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Julia Kristeva

Julia Kristeva est une philologue, écrivaine et psychanalyste née le 24 juin 1941 à Sliven (Bulgarie). Son travail, qui a intégré la psychanalyse, la philosophie, la littérature et la théorie féministe, fait d'elle une voix incontournable dans les débats académiques et culturels. 

De 1960 à 1965, Kristeva étudie la philologie à l'université de Sofia, où elle s'intéresse particulièrement à la linguistique, à la littérature et à la sémiotique. Pendant cette période, elle commence également à écrire des articles et des critiques littéraires. En 1965, elle émigre en France grâce à une bourse d'études pour poursuivre ses études doctorales. Elle s'installe à Paris, où elle étudie à l'École pratique des hautes études (EPHE) et travaille sous la direction de Roland Barthes.

Elle rejoint en 1967 le groupe de Tel Quel, une revue littéraire et théorique influente dirigée par Philippe Sollers, qu'elle épousera plus tard. Tel Quel devient un centre de discussions avant-gardistes sur la littérature, la théorie critique, et le marxisme. Deux ans plus tard, Kristeva soutient sa thèse de doctorat intitulée La Textualité du roman à l'université de Paris. Elle publie également son premier livre, Semeiotikè : recherches pour une sémanalyse (1969), où elle analyse les relations entre la linguistique, la psychanalyse, et la sémiotique.

En 1970, Julia Kristeva publie Le Texte du roman, où elle développe des concepts comme l'intertextualité et la genèse du texte, puis, en 1974, La Révolution du langage poétique, une oeuvre majeure qui intégre la psychanalyse 'lacanienne et la théorie féministe. Ce livre est basé sur sa thèse de doctorat en linguistique.

• La Révolution du langage poétique,(1974) est une analyse de la relation entre langage, poésie et subjectivité. Kristeva propose une approche interdisciplinaire, mêlant psychanalyse, linguistique, et critique littéraire. Elle introduit les concepts de sémiotique et de symbolique pour analyser la structure du langage. Le sémiotique est lié à l'aspect pré-verbal et pré-oedipien de l'expression humaine, associé au corps, aux rythmes et aux pulsions. Le symbolique, en revanche, est l'ordre de la loi, de la syntaxe, et du langage structuré, conforme aux règles sociales. Elle examine comment certains poètes, tels que Mallarmé, Lautréamont et Artaud, subvertissent le langage symbolique pour accéder à une forme de communication plus primordiale et disruptive. Elle argue que cette subversion peut mener à une transformation de la subjectivité et du rapport au monde. Dans cet ouvrage, Kristeva propose que la poésie a le pouvoir de transformer la langue et, par extension, la culture et la société. En brisant les structures établies du langage symbolique, les poètes révèlent les dimensions inconscientes et corporelles de l'expression humaine. La distinction entre le sémiotique et le symbolique a un impact profond sur la compréhension du développement psychique et linguistique. Le sémiotique, souvent réprimé dans le langage quotidien, trouve son expression dans les arts, permettant une catharsis et une réintégration des aspects fragmentés du moi. Julia Kristeva considère la poésie comme une forme révolutionnaire, capable de résister à l'homogénéisation culturelle et d'ouvrir des espaces de liberté subjective. Cela a des implications pour la critique littéraire, la psychanalyse et la théorie féministe, en proposant une manière de repenser la création et la réception des textes.
Kristeva obtient un doctorat en littérature en 1977 à l'université de Paris VII (Paris Diderot). Elle commence également à y enseigner à l'université, devenant une influence académique significative. En 1979, elle publie Polylogue, une collection d'essais qui aborde des thèmes variés tels que la linguistique, la psychanalyse, la philosophie et la théorie féministe.

Dans Pouvoirs de l'horreur : essai sur l'abjection (1980), une autre de ses oeuvres importantes, Julia Kristeva examine la notion d'abjection, reliant la psychanalyse à la littérature et à la culture.

