|
. |
|
|
La
Principauté
d'Andorre, qui est une démocratie parlementaire,
aujourd'hui indépendante politiquement, a possédé un statut féodal
pratiquement jusqu'à la fin du XXe siècle.
C'était une seigneurie placée sous la suzeraineté conjointe du chef
de l'État français et de l'évêque de la Seo de Urgel, qui portaient
(et portent encore, bien que cela ne dénote plus une souveraineté réelle)
le titre de coprinces.
Louis le Débonnaire,
d'après document dont l'authenticité est plus que douteuse, aurait donné
en 805 aux vallées d'Andorre une première charte. Disputée entre les
comtes d'Urgel, les évêques de cette ville et les comtes de Castelbon
aux prétentions desquels succédèrent au XIIIe
siècle, les comtes de Foix, l'Andorre fut organisée en 1278 par une sentence
arbitrale qu'on appelle les paréages (ou
pariages). Le pays
fut dès lors placé sous la double suzeraineté de l'évêque et du comte
de Foix; Le comté de Foix passa aux rois de Navarre, puis, à l'avènement
de
Henri IV, Ã la couronne de France.
Napoléon
Ier, par un décret du 27 mars 1806,
organisa les relations de la France et de l'Andorre. Les droits des deux
coprinces n'avaient pas été définis depuis 1278, ce qui a encore donné
lieu à de multiples difficultés. Le statut juridique de l'Andorre, dont
l'économie a prospéré après la Seconde
Guerre mondiale grâce à l'explosion du tourisme, ne s'est transformé
que dans la seconde moitié du XXe
siècle,
pour aboutir en 1993 à son indépendance complète.
Dates-clés 1278 - Accord de paréage établissant la suzeraineté conjointe de la France (comtes de Foix, d'abord) et de l'évêque d'Urgel sur l'Andorre. |
||
L'histoire
de l'Andorre remonte à des périodes bien antérieures à la période
historique, avec des traces de peuplement datant de la préhistoire. Les
découvertes archéologiques dans les vallées andorranes montrent des
preuves de la présence humaine dès le Paléolithique
et le Néolithique. Mais les textes manquent,
qui permettraient d'en retracer l'histoire pendant l'Antiquité. L'une
des premières légendes associées à l'Andorre concerne Charlemagne.
Selon la tradition andorrane, Charlemagne
aurait libéré les vallées andorranes des Maures à la fin du VIIIe
siècle. En reconnaissance de cette aide, les Andorrans auraient juré
fidélité à Charlemagne et ses successeurs. Cette légende, bien que
peu appuyée historiquement, a une grande importance symbolique pour la
principauté. Suivant une autre légende, Louis
le Débonnaire, fils de Charlemagne, aurait érigé les vallées en
république indépendante, en l'an 805, par une charte célèbre dans le
pays; ce document n'est connu que par des analyses données dans le Politar,
dans la Historia de la Republica a Andorra, de Dalmau de Baquer,
etc.; il y a tout lieu de croire que c'est une pièce apocryphe, dont le
rédacteur s'est inspiré, d'une part des préceptes octroyés par Charlemagne
et ses successeurs aux Espagnols réfugiés en France, de l'autre des cartas
de poblacion de la région pyrénéenne. Il est de fait que l'Andorre
fut conquise par les soldats francs au VIIIe
siècle. Sous la dynastie Carolingienne,
on retrouve plusieurs fois le nom de ce petit pays dans les concessions
faites par les empereurs aux fidèles ou aux églises; mais les écrivains
ont vu à tort dans ces donations de droits domaniaux ou ecclésiastiques
dans la vallée autant de concessions de la vallée tout entière à titre
de bénéfice ou de fief, et ils ont retracé au moyen de ces documents
une histoire erronée des prétendus seigneurs de l'Andorre : il suffit,
pour se convaincre de leur erreur, de lire le texte même des préceptes
sur lesquels ils s'appuient.
