| [Ponce] de Leon (Fray Luis), poète et mystique, né à Belmonte (Manche), suivant d'autres, à Grenade ou à Madrid, en 1527 ou 1528, mort à Madrigal, le 23 août 1591. Il fit ses études à l'université de Salamanque, entra dans l'ordre de Saint-Augustin, à l'âge de seize ans, fut reçu docteur en théologie, en 1560, et obtint la chaire dite de Saint-Thomas-d'Aquin (1564), puis celle de littérature sacrée. Ayant traduit en langue castillane le Cantique des Cantiques, qu'il considérait comme une simple idylle pastorale, une copie du manuscrit fut remise au Saint-Office et l'auteur arrêté sur l'ordre de l'Inquisition. Enfermé dans les cachots de Valladolid, il subit d'innombrables interrogatoires et n'obtint la liberté qu'au bout de cinq années. Le 30 décembre 1576, il reprit son cours et, sans faire la moindre allusion à cette longue captivité, sa première conférence commença par ces mots : « Comme nous le disions hier... » C'est dans les cachots de Valladolid que Luis de Leon entreprit son chef-d'oeuvre : De los Nombres de Cristo (Salamanque, 1583-85), dialogue où il énumère et étudie successivement tous les noms donnés au Christ expliquant et développant leur sens mystique en une prose admirable dans laquelle il introduit habilement des traductions en vers de plusieurs psaumes. Ce dialogue, resté inachevé, s'arrête à la fin du troisième livre. On possède un fragment sur l'Agneau divin. Luis de Leon écrivit un commentaire latin sur le Cantique des Cantiques, la Perfecta Casada, traité sur les devoirs de l'épouse accomplie (Salamanque, 1583) et l'Exposicion de Job, avec traduction du livre biblique. Cette oeuvre ne fut imprimée qu'après sa mort, en 1631. Les poésies, peu nombreuses, sont aussi remarquables par le sentiment religieux que par la forme achevée. Outre des traductions partielles de Virgile, d'Horace, des Psaumes, Luis de Leon fit la Prophétie du Tage (le dieu du fleuve se dresse devant le roi Roderik et lui prédit la conquête de l'Espagne par les Arabes); l'Ode à Saint-Jacques, déparée par des réminiscences païennes (les Néréïdes, le corps hors des flots, contemplent le navire qui transporte le corps de l'Apôtre martyr); l'Ode à tous les saints, à l'Ascension, au Christ crucifié, la Nuit sereine, l'Assomption de la Vierge, etc.; l'épitaphe de l'infant don Carlos, fils de Philippe II, obscure par la pensée, lapidaire par le style. Les poésies de Luis de Leon ne furent publiées que quarante ans après sa mort, grâce aux soins du poète Francisco de Quevedo. Quand Luis de Leon mourut, il venait d'être nommé provincial de l'ordre de Saint-Augustin. Las Obras de Fray Luis de Leon parurent à Madrid (1804-16, 6 vol.). Le traité De les Nombres de Cristo a été réimprimé à Barcelone (1885). Le Parnaso de Quintana contient un choix des poésies du grand mystique espagnol. (Lucien Dollfus). |