore plus qu'indignĂ©e. Louis-NapolĂ©on Ă©tait vainqueur.

Le 5 décembre, quand les survivants de la bataille des barricades et les députés de la gauche voulurent reprendre la lutte, la population n'osait plus bouger. Les quelques barricades élevées à la Croix-Rouge, barrière Rochechouart, ne furent même pas défendues. La foule allait, cité Bergère, reconnaître les cadavres. Ensuite on les transféra au cimetière Montmartre où on les enterra, laissant la tête au dehors pour que les familles pussent les reconnaître. On ignore le nombre exact des victimes du coup d'Etat. L'armée eut environ deux cents hommes hors de combat dont vingt-sept morts; les insurgés durent perdre de deux à trois cents morts y compris les fusillés, et le massacre du boulevard doubla on tripla ce chiffre. On a parlé de fusillades ultérieures, mais avec grande exagération. Ce qui est vrai, c'est qu'à partir du succès on fit à Paris des milliers d'arrestations.

Le 8 dĂ©cembre, Louis-NapolĂ©on publia une proclamation oĂą il se fĂ©licitait de la fin des troubles et remerciait le peuple. En mĂŞme temps, il rendait un dĂ©cret autorisant la transportation Ă  Cayenne sans jugement, par mesure de sĂ»retĂ© publique, des individus reconnus coupables d'avoir fait partie d'une sociĂ©tĂ© secrète. Pendant plus d'un mois chaque jour les arrestations se rĂ©pĂ©tèrent, encombrant de milliers de prisonniers les prisons et les forts de Paris. Les rĂ©publicains notables, bourgeois et ouvriers, furent Ă©crouĂ©s successivement. En mĂŞme temps on relaxait les dĂ©putĂ©s de la droite arrĂŞtĂ©s le 2 dĂ©cembre. Quelques orlĂ©anistes furent exilĂ©s : 

les gĂ©nĂ©raux Bedeau, Changarnier, de Lamoricière et LeflĂ´, Duvergier de Hauranne, Thiers, Chambolle, Creton, Baze, RĂ©musat, J. de Lasteyrie; un dĂ©putĂ© rĂ©publicain, Miot, fut dĂ©portĂ© en Afrique; Marc Dufraisse, MathĂ©, Greppo et Richardet, dĂ©signĂ©s pour la transportation, ne furent qu'exilĂ©s; de mĂŞme Pascal Duprat, Victor Chauffour, Edgar Quinet, Antony Thouret, Versigny et Emile de Girardin. 
Puis soixante-six autres représentants républicains furent exilés ; voici leurs noms d'après le Moniteur :
Edmond Valentin, Paul Racouchot, Agricol Perdiguier, Eugène Cholat, Louis Latrade, Michel Renaud (Basses-PyrĂ©nĂ©es), Joseph BenoĂ®t (RhĂ´ne), Joseph Burgard, Jean Colfavru, Joseph Faure (RhĂ´ne), Pierre-Charles Gambon, Charles Lagrange, Martin Nadaud, BarthĂ©lemy Terrier, Victor Hugo, Cassal, Signard, Viguier, Charrassin, Bandsept, Savoye, Joly, Combier, Boysset, DuchĂ©, Ennery, Guilgot, Hochstuhl, Michot-Boutet, Baune, Bertholon, Schoelcher, de Flotte, Joigneaux, Laboulaye, Bruys, Esquiros, Madier de Montjau, NoĂ«l Parfait, Emile PĂ©an, Pelletier, Raspail, ThĂ©odore Bac, Bancel, Belin (DrĂ´me), Besse, Bourzat, Brives, Chavoix, Dulac, Dupont (de Bussac), Gaston Dussoubs, Guiter, Lafond, Lamarque, Pierre Lefranc, Jules Leroux, Francisque Maigne, Malardier, Mathieu (de la DrĂ´me), Millotte, Roselli-Mollet, Charras, Saint-FerrĂ©ol, Sommier, Testelin (Nord).  (A.-M. B.).
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