• Pouvoirs de l'horreur : essai sur l'abjection (1980) est une étude approfondie du concept d'abjection, une notion clé dans la théorie psychanalytique de Kristeva. L'abjection se réfère à ce qui est rejeté par le moi mais qui le hante constamment. Elle montre comment l'abjection fonctionne à travers diverses cultures et religions, en particulier dans les tabous entourant la mort, le corps, et les fluides corporels. Elle utilise des exemples littéraires et culturels pour illustrer comment l'abjection est constamment négociée dans les structures sociales et psychiques. L'abjection est profondément liée à la constitution de l'identité. Elle représente ce qui doit être expulsé pour que le moi se forme, mais qui demeure une menace perpétuelle à cette formation. Cela inclut les expériences corporelles dégoûtantes, les exclusions sociales, et les éléments perturbateurs de l'ordre symbolique. Julia Kristeva étend ici les frontières de la psychanalyse en intégrant des éléments anthropologiques et littéraires et offre une vision complexe de la subjectivité humaine. Selon elle, l'abjection est un processus fondamental pour la formation de l'identité, mettant en lumière les aspects sombres et refoulés de l'expérience humaine. L'abjection, en tant que concept, aide à comprendre les réactions humaines aux expériences limites, telles que le dégoût, la peur, et la fascination face à la mort et la décomposition. Ces expériences révèlent les fragilités et les contradictions internes de l'ordre symbolique. Kristeva montre comment la littérature et l'art jouent un rôle crucial en exposant et en travaillant à travers l'abjection. Les oeuvres qui traitent de thèmes abjects offrent une forme de catharsis et de confrontation avec les aspects les plus dérangeants de la condition humaine. En soulignant le rôle de l'abjection dans la culture et la psyché, elle fournit des outils précieux pour la critique littéraire, la psychanalyse, et les études culturelles. Elle montre comment l'analyse de l'abjection peut mener à une compréhension plus profonde de la subjectivité et des dynamiques sociales.
Dans Histoires d'amour, (1984), elle examine les discours de l'amour à travers la psychanalyse, la littérature, et la philosophie. Avec Soleil noir : dépression et mélancolie (1985), Kristeva propose une analyse approfondie des états dépressifs et mélancoliques, où elle lie des concepts psychanalytiques avec la littérature et l'art. Vient ensuite son Étrangers à nous-mêmes (1987), où elle s'intéresse à  la notion d'étrangeté et l'expérience de l'exil, à la fois personnel et culturel.

Kristeva fonde l'Institut de la Pensée Contemporaine, un centre de recherche interdisciplinaire à l'Université Paris Diderot en 1986. Elle est t nommée professeure à cette université en 1991, et commence à donner des conférences dans le monde entier, ce qui contribue à renforer son influence internationale. 

Dans les années suivantes, elle publie Les Samouraïs (1993), un roman semi-autobiographique qui retrace l'itinéraire intellectuel de la génération des années 1960 et 1970; Le Génie féminin (1999-2002), une trilogie consacrée à trois femmes intellectuelles : Hannah Arendt, Melanie Klein, et Colette; Sens et non-sens de la révolte (2000), où elle étudie les dimensions philosophiques et psychanalytiques de la révolte; La Haine et le pardon (2005), un recueil d'essais traitant des thèmes de la haine, du pardon, et de la réconciliation; Cet incroyable besoin de croire (2010), une réflexion sur la croyance, la foi et la spiritualité; Pulsions du temps (2014), un ouvrage qui aborde les questions de temporalité et d'histoire à travers une perspective psychanalytique.

Dans l'intervalle, Julia Kristeva a reçu de multiples prix et reconnaissances, qui se ssont ajoutées à d'autres antérieures. Citons : 1996 : Elle reçoit le prix Hannah Arendt (2006) pour la pensée politique, en reconnaissance de ses contributions aux théories sociales et politiques;  le prix Holberg (2004) pour ses contributions exceptionnelles aux arts et aux sciences humaine, etc.

En 2020, elle publie encore L'Invention de l'âme,  un livre qui examine les dimensions spirituelles et psychologiques de l'âme humaine.

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Dictionnaire biographique
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