| L'étymologie du mot crypte (kryptein = cacher) indique assez sa signification. Les premières cryptes ou grottes sacrées furent creusées dans le roc ou maçonnées dans le sol pour dérober aux yeux des profanes les tombeaux des martyrs; on rencontre dans les Catacombes plusieurs de ces hypogées qui servaient aussi aux réunions des fidèles et à la célébration des mystères. Plus tard, lorsqu'on éleva des basiliques au-dessus des tombeaux des martyrs, on continua de placer les corps saints dans des chapelles souterraines. Tantôt, au-dessous de l'autel, on enferma le tombeau du martyr dans un édicule, auquel on descendait par des degrés, et qui s'appelait la confession; plusieurs églises d'Italie, entre autres Saint-Georges au Vélabre, Saint-Clément, Sainte-Praxède, Saint-Laurent à Rome conservent aujourd'hui encore cette ancienne disposition; tantôt la confession ne fut qu'un simple réduit clos sur le devant par une fenêtre grillée; tantôt au contraire, on établit dans la basilique de véritables chapelles souterraines, hautes de 3 à 4 m, recevant le jour par des fenêtres ouvertes sur le dehors de l'église ou sur les bas-côtés du sanctuaire, parfois ornées de peintures, de colonnes de marbre, de chapiteaux historiés, généralement pourvues de deux escaliers pour permettre à la foule des pèlerins de défiler processionnellement devant les saintes reliques et dans lesquelles, autour du réduit même qui abritait le tombeau (martyrium), de vastes déambulatoires, des autels, des chapelles couvraient un espace assez étendu. C'est à ces constructions plus considérables qu'on réserve en général le nom de cryptes. Dès l'époque mérovingienne, on rencontre des cryptes sous les basiliques de la Gaule; celles de Saint-Jean de Lyon, de Saint-Laurent de Grenoble, de La Ferté-sous-Jouarre, datent du VIIe siècle. A partir de l'époque carolingienne, le nombre des églises pourvues de cryptes augmente : à ce temps appartient la crypte de Saint-Avit à Orléans, où le martyrium, placé sous l'autel principal, est précédé d'une chapelle voûtée, soutenue par quatre colonnes et ornée d'un autel. Mais c'est surtout dans la période romane que le nombre des cryptes se multiplie : presque toutes les églises en ont une. Souvent la crypte, placée sous le choeur, reproduit en tout ou en partie les dispositions de l'église supérieure : telle est la belle crypte de Saint-Eutrope de Saintes (XIIe siècle), une des plus vastes qui existent en France. Parfois, la crypte s'étend sous les bras du transept, quelquefois jusque sous la nef et les bas-côtés (crypte de Chartres, XIe siècle; crypte de Canterbury). Pourtant, la place essentielle de la crypte est sous l'abside; de manière qu'il n'est pas rare, en particulier dans les églises de l'Est et du Rhin, pourvues de deux absides, de rencontrer également deux cryptes (Besançon, Bamberg). - La crypte inondée de l'église San Zaccaria, à Venise. © Photo : Serge Jodra, 2012. Parmi les cryptes importantes qui subsistent de l'époque romane, on peut citer en France celles de Saint-Benoît-sur-Loire (XIe siècle), de Saint-Bénigne de Dijon (XIe siècle), de Saint-Etienne de Caen, de Saint-Denis, etc.; sur le Rhin, celles de Strasbourg et de Spire; en Italie, celle de la cathédrale d'Otrante, etc. Vers la fin du XIIe siècle, les corps saints jusque-là renfermés dans les cryptes furent placés dans des châsses et exposés dans l'église supérieure; aussi, au début de la période gothique, la crypte, si fort en usage à l'époque précédente, disparut presque entièrement. Les architectes gothiques ne construisirent plus de crypte que là ou les nécessités du terrain imposèrent ce parti. Tel est le cas à la cathédrale de Bourges, où l'on fit une crypte pour compenser la déclivité du sol et éviter de grands remblais ; de même au XVe siècle, on bâtit pour une semblable raison la crypte du Mont-Saint-Michel. (Ch. Diehl). | |