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Le site archéologique
de Tiwanaku (Tiahuanaco) est l'un des plus importants
de l'histoire précolombienne d'Amérique du Sud. Situé en Bolivie,
Ă environ 15 km au sud-est du lac Titicaca,
il témoigne d'une civilisation qui a prospéré bien avant les Incas.
Ce site, qui est aujourd'hui classé au patrimoine mondial de l'Unesco,
est réputé pour ses constructions mégalithiques, ses sculptures monumentales
et ses avancées technologiques.
La civilisation Tiwanaku
a émergé autour de 300 av. JC et a atteint son apogée entre 500 et 900
ap. JC. Elle Ă©tait l'une des civilisations les plus importantes de la
région andine, avec un rayonnement qui s'étendait jusqu'au Pérou,
au Chili
et au nord de l'Argentine.
Les
ruines de Tiwanaku ont été redécouvertes par des explorateurs européens
au XVIe siècle, mais des fouilles plus
approfondies ont commencé au XIXe et au
XXe siècles. Les archéologues et les
chercheurs ont révélé que le site de Tiwanaku n'était pas seulement
un centre religieux et culturel, mais aussi un centre politique et Ă©conomique.
En 2000, le site de
Tiwanaku a été inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco. Aujourd'hui,
Tiwanaku est également un lieu de pèlerinage pour les populations indigènes
de la région, qui viennent célébrer les solstices et honorer leurs ancêtres.
Le site de Tiwanaku
Les monuments.
Tiwanaku renferme
des constructions en pierre massive et des sculptures, qui témoignent
non seulement de compétences en ingénierie, mais aussi d'une attention
spéciale portée aux cycles naturels.
Le
Kalasasaya.
Le Kalasasaya, qui
signifie « pierre debout » ou « pierres verticales » en langue aymara,
une grande structure rectangulaire, probablement un lieu cérémoniel,
entourĂ©e d'un mur composĂ© de pierres massives, certaines mesurant jusqu'Ă
3 mètres de haut. Il comporte des escaliers monumentaux et une plateforme
surélevée. La grande cour rectangulaire d'environ 130 mètres de long
et 120 mètres de large à l'intérieur de l'enceinte du temple est entourée
de murs de pierre imposants, formés de blocs verticaux et horizontaux,
créant un effet de monumentalité. Les pierres taillées, qui peuvent
être de grande taille, sont disposées en une alternance régulière et
soigneuse, un agencement typique des constructions tiwanakotes. Le mur
d'enceinte orienté vers l'est pourrait pourrait signifier une importance
particulière accordée par le calendrier cérémoniel de Tiwanaku au lever
du soleil aux équinoxes et aux solstices. L'une des pièces maîtresses
du Kalasasaya est la célèbre Porte du Soleil, un monolithe sculpté,
orné de motifs complexes, incluant la figure du dieu central de Tiwanaku,
interprété comme une divinité céleste ou solaire. La Porte du Soleil
montre des motifs géométriques et des figures ailées, qui sont souvent
associées au panthéon religieux tiwanaku. On remarque aussi d'autres
monolithes ( Le Monolithe Ponce et le Monolithe Fraile), qui sont des sculptures
anthropomorphes imposante représentant des personnages énigmatiques et
ornés de motifs symboliques.
• La
Porte du Soleil est sculptée dans un seul et immense bloc de pierre
andésite. Elle mesure environ 2,8 mètres de hauteur, 3,8 mètres de largeur
et pèse près de 10 tonnes. Elle est décorée d'une série complexe de
motifs symboliques et constitue un chef-d'oeuvre de l'iconographie religieuse
de la civilisation Tiwanaku. Au centre supérieur de la Porte du Soleil
se trouve une figure anthropomorphe, parfois appelée le « dieu aux Bâtons
» et généralement interprétée comme le dieu central de Tiwanaku, que
certains spécialistes associent au dieu créateur Viracocha dans la cosmogonie
andine. Cette figure, couronnée d'une coiffe rayonnante avec des têtes
stylisées, tient dans chaque main un sceptre orné. Elle est entourée
de 48 figures ailées : 32 regardent vers elle, tandis que les 16 autres
lui tournent le dos. Ces figures ailées, au visage humain ou de félin,
sont interprétées comme des messagers ou des divinités secondaires.
