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L'île de Samos
[Histoire de Samos]

37° 43' N
26° 50' E
Samos (Samo, Sousam Adasi) est une île situé dans la partie orientale de la mer Egée, proche du littoral de la Turquie d'Asie, et appartenant à la Grèce. Elle surgit de la mer à 70 kilomètres au Sud-Sud-Ouest d'Izmir, en brise-lames méridional pour le golfe de Kusadasi, à 2-3 kilomètres seulement du continent d'Asie, qui s'avance à sa rencontre par la presqu'île effilée du mont Mycale (Dilek Tepe Samsun, 1227 m). 

Longueur maxima, 45 kilomètres; largeur, 10 à 19 km; pourtour, 146 km environ; aire, 475 km². L'étendue de Samos était évaluée par Pline à trente-sept milles de circuit (Histoire naturelle, V, 37) et par Strabon à six cents stades, pendant que Scylax plaçait cette île au dixième rang entre Chios et Corfou.

Samos est toute en montagnes, jusqu'à 1433 m au mont Kerkis, l'ancien Kerketeus; reliefs presque tous dénudés, sauf des bois de cyprès, de pins. 

L'île compte une population d'environ 33.000 habitants (2015). Son chef-lieu porte aussi le nom de Samos.
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Carte de Samos.
Carte de Samos. (Alitudes en pieds; 1 pied = 0,305 m).

Samos jouit « en plein » du climat méditerranéen, qui est ici spécialement sec et bienfaisant ; les Anciens prétendaient que l'air y était si parfait et fortifiant que les Samiens n'avaient pas besoin de manger. Dans les vallons et sur les plages, cultures et jardins, fruits et tabac; sur les coteaux et le bas des monts, oliviers, caroubiers et vignes. Le pourtour de l'île forme un vaste vignoble ; elle produit un vin muscat très réputé. Fait curieux, Pline nous dit que de son temps le vin de Samos était inférieur à celui des contrées voisines.

Géographie générale

Samos fait partie du groupe d'îles situées le long des côtes d'Asie Mineure et appelées Sporades orientales. Le sommet du mont Kerkis (ou Kerki), point culminant de l'île dans la partie occidentale , s'étend par 37° 43' de latitude Nord et 26° 37' de longitude Est. Samos ferme au sud le golfe de Kusadasi (anc. golfe de Scala-Nova). A l'Est le détroit, nommé petit Boghaz, large de moins de deux kilomètres, le sépare de l'Anatolie; à l'ouest le grand Boghaz (détroit de Mycale), large de six kilomètres et demi, s'étend entre elle et les îles Fournoi (ou Fourni). La distance jusqu'à Nicaria (Ikaria) est de presque vingt kilomètres, de soixante-cinq jusqu'à Chios, et de trente-six jusqu'à Patmos.

Autour de l'île principale s'élèvent quelques îlots et quelques rochers de sa dépendance; ce sont : dans le petit Boghaz les îles Narthex ou Narthécis, autrefois refuges des pirates, qui pendant une longue partie de l'histoire ont rendu ce détroit redoutable aux navigateurs; Samopoula, à l'extrémité de la pointe la plus méridionale de l'île (cap Colonni); plus au nord, vers Kusadasi, Kasonísi puis, tout au Nord, les îles de Boue (Prassonissio, Agios Nikolaos, Strogilo, Makronisso). 

Le nom de Samos, sous lequel l'île s'est illustrée, et qui la désigne encore aujourd'hui, n'est pas le seul qu'elle ait porté autrefois. Dans l'Antiquité la plus reculée, elle avait dû à l'aspect boisé de ses montagnes, aux fleurs de ses plaines ou même à la tradition religieuse, d'autres dénominations; c'était Dryusa et quelquefois Cyparissia, Melamphyllos, Anthémis et Stéphane, et aussi Parthenia, parce, selon la mythologie, que les agnus castus embaumés de l'imbrasus, son fleuve principal, avaient vu les premiers pas et les jeux enfantins de la déesse Héra. 

A une époque que l'on ne peut déterminer, l'île prit le nom de Samos, soit d'un de ses héros, soit, selon un mythe, de la belle Samia, fille du fleuve Méandre, soit plus tôt d'un vieux mot grec ou phénicien qui signifie élevé, et qui servait aussi à désigner deux autres îles très escarpées et une ville de l'Elide, construite au sommet d'un rocher. 