Ces observations peuvent s'appliquer aux actes de vente, d'échange, etc., dans lesquels on a cherché l'origine des pouvoirs des comtes et des évêques d'Urgel jusqu'au XIIe siècle. Les comtes ont acquis quelques terres dans la vallée et ont pu les céder légitimement aux évêques; ceux-ci possédaient déjà des droits ecclésiastiques, ce que l'on appelait des paroisses : dîmes, prémices, revenus de quelques fermes; mais les droits seigneuriaux ont été usurpés : voilà ce qui ressort des prétendus titres de leurs possesseurs. A qui peut-on attribuer la suzeraineté de l'Andorre au XIIe siècle? à l'évêque d'Urgel ou au comte d'Urgel, suivant que l'on se base sur tel ou tel acte; il est vraisemblable que ces deux personnages possédaient simultanément des droits sur les vallées. Ce qui est parfaitement certain, c'est que l'Andorre avait été inféodée au XIIe siècle aux vicomtes de Castelbon, en tout ou en partie, et qu'ils exigeaient l'hommage des habitants. Par une charte datée de 1206, l'évêque d'Urgel avait renouvelé l'inféodation de ses possessions en Andorre en faveur d'Ermessinde, héritière des Castelbon; Ermessinde épousa Roger-Bernard II, futur comte de Foix, et c'est ainsi que l'Andorre entra dans la maison de Foix. |
L'Andorre n'a pas beaucoup de monuments remarquables. Le Palais des Vallées est une construction du XVIe siècle, spacieuse mais sans caractère : c'est là que se réunissait le Conseil général, que se tenaient les Corts, que se donnaient les repas d'apparat, reste du droit d'albergue que les seigneurs pouvaient exiger jadis. Chaque paroisse avait sa casa consistorial. Le château de Saint-Vincent, bâti au XIIe siècle par les vicomtes de Castelbon, est aujourd'hui ruiné; les mêmes barons auraient eu, d'après la tradition, la torre de Rossel, dans la paroisse d'Encamp. La Seca et la Neca sont deux vieilles tours que l'on a crues à tort de construction mauresque. |
Roger-Bernard
prit une part active aux querelles des barons de cette contrée; on sait
aussi les démêlés que sa famille eut avec l'Église, pendant la première
moitié du XIIIe siècle, à propos des
Albigeois;
l'évêque d'Urgel profita de ces différends pour saisir les fiefs de
son vassal; celui-ci en appela au Saint-Siège en 1243, et récusa, comme
notoirement hostile, la cour de son suzerain. Peu après, en 1258, le comte
d'Urgel céda au comte de Foix,
Roger IV, les droits qu'il pouvait avoir sur la vallée; en 1275, des Andorrans
offrirent à Roger-Bernard III, successeur de Roger IV, la haute justice.
Enfin, après d'interminables querelles et des hostilités sanglantes,
les deux parties convinrent de confier à des arbitres le jugement de leurs
différends : de là le fameux pariage de 1278, qui n'est que la sentence
des arbitres, acceptée et ratifiée par les belligérants. Ce traité
associait le comte de Foix aux droits de l'évêque sur l'Andorre; il créait
en sa faveur un condominium; mais, par une clause commune dans la contrée,
le baron français devait tenir en fief du prélat sa part de coseigneurie;
il fit hommage, en effet, le jour même; mais ensuite cette formalité
ne fut plus exigée, et l'on a pu dire que les évêques avaient abandonné
la suzeraineté que le pariage leur attribuait sur Roger-Bernard et sur
ses ayants droit. En 1282, l'accord de 1278 fut confirmé par une bulle
du pape Martin IV. Les pouvoirs des comtes passèrent plus tard à la couronne
de France, quand Henri IV monta sur le trône.
Durant le cours du XVIIIe siècle, les Andorrans ont soutenu contre les habitants de Mérens (aujourd'hui dans le département de l'Ariège), à propos des pâturages de la Soulane, un procès qui s'est encore prolongé au siècle suivant. Les relations entre la France et les vallées furent suspendues pendant la Révolution, à la suite du refus des agents de la République de recevoir le tribut annuel des Andorrans qui leur paraissait entaché de féodalité (1793); un décret du 27 mars 1806 rétablit ces relations : le préfet de l'Ariège fut nommé représentant de la France; ce titre lui a été enlevé en 1882, pour être confié d'abord au sous-préfet de Prades, puis au préfet des Pyrénées-Orientales. Entre-temps, en 1812-1813, l'Andorre fut temporairement annexée par Napoléon en même temps que la Catalogne. |
L'Andorre
a été agitée pendant tout le XIXe siècle
et au début du siècle suivant par des troubles divers, chacune des factions
s'appuyant sur l'un ou l'autre des coprinces. En 1819, en 1867, en 1880-1881
et en 1885, le gouvernement français menaça d'intervenir énergiquement
pour rétablir l'ordre. En 1933, brièvement, la France
occupa militairement le pays. En 1934, l'Espagne
et des gendarmes français sont intervenus ensemble, mais cette fois seulement
pour procéder à l'arrestation d'un certain Boris Skossyreff, qui, quelques
jours plus tôt, s'était proclamé roi d'Andorre, sous le nom de Boris
Ier, et avait déclaré la guerre à l'évêque
d'Urgel... Pendant la guerre civile en Espagne (1936-1939), la France a
installé en Andorre une garnison afin de prémunir la principauté contre
une possible extension du conflit sur son sol. Pendant la Seconde
guerre mondiale, l'Andorre est restée neutre, à l'image de l'Espagne.