La Porte du Soleil présente également une frise détaillée de motifs
géométriques, comprenant des symboles qui pourraient être des représentations
calendaires ou astrologiques. Certains chercheurs pensent que ces motifs
pourraient refléter le cycle solaire et lunaire, ce qui confirmerait l'importance
des cycles astronomiques chez les Tiwanaku. Bien que l'on ignore la fonction
exacte de la Porte du Soleil, elle est généralement perçue comme une
porte cérémonielle, peut-être destinée à marquer un passage rituel
ou symbolique. Située dans le secteur du Kalasasaya, elle aurait pu être
utilisée pour des rituels religieux ou des cérémonies en lien avec le
calendrier tiwanaku.
-
La
Porte du Soleil, Ă Tiwanaku.
• Les monolithes
du Tiwanaku (autres que la Porte du Soleil) sont des statues de pierre,
d'une grande précision, représentent des figures humaines avec des vêtements
et des accessoires sculptés en détail. Plusieurs monolithes existent
sur le site. Parmi eux, le Monolithe Ponce et le Monolithe Fraile, tous
deux situés dans l'enceinte du dans le Kalasasaya, sont particulièrement
célèbres. Ces statues montrent une maîtrise de la sculpture et une symbolique
religieuse complexe.
+ Le
Monolithe Ponce, nommé en l'honneur de l'archéologue bolivien Carlos
Ponce Sanginés, est une statue de près de 3 mètres de hauteur située
au centre de la cour du Kalasasaya. Sculpté dans un seul bloc de pierre
andésite, le Monolithe Ponce représente une figure humaine stylisée
avec une posture droite et solennelle. Il tient un sceptre ou bâton cérémoniel
dans chaque main, un détail fréquent dans l'iconographie Tiwanaku, qui
pourrait symboliser l'autorité ou une fonction sacerdotale. Il arbore
une coiffe richement décorée et une tunique ornée de motifs symétriques,
qui rappellent des thèmes sacrés de la culture Tiwanaku. La statue est
ornée de motifs géométriques gravés, comme des symboles qui pourraient
représenter des éléments célestes ou mythologiques. Ces détails vestimentaires
et symboliques indiquent probablement un rĂ´le important dans les rituels
religieux ou une association avec la royauté ou la divinité.
+ Le Monolithe
Fraile (ou Moine), plus petit que le Monolithe Ponce, est une
statue de 2 mètres environ. Il possède aussi une allure plus compacte
et sobre que celui-ci, mais comme lui, il tient des objets dans chaque
main, interprétables comme des attributs cérémoniels. La statue présente
un visage expressif et détaillé, avec une coiffe en bandeau et des traits
gravés évoquant le sérieux et la concentration. Le Monolithe Fraile
est également orné de motifs géométriques stylisés, mais de façon
moins dense et plus minimaliste que le Monolithe Ponce. Ce style plus austère
a amené les archéologues à penser qu'il pourrait représenter un prêtre
ou une figure religieuse, d'oĂą son nom.
Le
Monolithe Fraile, Ă Tiwanaku.
Le
Palais de Putuni.
Situé à proximité
du temple du Kalasasaya, le Palais de Putuni, aussi appelé « Palais des
cercueils » en raison des tombes découvertes à proximité, est une structure
rectangulaire qui aurait servi de résidence pour les élites de Tiwanaku.
Le palais est composé d'une série de chambres et de cours intérieures,
avec des murs en pierre soigneusement taillés et des fondations en blocs
de grès. Les murs sont percés de niches rectangulaires, qui auraient
pu être utilisées pour placer des statues ou des offrandes. Putuni semble
avoir été un lieu réservé aux membres de la haute société ou aux
prêtres, où des cérémonies privées ou des rituels sacrés auraient
eu lieu. Les tombes découvertes dans et autour du palais contenaient des
restes humains, ce qui suggère que le site servait également de mausolée
pour les personnages importants de Tiwanaku. La disposition des pièces
et l'accès limité aux espaces intérieurs renforcent l'idée qu'il s'agissait
d'un lieu exclusif, réservé aux rituels de la noblesse ou de la classe
sacerdotale. Ajoutons qu'autour du site, plusieurs tombes et nécropoles
ont aussi été découvertes, certaines contenant des restes momifiés
et des objets funéraires.
Le
Temple semi-souterrain.