L'aspect extérieur des rivages de Samos justifie cette supposition. 

« En mer, dit Chateaubriand (Itinéraire de Paris à Jérusalem, 2e partie), nous voyons des îles et des terres autour de nous, les unes rondes et élevées comme Samos, les autres longues et basses comme les caps du golfe d'Éphèse. » 
La côte occidentale est la plus abrupte; 
« une montagne nue et affreuse s'y présente au voyageur; on l'appelle Catabacte, ou la montagne des précipices et des orages. » (Michaud et Poujolat, Correspondance d'Orient, t. III).
Cette île élevée et montagneuse de Samos a de nombreux caps : au pied du Catabacte ou Kerki, s'allonge le promontoire de Samos ou Saint-Dominique; du rivage nord se détachent les pointes Saint-Nicolas, des Vourliotes, Ambelaki, le cap Tio, et à l'extrémité Nord-Est, au-dessus des îles Prasonisi, le cap Praso; au Sud-Est, vers l'île Narthécis , le cap Posidium, où s'élevait jadis un temple de Poséidon; à l'extrémité méridionale le cap Blanc ou Colonni appelé autrefois Ampélos; enfin, vers le grand Boghaz, le cap Fourni, vis-à-vis les îles du même nom. 
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Carte muette de Samos (Relief).
Carte muette de Samos (relief).

Le Kerki commence à l'Ouest une chaîne de montagnes, qui se prolonge dans toute la largeur de l'île et jusqu'au cap Blanc dans la partie méridionale; elle était autrefois appelée l'Ampélos. Outre le Kerki, les points culminants portent les noms d'Ambelos (Karvounis) au centre de l'île (1153 m), et de Tio à l'Est. Quatre cours d'eaux et deux sources découlent de ces hauteurs; ce sont  l'Amphylissus, l'Ibettes, le Chésius et l'Imbrasus, primitivement appelé Parthénius pour le même motif qui avait fait donner ce nom à l'île entière; les fontaines Gigartho et Leucothoé sont également mentionnées par Pline; ce sont peut-être leurs eaux fraîches et limpides qui forment aujourd'hui le ruisseau de Mytilène.

Autrefois, si nous en croyons les anciens auteurs, nul ciel n'était plus clément que celui de Samos, nul air n'était plus pur que celui qu'on respirait parmi ses jardins de grenadiers et de citronniers, qui fleurissaient deux fois l'an. Selon les voyageurs modernes il n'en serait plus de même : un vent impétueux du Nord, qui n'est interrompu que par le calme de la nuit, règne pendant tout l'été. C'est la terrible tramontane; ses effets sont désastrueux : ce vent fait sentir les froids les plus vifs au milieu de la canicule, et « obscurcit tellement l'horizon qu'à peine peut-on voir a quelques centaines de pas (Athénée, XIV,635). » A son souffle, tout se dessèche : les prairies, qui au printemps s'étaient couvertes de mille fleurs, se flétrissent et sont frappées de stérilité ; les arbres et les arbrisseaux du côté où vient l'ouragan languissent dépouillés de feuilles, et leurs tiges s'inclinent vers le Sud; à cette époque beaucoup de gens souffrent de douleurs de tête aiguës. En hiver il gèle peu, mais les pluies de février et de mars entretiennent l'humidité. Puis c'est le tour du sirocco, vent violent du Sud, qui ébranle et quelquefois même renverse les maisons. Alors la mer semble en feu; il tonne d'une manière effroyable; les ruisseaux se gonflent, et tombent comme un déluge du haut des montagnes, qui six mois plus tôt semblaient calcinées. Ces eaux, dont aucun travail n'a depuis des siècles facilité l'écoulement vers la mer, se sont accumulées dans une grande plaine à l'est de la ville capitale, Samos / Vathi, et y ont formé un vaste marais.

On voit combien les récits actuels diffèrent des assertions des Anciens. Ce n'est pas que ceux-ci nous aient exagéré les mérites d'une île illustre, ou que son climat se soit réellement modifié : le changement est venu de l'incurie des habitants. Ils ont laissé se dégarnir les bois touffus qui protégeaient leurs montagnes contre les vents étésiens, et ils ont permis aux eaux du ciel de changer en un marais insalubre la plaine la plus fertile de l'île.

