| On connaît sous le nom de bibliothèque Colombine la bibliothèque du chapitre de Séville. Son premier fonds remonte au Moyen âge. Au XVIe siècle, elle s'augmenta des collections formées par Fernand Colomb, fils de Christophe Colomb, et fut depuis lors appelée Biblioteca Colombina. Fernand Colomb a été « le plus grand bibliophile de son temps ». La littérature l'attirait surtout; il préférait les romans de chevalerie, les chansons de geste, les mystères et les recueils de vers aux oeuvres de science et d'histoire. Il avait soin d'indiquer, à la dernière page de chacun de ses livres, la date et le lieu d'acquisition. Ces notes ont permis à Harrisse de dresser un itinéraire assez complet des voyages qu'il fit, dans l'Europe occidentale, de 1510 à 1536, à la suite de Charles-Quint ou pour son compte personnel. En mourant, le 12 juillet 1539, il légua sa bibliothèque à Luis Colon, son neveu, mais à la condition qu'il consacrerait à son entretien les revenus qu'une autre clause du testament lui assurait. En cas de refus, elle devait échoir au chapitre de Séville d'abord, et au monastère de San Pablo ensuite. La Biblioteca Fernandina ou Colombina resta quelque temps dans la maison du défunt. En 1544, Maria de Toledo, mère et tutrice de Luis, prit sur elle de laisser les moines de San Pablo la transporter dans leur couvent. Luis, devenu majeur, ne se mit pas en mesure d'exécuter le testament de son oncle; il dépensa, au contraire, pour les besoins d'une conduite peu régulière, les revenus qui lui avaient été laissés. Le chapitre de Séville renouvela alors la demande qu'il avait déjà faite en 1540, et le tribunal de Grenade lui donna gain de cause. A la fin de 1552, la Biblioteca Colombina fut transportée dans l'une des salles de l'aile mauresque de la cathédrale où elle se trouve encore. Harrisse a estimé à plus de 15 000 les livres et manuscrits dont elle se composait. Fernand Colomb en avait dressé lui-même plusieurs catalogues et répertoires, dont quelques-uns subsistent encore. Le chapitre ne fit rien pour assurer la conservation de ce précieux legs. De nombreux ouvrages disparurent. Philippe II se fit remettre les manuscrits soi-disant originaux d'Isidore de Séville et « beaucoup d'autres livres » qui n'y rentrèrent jamais. On ne fit pas, dans la salle où elle se trouvait, les réparations nécessaires et, sur plus d'un rayon, les volumes furent détruits par l'humidité et les vers. En 1684, Juan de Loaisa constatait avec douleur que la Colombine n'en « contenait plus que quatre à cinq mille ». Les acquisitions qu'elle faisait ne compensaient pas ses pertes. En 1783, Rafael Tabares en dressa un inventaire sommaire qui rend encore de grands services. Il faut ensuite arriver jusqu'à José Fernando de Velasco pour trouver un bibliothécaire qui se soit sérieusement occupé de la Colombine. Nommé en 1832, il est resté en charge jusqu'en 1879, date de sa mort. Pendant ces cinquante ans, il a su trouver l'argent qui lui était nécessaire pour améliorer son installation et il a été assez heureux pour susciter de nombreux dons. En 1871, il estimait que sa bibliothèque contenait 34 000 volumes et 1600 manuscrits. Ses successeurs n'ont malheureusement pas tous montré autant de zèle et de probité. La Colombine a été, en 1884, l'objet d'un véritable pillage. On en a soustrait plusieurs manuscrits et de nombreuses plaquettes gothiques sur lesquelles on avait eu soin de gratter, pour en dissimuler l'origine, les notes que Fernand Colomb y avait mises. Ces manuscrits et imprimés ont presque tous été envoyés à Paris où un bouquiniste a été chargé de les vendre. Harrisse a le premier signalé et flétri, comme il convenait, ces regrettables déprédations. Il a en outre donné, dans ses Excerpta Colombiniana, une « bibliographie de quatre cents pièces gothiques du commencement du XVe siècle », qui étaient autrefois conservées à la Colombine mais qu'on n'y trouve plus aujourd'hui, à quelques exceptions près. Les manuscrits de la Colombine ont été catalogués par Haenel et étudiés après lui par divers savants. (C. Couderc). | |