Le Temple semi-souterrain
est l'une des structures les plus intrigantes de Tiwanaku, avec une cour
creusée dans le sol, mesurant environ 26 mètres de côté. Ce temple
a la forme d'un patio rectangulaire et est en partie enterré, ce qui lui
donne un aspect distinctif par rapport aux autres bâtiments du site. Les
murs de ce temple sont construits en pierre et ornés de plus d'une centaine
de têtes sculptées, intégrées dans les murs. Ces visages sont très
variés et montrent différents styles et expressions, représentant peut-être
des ancêtres, des dieux ou des personnages d'origines diverses. L'intérieur
du temple abrite Ă©galement le Monolithe Bennett (ou Pachamama), une statue
massive d'environ 7 mètres de haut, qui représente une figure anthropomorphe
ornĂ©e de motifs complexes. Bien que ce monolithe ait Ă©tĂ© dĂ©placĂ© Ă
d'autres emplacements au fil du temps, il est aujourd'hui reconnu comme
l'un des objets symboliques associés au temple semi-souterrain. La fonction
de ce temple n'est pas connue, mais il pourrait avoir été un lieu destiné
Ă des rituels en l'honneur des ancĂŞtres. L'aspect semi-souterrain pourrait
ainsi symboliser le lien entre le monde terrestre et le monde souterrain,
ou Ukhu Pacha, dans la cosmologie andine. Les têtes sculptées pourraient
représenter une sorte de panthéon ou un hommage aux ancêtres.
Le
Pumapunku.
Le Pumapunku, ou
« Porte du Puma », est un complexe cérémoniel qui se signale par ses
blocs de pierre parfaitement taillés (certains atteignant plus de 100
tonnes), et par l'utilisation de formes géométriques complexes, notamment
en forme de « H », qui s'imbriquent parfaitement. Ces blocs sont souvent
en andésite et en grès rouge, et montrent des techniques de polissage
et d'assemblage d'une remarquable précision, sans mortier apparent et
l'on suppose que les Tiwanaku utilisaient des outils en cuivre ou en bronze.
On a dû aussi recourir à des techniques de levage et de transport sophistiquées
pour déplacer ces énormes blocs. La fonction exacte de Pumapunku reste
incertaine, mais il s'agit vraisemblablement d'une plate-forme cérémonielle
ou d'un temple. La structure présente des terrasses superposées, avec
des marches et des dalles sculptées. Certains chercheurs pensent que la
disposition de Pumapunku est orientée en fonction de cycles astronomiques
associés aux cycles agricoles.
La
Pyramide d'Akapana.
La pyramide d'Akapana
est une structure en terrasse, à sept niveaux, qui mesure environ 18 mètres
de hauteur et couvre une superficie de près de 200 mètres de côté.
Elle est construite en terre et renforcée par des murs de pierre. Chaque
terrasse est reliée par des escaliers et des passages en pierre. L'Akapana
est interprétée comme une montagne symbolique, représentant peut-être
un lieu de communication avec les dieux ou les ancĂŞtres. Au sommet de
la pyramide se trouve un bassin, qui aurait pu être utilisé pour recueillir
l'eau de pluie et représenter une sorte de lac sacré. Cette eau pouvait
descendre le long des canaux de drainage soigneusement construits, symbolisant
le cycle de l'eau, essentiel à la fertilité et aux pratiques agricoles
de la région. Certains archéologues croient que la pyramide d'Akapana
était un site pour des cérémonies incluant des sacrifices ou des offrandes,
pour assurer la prospérité et la fertilité des terres. Comme Pumapunku,
la pyramide d'Akapana montre des caractéristiques d'alignement astronomique,
ce qui pourrait renforcer l'hypothèse de son implication, comme dans le
cas du Pumapunki, dans des rituels agricoles, en lien avec le cycle des
saisons.
L'art mobilier.
De nombreux objets
et artefacts découverts à Tiwanaku révèlent la richesse culturelle
de cette ancienne civilisation andine. Ils révèlent aussi la grande maîtrise
des arts et de l'artisanat de cette civilisation. Chaque objet montre comment
les Tiwanaku exprimaient leur vision du monde.
CĂ©ramiques.
Les céramiques
de Tiwanaku sont particulièrement variées et présentent divers
motifs symboliques. On trouve des vases, des bols, des récipients et des
statues en terre cuite, souvent ornés de représentations animales comme
des pumas, des condors et des poissons, ainsi que de figures humaines.
Ces motifs symbolisent les trois mondes andins : le monde supérieur (Hanq’a
Pacha), le monde terrestre (Kay Pacha) et le monde souterrain (Ukhu Pacha).
Les céramiques aux formes zoomorphes et anthropomorphes montrent une palette
de couleurs vives avec des rouges, des bruns, des oranges et des noirs.
