| Le Styx (= Horreurs) est un marais et un fleuve des Enfers selon la mythologie grecque. Au départ, il s'agissait une rivière de la Grèce antique. Le Styx, qui prenait sa source en Arcadie, était un affluent du Crathis, fleuve tributaire du golfe de Corinthe. A leur sortie du rocher, les eaux du Styx se précipitaient par une énorme cascade, qui tombait à pic, au milieu d'un paysage désolé. Ce spectacle fit toujours sur les Grecs une impression profonde; on se mit dès lors à croire que les eaux de cette rivière glacées, vénéneuses et corrosives; le poison qu'elles contenaient était si subtil, qu'il brisait tous les vases dans lesquels ou en puisait, excepté ceux qui étaient faits de la corne du pied d'un cheval. C'était dans ces eaux pestilentielles que les Grecs plaçaient les âmes des traîtres et des calomniateurs. Le Styx passa en outre pour couler dans le monde infernal qu'il entourait sept fois. Les poètes avaient personnifié le Styx, et eu avaient fait une nymphe, fille de l'Océan et de Téthys; « De tous les enfants auxquels ces deux divinités avaient donné le jour, dit Hésiode, elle fut la plus respectable. » Elle habitait une grotte située à l'entrée des Enfers. Le Titan Pallas en devint amoureux et la rendit mère de Zélus et de la nymphe Niké, c'est-à-dire de la Jalousie et de Ia Victoire, ainsi que de Cratos (la Puissance) et de Bia (la Force). Lorsque les Titans attaquèrent l'Olympe, elle prit le parti de Zeus et lui amena ses enfants, pour combattre auprès de lui. Zeus, en récompense, l'éleva au rang des divinités et la combla de bienfaits. « il prit, dit Hésiode, pour commensaux, tous ses enfants, et par la distinction la plus flatteuse, il voulut qu'elle fût le lieu sacré des promesses des dieux; et il étabit les peines les plus graves contre ceux qui violeraient les serments faits en son nom. » En effet, tous les dieux juraient par les eaux du Styx, et c'était leur serment le plus redoutable; en le prononçant il fallait, suivant Homère, qu'ils eussent une main étendue sur la terre et l'autre sur la mer. Pour rendre ce serment plus inviolable Zeus avait dû y mettre une sanction; et en effet la peine du parjure était très grande. Hésiode trous apprend en quoi elle consistait : « L'eau du Styx, forme sous terre un ruisseau toujours couvert d'une sombre nuit. Elle coule dans le Tartare; mais la dixième partie est réservée pour la punition des dieux parjures. Quiconque d'entre eux a violé son serment, demeure un an sans respiration, sans parole et sans vie; il est étendu sur un lit dans un engourdissement total, et privé du nectar et de l'ambroisie. A l'expiration de ce terme, sa punition n'est pas finie; il est séparé pour neuf ans encore de la compagnie des dieux il n'est admis ni à leurs assemblées ni à leurs festins, et ce n'est qu'après ce temps qu'il peut rentrer dans l'exercice de tous ses droits. » Les peuples d'Italie, qui regardaient comme des dieux tous les lacs et tous les fleuves, qui adoraient le lac d'Albe, le lac Fucin, ceux d'Aride et de Cutilie, les fleuves Clitumne et Numique; qui se prosternaient devant les étangs de Marica, la fontaine Juturne, les eaux Férentines et de Féronie, prirent facilement des Grecs leur respect pour le Styx et les autres fleuves infernaux. Aussi voit-on souvent leur nom et leurs attributs dans les oeuvres de leurs poètes les plus célèbres; et s'il y a peu de monuments qui les représentent parmi eux, c'est que, pendant longtemps et depuis le règne de Numa jusqu'au consulat de Cornélius Céthégus, les Romains et les peuples voisins, soupçonnant l'incorporalité des dieux, regardèrent comme une impiété l'usage des nations qui osaient les peindre et les sculpter. L'Antiquité tardive a rapproché le mythe grec des mythes égyptiens. Ce fut près de ses bords, raconta-t-on alors, qu'Isis ensevelit les membres de son époux Osiris, que Typhon avait inhumainement dispersés, et que la déesse parvint à recueillir au prix de nombreuses et longues fatigues. Elle choisit le Styx pour cette sépulture, parce que l'accès en était difficile, et que ses eaux murmurant avec un bruit sourd, inspiraient une sombre tristesse. On prétendait à cette époque que le Styx n'était qu'une fontaine ou un ruisseau affluent du Nil. Cette idée de plonger dans des marais fangeux les âmes des méchants est professée explicitement par les Bouddhistes; et certaines populations d'Afrique, de l'Amérique et de l'Océanie croient que leurs ennemis et les pervers vont habiter, après leur mort, des lacs éloignés et infects, où ils sont destinés à endurer mille genres de tourments. (J. Toutain / A19). | |