Les productions du sol ont été appréciées diversement dans l'Antiquité. Selon Diodore, sa fertilité lui avait mérité le nom d'île des Bienheureux. Le poète Ménandre lui avait appliqué ce proverbe grec : les oiseaux même y donnent du lait; Aethlius, cité par Athénée, assure que ses figuiers, ses vignes, ses rosiers se couvraient deux fois l'an de fleurs et de fruits. Mais Strabon lui refuse d'avoir jamais produit du bon vin, quoi qu'on puisse, inférer du nom du mont Ampélos. L. de Sinner, l'éditeur du livre de Buondelmonti (Liber Insularum Archipelagi) a pensé que l'Ampélos ne s'était ainsi appelé que par antiphrase; et voici comment, à l'époque de Trajan, Apulée s'exprimait au sujet de Samos :

« C'est une petite île de la mer d'Icare, dont le sol, peu fertile en blé, rebelle à la charrue, ne produit ni vignes ni légumes; la culture consiste tout entière dans la taille et la plantation des oliviers, dont le produit est plus fructueux que toutes les autres récoltes (Florides, XV). » 
Il en est à peu près de même aujourd'hui de Samos; elle n'a plus cette fécondité qu'exagérait autrefois Aethlius; elle a perdu quelques-unes de ses richesses naturelles, et peut-être n'y retrouve-t-on plus ce fameux laurier aux feuilles noires dont parle Méléagre, dans le petit poème qu'il envoie à un ami sous le titre de la Couronne; mais elle donne du maïs et du blé, auquel on mêle de l'orge et du millet; avec les olives on y trouve des orangers, des citronniers, des figuiers dont le fruit est d'une grosseur remarquable, et ces grenadiers qui, semblables à ceux de l'Égypte, avaient au dire de Pline des fruits rouges et blancs. La vigne constitue maintenant un des meilleurs rapports de l'île les Samiens vendent leurs raisins secs, et font des vins muscats très estimés. Si à ces productionson ajoute les melons et d excellentes pastèques, des concombres, des chataigniers, si nombreux qu'un village en a pris le nom de Castany, des pins qui produiraient une térébenthine très estimée, des mûriers, des cotonniers, des chênes, de superbes platanes, toutes sortes de fleurs, de la cire, le miel le plus délicat et quelques plantes médicinales, telles que le julep et la scammonée, on verra que l'agriculture peut s'appuyer sur quelques potentialités.

Outre ces productions , il faut mentionner des richesses d'un autre genre : à une époque où le mélinum, avec lequel les Anciens faisaient la couleur blanche, jouait dans la peinture un rôle important, celui de Samos, sans être très estimé, parce qu'il était trop gras, était assez abondant. Il y avait, selon Pline, deux sortes de terre de Samos, l'une appelée collyre, l'autre aster, qui entraient dans la composition de remèdes ophthaliniques, et servaient surtout à la fabrication d'une espèce de poterie fort estimée chez les Anciens. 

On trouve encore à Samos quelques mines d'ocre et de fer, l'émeri, la pierre d'aimant et un beau marbre blanc.

Les animaux de l'île sont des chevaux et des mulets, qui, sans être beaux, sont bons marcheurs; les montagnes cachent quelques sangliers, des chèvres sauvages, des biches et beaucoup de lièvres. Le plus célèbre des oiseaux de Samos est le paon, que les anciens Samiens avaient jugé digne d'être consacré à la première des déesses, comme le plus beau de tous les oiseaux, et que le poète Antiphon disait originaire de Samos. Les perdrix s'y rencontrent en quantité prodigieuse; des francolins s'y sont cantonnés entre le marais de Chora et la mer; les pigeons sauvages, les tourterelles , les bécasses, les bécassines, les grives y abondent, sans parler de l'hirondelle blanche, grosse comme une perdrix, qui se voyait autrefois à Samos, au rapport du géographe Mélétius. Les rivières, ainsi qu'un petit étang au sommet du Kerki , sont peuplées d'une sorte d'anguilles, précieuse ressource pendant la saison de pêche. Parfois aussi on rencontre quelques bêtes venimeuses; et Tournefort parle de la crainte où sont les voyageurs en levant les pierres des ruines de mettre la main sur un scorpion ou sur un serpent. (L. Lacroix).

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