Elles étaient probablement utilisées lors de rituels religieux.
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Un
vase keru, tipyque de l'art céramique de Tiwanaku.
Objets
en métal.
Les objets métalliques
découverts à Tiwanaku témoignent de la maîtrise de la métallurgie
chez les Tiwanaku, qui travaillaient des métaux précieux comme l'or,
l'argent et le cuivre pour produire des bijoux, des masques et des objets
rituels. Les masques métalliques, couramment associés à des sépultures
de personnages importants, étaient décorés de motifs incisés et de
représentations de visages stylisés, symbolisant peut-être des ancêtres
ou des divinités protectrices. Parmi les autres objets métalliques, on
trouve des pinces, des aiguilles, des haches cérémonielles et des pendentifs.
Bijoux
et ornements.
Des colliers, des
bracelets et des boucles d'oreilles ont été découverts. Ils sont souvent
en or ou en argent et décorés de motifs géométriques et de figures
mythologiques. Les motifs représentaient des animaux sacrés, comme le
puma ou le condor, qui symbolisent respectivement la force et la vision.
Ces bijoux n'Ă©taient pas seulement des ornements, mais aussi des symboles
de statut social et d'identité culturelle, et étaient probablement
portés par les membres de l'élite ou les figures religieuses.
Textiles
et vĂŞtements.
Bien que peu de
textiles aient survécu, ceux découverts sont des exemples impressionnants
de l'art textile andin, avec des motifs géométriques et des figures stylisées.
Les textiles, fréquemment réalisés en laine d'alpaga ou de lama, étaient
teints avec des colorants naturels et portaient des motifs symboliques
(figures divines, animaux). Ils étaient utilisés à la fois dans
la vie quotidienne et dans les rituels.
Instruments
de musique.
Des flûtes et autres
instruments de musique, comme les ocarinas et les tambours, ont Ă©galement
été retrouvés à Tiwanaku. Ces instruments étaient utilisés, pense-t-on,
lors de rituels et de cérémonies pour invoquer des esprits ou accompagner
des danses religieuses. Les flûtes, souvent faites d'os ou de céramique,
montrent des motifs sculptés représentant des animaux ou divers symboles.
Objets
rituels et symboles religieux.
De nombreux artefacts
retrouvés à Tiwanaku ont une dimension rituelle claire. Par exemple,
des sceptres et des bâtons cérémoniels, généralement tenus par des
figures dans les sculptures, symbolisent l'autorité religieuse. Des petits
objets en forme de T ou de H en pierre, qui rappellent les motifs de Pumapunku,
pourraient ĂŞtre des symboles de pouvoir ou de protection. Des coquillages,
provenant de régions côtières lointaines, ont aussi été découverts,
et montrent que Tiwanaku entretenait des liens commerciaux et rituels avec
d'autres cultures andines.
Autres sites de la civilisation
de Tiwanaku
Bien que centrée autour
du site Ă©ponyme en Bolivie, la civilisation de Tiwanaku s'Ă©tendait largement
à travers l'Altiplano andin. Elle a laissé des traces de son influence
dans plusieurs autres sites Ă travers le territoire qui correspond aujourd'hui
à la Bolivie, au Pérou et au nord du Chili. Grâce à leur maîtrise
de l'agriculture et des technologies hydrauliques, les Tiwanaku ont pu
contrôler de vastes réseaux de colonies et de centres agricoles dans
l'Altiplano andin. La civilisation Tiwanaku a diffusé son iconographie,
ses pratiques religieuses et sa culture matérielle à travers les Andes,
et influencé profondément les sociétés locales.
-
Bolivie
• Lukurmata.
- Situé près de la ville de Tiahuanaco, Lukurmata est un site archéologique
ayant servi de centre religieux et agricole. Il comporte des terrasses
agricoles et des vestiges de constructions en pierre. On y trouve Ă©galement
des tombes et des monuments funéraires.
• Cerro Khonkho
Wankane. - Situé près de l'actuel village de Khonkho, au sud de Tiwanaku.
Le site comprend des plateformes, des structures semi-souterraines et des
sculptures. Khonkho Wankane semble avoir été un site cérémoniel important
et possĂ©dait des structures similaires Ă celles de Tiwanaku, mais Ă
une échelle plus réduite.