Au lendemain du conflit mondial, l'archaïsme du statut juridique de l'Andorre est apparu plus patent que jamais. Des difficultés continuaient de s'élever directement entre les coseigneurs, et ce fait s'expliquait aisément si l'on considérait que leur situation réciproque était réglée par les pariages de 1278. Quel qu'ait été le respect des traditions, près de sept siècles n'avaient pu passer sur les vallées sans modifier profondément tous leurs usages; la constitution s'est même complètement modifiée, et l'application rigoureuse des pariages était devenue impossible : les conflits devaient rester inévitables, tant que les obligations respectives des deux seigneurs ne seraient pas été définies dans un nouveau pariage, en harmonie avec l'état du droit public et privé de l'Andorre. Une forme d'autonomie
fut ainsi accordée à l'Andorre dès 1960, mais c'est seulement à partir
de la fin des années 1980 que cette évolution de plus en plus nécessaire
a pu s'accomplir. Sous la pression de la modernisation et des revendications
populaires, les deux coprinces se sont enfin mis d'accord en janvier 1981
pour commencer à mettre en route des réformes institutionnelles. L'Andorre
a mis en place son premier exécutif, le Consell Executiu, pour gérer
les affaires courantes du pays, un pas vers la séparation des pouvoirs.
Le droit de vote fut accordé à tous les Andorrans en 1985, en même temps
que les conditions d'éligibilité étaient redéfinies. Des accords douaniers
avec la CEE ont été directement conclus par l'Andorre en 1991, et en
1993, l'adoption d'une constitution et l'élection au suffrage universel
direct d'un parlement (le Conseil général des Vallées) ont transformé
Andorre en une démocratie parlementaire.
Parallèlement à cette modernisation politique, l'Andorre a aussi connu une modernisation économique. Pendant les années 1960, le pays demeurait une société essentiellement agraire et isolée. Il a connu un développement économique spectaculaire à partir des années 1970. L'Andorre a alors profité de sa situation géographique entre la France et l'Espagne et de son statut de paradis fiscal pour attirer de nombreux touristes. Le ski est devenu un attrait majeur, faisant de la principauté une destination touristique réputée pour les sports d'hiver, notamment à Grandvalira et Vallnord. Le secteur bancaire, avec des lois favorables à la confidentialité financière, a attiré des investisseurs internationaux et a permis à l'Andorre de prospérer économiquement. Toutefois, cette situation a évolué sous la pression internationale pour plus de transparence fiscale. Le pays a connu des réformes sociales importantes dans les années 2000 et 2010, en réponse aux défis de la modernisation et aux demandes de transparence financière. L'Andorre a été touchée par la crise financière mondiale de 2008, ce qui a entraîné une réévaluation du rôle de son secteur bancaire. En 2015, la banque privée Banca Privada d'Andorra (BPA) a été impliquée dans un scandale de blanchiment d'argent, ce qui a précipité la mise en place de réformes financières pour améliorer la transparence. En réponse aux critiques internationales, notamment de l'OCDE et de l'Union européenne, Andorre a commencé à démanteler son système de secret bancaire et à adopter des mesures de coopération fiscale. Le pays a signé plusieurs accords d'échange automatique d'informations fiscales pour répondre aux normes internationales. L'intégration d'Andorre dans la scène internationale est elle aussi relativement récente. Avant les années 1990, l'Andorre avait peu de relations diplomatiques en dehors de ses coprinces. Après la Constitution de 1993, l'Andorre est devenue membre de l'Organisation des Nations unies (ONU) la même année. Bien que l'Andorre ne soit pas membre de l'Union européenne, le pays a conclu plusieurs accords avec l'UE, notamment sur la libre circulation des marchandises et des personnes. En 2011, l'Andorre a introduit l'euro comme monnaie officielle malgré l'absence d'accord formel de la part de l'UE pour rejoindre la zone euro. L'Andorre, malgré sa taille modeste, continue aujourd'hui de faire face à plusieurs défis, dont l'ajustement à la mondialisation, la diversification économique et les enjeux environnementaux. Le pays cherche à réduire sa dépendance au secteur touristique et au secteur financier en encourageant l'innovation et en attirant des investissements dans d'autres domaines comme la technologie et l'éducation. Par ailleurs, compte tenu de sa géographie montagneuse, l'Andorre est confrontée aux effets du changement climatique, qui menace ses activités de sports d'hiver. Le pays a commencé à adopter des politiques visant à promouvoir un développement durable. |
. |
|
|
||||||||
|