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Ophites.
- Nom général donné à une série de communautés
gnostiques. On range dans cette catégorie
les Naasséniens, qui sont ceux généralement auxquels
on se réfère quand on parle d'Ophites sans autre précision,
les Caïnites, les Séthiens, les Pérates, puis des groupes
moins importants ou moins connus, comme les stratiotiques, les phibionites,
les borhoriens, les barbéliotes et d'autres encore.
Naasséniens
- Leur nom vient du terme sémitique nahas qui signifie «-serpent
». Ce sont donc les ophites (ophis = serpent) proprement dits,
bien que ce nom s'emploie mieux pour désigner le groupe de toutes
les sectes ophiolâtres du gnosticisme. Le berceau des naasséniens
paraît avoir été la Phrygie. Ils admettaient comme
principe premier l'humain, « être
des êtres », « moteur universel et immobile ».
Au-dessous de lui, il y a le Fils de l'humain ou Adamas, qui semble parfois
se confondre avec le premier.
Adamas est androgyne;
de lui sort le courant de toute vie et « s'écoulent »
à la fois la substance de tout être
et la forme qui individualise
l'être, c.-à-d. la matière
et l'esprit. Il y a peu d'intérêt
à détailler la série des émanations d'éons
qui procèdent d'Adamas. L'un d'eux, Yaldebaôt (fils du Chaos)
- d'autres lisent El-Chadday (Dieu tout-puissant)
- est identifié à Yahveh, le Dieu
des Hébreux, qui crée le monde et l'humanité. Celle-ci
se laisse séduire par la Sophia (= Science).
Le Christ
intervient, informe les humains de l'existence
du Père invisible et finit par ramener au principe premier ceux
qui se laissent éclairer. Comme chez tous les ophites, le serpent
tenait une grande place dans le culte et dans le symbolisme des naasséniens.
Les gnostiques dont parle Irénée (Adv. haeres., I,
10,1; 31,2) sont apparemment un rameau des naasséniens, que combat
Hippolyte (Philosoph., V, pp. 432 et suiv.).
Caïnites.
- Cette secte tire probablement son nom de ses doctrines
sur Caïn. Ces doctrines avaient un grand rapport
avec celles des autres Ophites. Selon les Caïnites, le Dieu
de la Bible,
le créateur du ciel et de la terre
et Dieu des Juifs, était un dieu d'une nature très imparfaite,
rempli d'ignorance et d'orgueil. En conséquence, les Caïnites
trouvaient la perfection dans l'opposé de la révélation
juive et honoraient les personnages que la Bible avait stigmatisés.
En premier lieu, Caïn qui, en donnant la mort à son frère
Abel, avait montré que la puissance dont
il tenait sa force était d'un ordre supérieur à celle
qui protégeait Abel, c.-à-d. à Yahveh,
le Dieu des Hébreux; puis Ésaü, les habitants de Sodome,
Coré et ses compagnons au sujet desquels ils avaient écrit
toute une légende. Judas l'Iscariote était aussi tenu
en honneur par les Caïnites; s'il trahit son maître, c'est qu'il
savait que sa trahison était nécessaire au salut du genre
humain; si on l'a noté d'infamie dans les Évangiles,
c'est que les autres apôtres le haïssaient
parce qu'il avait connaissance de vérités
supérieures qui ne leur avaient pas été révélées.
Ils avaient des livres
apocryphes
dont l'un, au témoignage de saint Epiphane de Chypre,
se nommait l'Ascension de Paul, et où l'on décrivait
toutes les merveilles et tous les secrets que l'apôtre Paul avait
vus et appris, lorsqu'il fut ravi au troisième ciel. On a souvent
accusé les Caïnites d'immoralité; ils auraient exactement
pratiqué le contraire des lois juives et auraient même placé
chacune de leurs pratiques immorales sous la protection particulière
d'un ange. Comme ces pratiques étaient
fort nombreuses et que les anges ayant une dénomination distincte
le sont assez peu, les Caïnites avaient inventé, paraît-il,
des noms angéliques, et ils invoquaient cet ange au moment où
ils se livraient à quelque acte d'immoralité.
Selon leur expression,
c'était avoir la gnose parfaite. On a très peu de renseignements
sur la doctrine et l'existence des Caïnites. Ils commencèrent
probablement d'apparaître dans les premières années
du second siècle et un siècle plus tard, saint Hippolyte,
dans son Hérésiologie, ne les jugea pas dignes d'être
réfutés en forme, d'où l'on peut conclure qu'ils n'avaient
ni vogue, ni influence, s'ils n'étaient pas complètement
disparus.
Séthiens.
- Cette secte du IIe siècle de l'ère chrétienne
honorait en Seth le fils de la divine Sagesse,
représentant l'esprit, en opposition à Abel
qui représentait I'âme et à
Caïn qui représentait la chair.
Pérates.
- Les adeptes de cette secte se nommaient pérates, «
traversiers», parce qu'ils entendaient passer du monde sensuel dans
celui de la vie éternelle. Ils prêchaient la connaissance
du Dieu « autogène »; l'intermédiaire
entre le principe de l'idée-pure
et la matière est le logos
(= la raison) représenté comme le
«-serpent
universel » (Ouroboros),
établissant une sorte de va-et-vient entre le monde et Dieu.
L'astrologie les préoccupait beaucoup.
Leur origine remonte à 150 environ.
Le caractère commun à toutes
ces communautés est le rôle attribué dans leur symbolisme
et dans leur culte au serpent (ophis, en grec). Comme dans presque
toutes les sectes ophiolâtres de l'Antiquité, le serpent symbolisait
une puissance salutaire, guérissante; dans les écrits sacrés
de l'église chrétienne, ces gnostiques
mettaient en évidence l'histoire de Moïse
et du serpent d'airain (Nombres, xxi), rappelée par Jésus
(Jean, III, 14). Le serpent représentait d'ordinaire l'élément
humide, fécond par excellence, qui pénètre tout et
d'où émanent les éons, les
incarnations les plus variées. Le serpent, pour eux renferme tout
en lui « comme la corne de la licorne-».
Des serpents apprivoisés figuraient dans les cérémonies
des cultes; il en circulait sur les tables dressées pour l'eucharistie.
Par un jeu de mots, en rapprochait le mot grec grec naos (= temple)
du mot sémitique nahas (= serpent), et on déclarait
inséparables l'idée de culte et celle de serpent. (F.-H.
K. / E Amélineau). |
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