• La Isla del
Sol et la Isla de la Luna. - Dans le lac Titicaca, ces deux îles sont
riches en vestiges de la civilisation de Tiwanaku. La Isla del Sol est
considérée comme un lieu sacré pour la culture de Tiwanaku, probablement
lié à des mythes de création. La Isla de la Luna a également des ruines
attribuées à Tiwanaku. Ces îles servaient de lieux de culte et de pèlerinage.
• Le site de
Copacabana. - À l'extrémité sud du lac Titicaca. Bien que Copacabana
soit surtout connue pour ses associations avec l'empire inca, des fouilles
archéologiques ont révélé des traces de la civilisation de Tiwanaku,
montrant que cette zone Ă©tait Ă©galement sous son influence.
PĂ©rou
• Omo .
- Près de Moquegua, dans le sud du Pérou. Omo est l'un des principaux
sites Tiwanaku en dehors de la Bolivie. Il servait de colonie agricole,
avec des complexes résidentiels et des infrastructures pour l'irrigation.
Les fouilles y ont révélé des |
céramiques
et des textiles distinctifs de la culture Tiwanaku, démontrant l'influence
de cette civilisation sur le sud du PĂ©rou.
• Cerro Baúl.
- Dans la vallée de Moquegua, au sud du Pérou. Cerro Baúl est un site
fortifié construit au sommet d'une montagne. Il semble avoir été un
centre stratégique pour les Tiwanaku, où des cérémonies religieuses
étaient pratiquées. C'est également un lieu où la civilisation de Tiwanaku
a cohabité avec la culture Wari, témoignant d'interactions entre ces
deux grandes civilisations andines.
• Cojata.
- Dans la région de Puno, près du lac Titicaca, au Pérou. Cojata contient
des vestiges de terrasses agricoles et des constructions en pierre qui
montrent l'influence de Tiwanaku. Des structures funéraires et des objets
en céramique ont été découverts, soulignant la présence Tiwanaku dans
les populations locales.
• Pucara.
- Situé dans la région de Puno, à environ 100 km au nord de Tiwanaku.
Bien que Pucara ait précédé Tiwanaku, il montre des influences culturelles
réciproques avec cette dernière, notamment dans l'architecture et l'art.
La culture de Tiwanaku a été en partie influencée par le style artistique
et les rituels de Pucara, mais Tiwanaku a également laissé son empreinte
dans cette région.
Chili
• San Pedro
de Atacama. - Dans le désert d'Atacama, au nord du Chili. San Pedro
de Atacama a été influencé par la culture Tiwanaku, bien qu'il n'ait
pas été un centre urbain de cette civilisation. On y a retrouvé des
objets Tiwanaku dans les tombes, notamment de la céramique, des textiles
et des métaux, montrant une influence culturelle marquée dans cette région
éloignée. |
La civilisation de Tiwanaku
L'agriculture.
Les hauts plateaux
de l'actuelle Bolivie près du lac Titicaca, connaissent un climat rigoureux
et ont des sols souvent pauvres. Auusi, les Tiwanaku ont-ils dĂ» mettre
au point des techniques agricoles particulières pour assurer la production
de nourriture et maintenir une densité de population élevée. le
site de Tiwanaku est entouré de canaux et de terrasses agricoles sophistiqués.
Ces infrastructures servaient Ă la culture et Ă la gestion de l'eau,
permettant de nourrir une grande population. Ces innovations agricoles
témoignent de l'ingéniosité de la civilisation Tiwanaku en matière
de gestion de l'environnement.
Les
champs surélevés.
Les Tiwanaku ont
inventé un système de champs surélevés, appelés sukakollos
ou waru waru. Ces champs consistaient en de longues plates-bandes
surélevées entourées de canaux d'eau, permettant d'atteindre plusieurs
objectifs :
• Protection
contre le gel. - L'eau des canaux absorbait la chaleur pendant la journée
et la relâchait la nuit, créant ainsi un microclimat qui protégeait
les cultures des gels nocturnes fréquents à cette altitude.
• Irrigation
efficace. - Les canaux fournissaient une réserve d'eau utilisable
en cas de sécheresse et permettaient d'irriguer les champs en maintenant
une humidité constante dans le sol.
• Amélioration
des sols. - Les sédiments riches en nutriments déposés dans les
canaux lors de la vidange étaient ensuite utilisés pour fertiliser les
champs.
Gestion
de l'eau.
Compte tenu de la
faible disponibilité de terres fertiles et de la saison des pluies irrégulière,
la gestion de l'eau Ă©tait cruciale pour les Tiwanaku. En plus des sukakollos,
les Tiwanaku ont ainsi construit des canaux de drainage, des digues, et
des réservoirs pour capter et redistribuer l'eau. Cette maîtrise de l'irrigation
a permis de créer un système agricole intensif et stable.
Diversité
des cultures.
Les Tiwanaku ont
cultivé une large variété de plantes adaptées à l'altitude, comme
le maĂŻs, la pomme de terre, le quinoa et d'autres tubercules andins comme
l'oca et la maca. Le choix de ces cultures était adapté aux conditions
climatiques extrêmes de la région et à la résilience des plantes face
aux températures fluctuantes.
Techniques
de fertilisation.
En plus des sédiments
des canaux, les Tiwanaku utilisaient des engrais naturels pour fertiliser
leurs champs, comme le guano d'oiseaux de la côte, qu'ils obtenaient grâce
aux réseaux commerciaux qui reliaient la région du lac Titicaca à la
cĂ´te du Pacifique.
Système
agricole communautaire et redistribution.
L'agriculture Ă©tait
collective, intégrée à l'organisation sociale et politique. Les surplus
agricoles étaient centralisés et redistribués, permettant de soutenir
les populations urbaines, notamment la capitale Tiwanaku, et de résister
aux périodes de crises agricoles.
L'organisation
politique et sociale.
Organisation
politique de Tiwanaku.
Autant qu'on puisse
reconstituer de manière cohérente l'organisation de Tiwanaku, celle-ci
devait être celle d'État théocratique et centralisé, dirigé par une
élite qui détenait le pouvoir politique et religieux. Ce modèle semble
basé sur une idéologie qui intégrait des croyances religieuses, le pouvoir
symbolique et la capacité à mobiliser les ressources. Parmi les principales
caractéristiques de leur organisation on pourra relever :
• Une
autorité religieuse centralisée. - Le chef suprême de Tiwanaku était
Ă la fois un leader politique et religieux. Ce chef Ă©tait probablement
perçu comme un médiateur entre les dieux et le peuple, ce qui renforçait
son pouvoir. La ville de Tiwanaku, en elle-mĂŞme, peut se comprendre comme
un centre sacré et symbolique.
• Une organisation
théocratique. - Le pouvoir était fortement lié à la religion et
aux rituels. Comme on peut le constater dans d'autres sociétés
analogues, les dirigeants de Tiwanaku devaient être associés aux dieux
et posséder un statut divin. Ce lien avec le divin leur permettait de
légitimer leur autorité et de contrôler la population.
• Des expansions
territoriales par influence. - Plutôt que de conquérir militairement
d'autres régions, Tiwanaku semble avoir exercé une influence culturelle
et commerciale sur une vaste région des Andes. Ils ont étendu leur culture
Ă travers des Ă©changes commerciaux, des alliances politiques et une propagation
de leurs croyances religieuses.
• Une administration
décentralisée mais hiérarchisée. - Même si le pouvoir central restait
fort à Tiwanaku, il y avait probablement des dirigeants locaux ou régionaux
(appelés kurakas) qui contrôlaient des territoires plus éloignés,
mais qui étaient liés par allégeance au centre religieux.
Organisation
sociale de Tiwanaku
La société de
Tiwanaku paraît avoir été hautement hiérarchisée et divisée en classes
sociales distinctes :
• L'élite
religieuse et politique. - L'élite était composée des dirigeants
religieux, politiques, et peut-ĂŞtre des membres de familles nobles. Ils
vivaient probablement dans la ville de Tiwanaku, à proximité des centres
religieux et architecturaux les plus importants comme le Temple de Kalasasaya
et la Pyramide d'Akapana. Cette Ă©lite contrĂ´lait les ressources, les
terres, et le commerce, et jouissait d'un prestige spirituel et politique.
• Les artisans
spécialisés. - Tiwanaku était remarquable pour son artisanat, notamment
en poterie, métallurgie et architecture. Les artisans hautement qualifiés
devaient constituer une classe importante, car ils produisaient des objets
utilisés dans les rituels religieux et dans le commerce, contribuant au
prestige et Ă l'influence de Tiwanaku. Ils vivaient probablement dans
des quartiers spécifiques, souvent proches des ateliers.
• Les
agriculteurs et éleveurs. - La majorité de la population était composée
de paysans et d'Ă©leveurs. Ils vivaient dans les villages et pratiquaient
l'agriculture en utilisant un système sophistiqué de sukakollos (champs
surélevés entourés de canaux).
• Le peuple
en général et les populations intégrées. - La société de Tiwanaku
intégrait également des populations venues des régions contrôlées
ou influencées, qui apportaient leurs compétences et participaient aux
activités économiques et religieuses.
La religion.
On peut reconstituer
la religion des Tiwanaku à partir éléments matériels retrouvés sur
les sites archéologiques relevant de cette culture et en les interprétant
à la lumière de ce que l'on sait par ailleurs des religions andines.
Et cela d'autant mieux, que l'art religieux de Tiwanaku, avec ses représentations
du dieu aux Bâtons, des animaux sacrés et des motifs géométriques,
n'est pas resté isolé. Il s'est diffusé dans les Andes centrales par
le biais des échanges commerciaux et des alliances politiques. Ces éléments
sont retrouvés dans des cultures voisines, comme celle de San Pedro de
Atacama au nord du Chili et la culture Wari au Pérou. Après la chute
de Tiwanaku, ses traditions religieuses ont ainsi pu perdurer et influencer
les pratiques religieuses des cultures andines postérieures, dont celles
des Aymaras et des Incas. Autant qu'on puisse en juger, de nombreux éléments
de la cosmologie Tiwanaku se retrouvent dans le panthéon inca, avec une
emphase sur le culte de Viracocha et Pachamama.
Le
dieu aux Bâtons.
La figure centrale
de la religion de Tiwanaku semble être celle qu'on a appelée sous
le nom de dieu aux Bâtons, et que l'on identifie à Viracocha (dieu créateur
andin). Cette divinité est généralement représentée, comme sur la
Porte de Soleil, sous la forme d'un personnage portant un sceptre ou des
bâtons dans chaque main, entouré de rayons solaires ou de symboles célestes,
ce qui symbolise son pouvoir créateur et sa connexion avec le ciel et
la terre.
-
Le
dieu aux Bâtons (détail de la Porte du Soleil, à Tiwanaku).
Cosmologie
et triade divine.
La religion de Tiwanaku
intégrait une triade cosmique composée du monde supérieur (céleste),
du monde terrestre, et du monde souterrain. Ces trois niveaux Ă©taient
représentés par des divinités associées au ciel, aux montagnes, et
aux eaux du lac Titicaca. Plusieurs animaux, tels que le puma, le condor
et le serpent, incarnaient cette triade cosmique. Le puma symbolisait la
force terrestre, le condor représentait le ciel et le serpent était associé
au monde souterrain. Ces animaux apparaissent fréquemment dans l'art religieux
et les sculptures de Tiwanaku.
Le
culte de la nature et des éléments.
Les Tiwanaku considéraient
le lac Titicaca comme un lieu d'origine divine, d'oĂą Ă©mergeraient les
divinités créatrices. Ils y effectuaient des pèlerinages et des rituels
pour honorer les esprits des eaux et des montagnes environnantes. Ils avaient
par ailleurs un calendrier religieux étroitement lié aux cycles agricoles.
Ils réalisaient des rituels de fertilité pour honorer la déesse de la
Terre (nommée Pachamama, dans les cultures andines), et pour assurer de
bonnes récoltes. Ces cérémonies incluaient des offrandes de nourriture,
d'animaux, et parfois mĂŞme des sacrifices humains, bien que ces derniers
aient Ă©t relativement rares.
Pratiques
rituelles et sacrifices.
La religion Tiwanaku
comprenait des sacrifices d'animaux (comme les lamas) et des offrandes
de nourriture, de boissons, et d'objets précieux comme l'or et les textiles.
Ces pratiques devaient viser à apaiser les divinités et à demander leur
protection ou leur bénédiction pour les récoltes et la prospérité
de la population.
Les grandes places
de Tiwanaku, comme la Kalasasaya, servaient de lieu de rassemblement pour
les cérémonies religieuses. Les prêtres utilisaient des objets rituels,
des effigies en pierre, et des récipients en céramique lors de ces cérémonies,
qui pouvaient inclure la consommation d'alcool (comme la chicha, boisson
Ă base de maĂŻs) dans un cadre rituel.
La civilisation
de Tiwanaku et le monde extérieur.
La civilisation
de Tiwanaku (ou Tiahuanaco) entretenait des relations variées avec d'autres
cultures et civilisations des Andes, qui allaient de la coopération commerciale
et des Ă©changes culturels Ă l'influence militaire et politique. Elle
a ainsi exercé une influence considérable dans toute la région andine,
non seulement par des Ă©changes commerciaux et culturels, mais aussi par
des réseaux d'alliance et une diffusion symbolique qui ont modelé la
culture régionale bien au-delà de sa chute.
Commerce
et Ă©changes culturels.
Les Tiwanaku entretenaient
des routes commerciales Ă©tendues, qui traversaient les Andes jusqu'aux
vallées côtières du Pérou et au nord du Chili. Grâce à ces routes,
ils importaient des biens rares, comme le guano (utilisé comme fertilisant),
le maïs, le poisson séché, des coquillages de la côte Pacifique et
des objets en métaux précieux.
Par le biais du commerce,
les Tiwanaku diffusaient leur style artistique, leurs céramiques, et leur
architecture. Leur iconographie, symbolique et religieuse s'est retrouvée
dans des régions lointaines, comme les hauts plateaux péruviens et les
zones côtières du sud.
Expansion
territoriale et influence politique.
Les Tiwanaku ont
aussi exercé une influence politique et parfois militaire pour étendre
leur contrôle sur des territoires stratégiques. Ils ont établi des colonies
agricoles et des centres administratifs dans plusieurs régions, notamment
dans les vallées de Cochabamba, Moquegua (sud du Pérou actuel) et la
région d'Arequipa. Ces colonies permettaient un contrôle direct des routes
commerciales et des ressources agricoles. PlutĂ´t que d'adopter un
modèle d'empire centralisé et militaire, les Tiwanaku semblent avoir
favorisé des alliances et des accords avec les élites locales. Cela leur
permettait de maintenir une influence sur les régions voisines tout en
respectant une certaine autonomie locale.
Relations
avec les cultures côtières et de l'Altiplano.
La civilisation
Wari (ou Huari), située dans la région d'Ayacucho
(Pérou actuel), était contemporaine de Tiwanaku et partageait des similarités
architecturales et culturelles. Les deux civilisations ont pu entretenir
des relations commerciales et culturelles, bien que les preuves d'interactions
directes restent débattues. Cependant, l'influence mutuelle est visible,
avec des styles artistiques et des méthodes agricoles similaires. Certaines
recherches suggèrent même que les Wari et Tiwanaku pourraient avoir eu
des relations compétitives pour l'influence régionale. Les Tiwanaku exerçaient
Ă©galement une forte influence dans le nord du Chili, oĂą des populations
locales comme les San Pedro de Atacama adoptaient leurs pratiques religieuses
et artistiques. On y retrouve des objets et des influences stylistiques
Tiwanaku dans les sépultures, indiquant une interaction culturelle profonde.
Influence
religieuse et symbolique.
La religion
des Tiwanaku, centrée autour du culte de divinités liées à la nature
(comme le dieu aux Bâtons, un dieu céleste représenté tenant des sceptres),
s'est diffusée largement dans les Andes, au-delà de leurs frontières
directes. Leur iconographie religieuse apparaît sur des céramiques et
dans des sanctuaires d'autres cultures.
Tiwanaku elle-mĂŞme
est supposée avoir été un site de pèlerinage pour des populations de
la région. Des visiteurs venaient des régions lointaines pour adorer
les divinités, ce qui renforce l'idée de Tiwanaku comme centre religieux
et culturel pour les Andes centrales.
DĂ©clin de la
civilisation Tiwanaku.
La civilisation
Tiwanaku a décliné aux alentours de 1000 ap. JC, pour des raisons qui
ne sont pas totalement claires, bien que plusieurs facteurs aient pu contribuer
à sa chute. Des preuves archéologiques indiquent qu'une sécheresse prolongée
aurait gravement affecté les ressources en eau de la région, perturbant
l'agriculture et provoquant une famine. La sécheresse aurait exacerbé
les tensions sociales et politiques au sein de la sociĂ©tĂ©, menant Ă
sa fragmentation et à la désintégration du pouvoir central. Il est possible
aussi que des conflits avec des groupes voisins aient contribué au déclin
de la civilisation Tiwanaku.
Après sa chute,
l'influence de la civilisation de Tiwanaku a persisté chez les Aymaras
des Andes et dans les pratiques agricoles, religieuses et artistiques des
cultures qui ont suivi. Bien que Tiwanaku ait disparu avant l'avènement
de l'Empire inca, les Incas ont été influencés par cette civilisation.
Ils ont intégré certains éléments de la culture tiwanaku, comme des
symboles et des pratiques religieuses mais aussi certains aspects administratifs. |
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