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L'histoire du Malawi

Le Malawi précolonial

On pense que les premiers habitants de l'actuel Malawi étaient des chasseurs-cueilleurs, appartenant aux groupes Khoïsan. Vers le Xe siècle, des populations bantoues, venues d'Afrique centrale, ont migré vers la région et introduit l'agriculture et la métallurgie. Ces migrants ont formé des sociétés organisées et des royaumes. Le royaume de Maravi, qui a donné son nom au pays, a été l'un des plus anciens et importants de la région. 

Le royaume de Maravi.
Le royaume de Maravi (empire Maravi), était une confédération de chefferies située dans l'actuelle région du Malawi ainsi que dans certaines parties du Mozambique et de la Zambie, à son apogée. Il a été fondé vers le XVe siècle par des groupes bantous qui ont migré depuis le bassin du Congo vers le sud-est de l'Afrique. Le terme maravi signifie flammes, et pourrait faire référence aux feux utilisés pour défricher les terres. Ces migrants ont formé une société placée sous l'autorité d'un roi suprême appelé le kalonga. Ce dernier résidait au Malawi actuel, dans la région de Dedza, près du lac Malawi. Ils exerçait son autorité sur plusieurs chefs locaux qui contrôlaient diverses régions. L'organisation politique était relativement décentralisée, chaque chef ayant une certaine autonomie, mais restant soumis au kalonga.

L'économie du royaume reposait principalement sur l'agriculture, la chasse et la pêche. Cependant, le royaume est surtout connu pour son commerce régional. Les Maravi étaient impliqués dans le commerce de l'ivoire, du fer et, plus tard, des esclaves. Le royaume avait des relations commerciales avec les Swahilis de la côte est africaine et les Portugais. Le commerce avec ces derniers a permis l'introduction d'objets manufacturés, mais a également contribué à l'intensification de la traite des esclaves.

Le royaume de Maravi a commencé à décliner au XVIIIe siècle, principalement en raison de l'augmentation des conflits internes et de la décentralisation du pouvoir. Les chefs locaux, cherchant à accroître leur autonomie, ont défié l'autorité du kalonga. De plus, l'influence des marchands arabes et swahilis, qui ont accentué la traite des esclaves, a affaibli la structure sociale du royaume. Le commerce des esclaves a également provoqué des migrations forcées et des conflits avec les groupes voisins, accélérant le déclin du royaume. 

Au début des années 1800, un conflit généralisé en Afrique australe a déplacé divers groupes ethniques Ngoni, dont certains se sont installés au Malawi et ont encore sapé les Maravi. Les membres du groupe ethnique Yao - qui avaient longtemps commercé avec le Malawi depuis le Mozambique - ont introduit l'islam et ont commencé à s'installer au Malawi en grand nombre au milieu du XIXe siècle; à la fin de ce siècle, des membres du groupe ethnique Lomwe, venu du Mozambique, se sont également installés dans le sud du Malawi.

La traite des esclaves et les premières interactions avec les Européens.
À partir du XVIIe siècle, la traite des esclaves a profondément bouleversé la région. Des marchands arabes et swahilis de la côte est africaine ont capturé des esclaves dans la région du lac Malawi pour les vendre sur les marchés de l'océan Indien. Le commerce des esclaves a affaibli les structures sociales et politiques locales. En parallèle, les Portugais ont commencé à explorer la région, établissant des contacts commerciaux. Cependant, leur influence est restée limitée par rapport à celle des marchands arabes.

Au milieu du XIXe siècle, David Livingstone a été l'un des premiers Européens à explorer la région du lac Malawi. Son opposition à la traite des esclaves et son appel à la colonisation chrétienne ont attiré l'attention des missionnaires européens. En 1861, les missionnaires anglicans et les missionnaires de la Société des missions de l'Église écossaise ont établi des bases autour du lac Malawi. Les missions ont joué un rôle crucial dans l'éducation, la conversion au christianisme et l'influence sur les affaires locales. Elles ont également favorisé l'intérêt britannique pour la région.

L'époque coloniale

En 1891, le Royaume-Uni a officiellement établi un protectorat sur la région, qui fut appelé Nyassaland (du nom du lac Malawi, alors appelé lac Nyassa). Cette colonisation faisait partie de l'expansion impérialiste britannique en Afrique australe. Les Britanniques ont introduit des cultures commerciales comme le tabac, le thé et le coton. Toutefois, cette colonisation a été marquée par l'exploitation des terres et des populations locales, qui étaient souvent forcées de travailler dans des conditions difficiles. Les colons européens ont pris le contrôle des meilleures terres agricoles, marginalisant les agriculteurs africains.

Tout au long du XXe siècle, les Malawites ont de plus en plus résisté à la domination coloniale. Le Nyasaland African Congress (NAC), fondé en 1944, est devenu le principal mouvement politique luttant pour les droits des Africains et l'indépendance. En 1953, le Nyassaland a été intégré à la Fédération de Rhodésie et du Nyassaland, une union impopulaire qui regroupait également les colonies britanniques de Rhodésie du Nord (Zambie) et de Rhodésie du Sud (Zimbabwe). Cette fédération a été perçue comme une tentative de renforcer la domination des colons blancs.

La résistance à cette fédération a été un catalyseur du mouvement indépendantiste. En 1958, Hastings Kamuzu Banda, qui avait été formé à l'étranger, est revenu au Nyassaland et a pris la tête du NAC. Sous sa direction, le mouvement pour l'indépendance s'est intensifié, avec des grèves, des manifestations et des affrontements avec les autorités coloniales.

En 1959, les autorités britanniques ont déclaré l'état d'urgence et arrêté plusieurs leaders nationalistes, dont Banda. Cependant, la pression pour l'indépendance continuait de croître. En 1961, le NAC, rebaptisé Malawi Congress Party (MCP), a remporté les élections locales. En 1963, la Fédération de Rhodésie et du Nyassaland a été dissoute, ouvrant la voie à l'indépendance. Le 6 juillet 1964, le Nyassaland est devenu un État indépendant sous le nom de Malawi, avec Hastings Kamuzu Banda comme Premier ministre.

Le Malawi indépendant

En 1966, le pays devient une république, et Banda est proclamé président. Il instaure rapidement un régime autoritaire. En 1971, il se fait proclamer président à vie. Le Malawi devient un État à parti unique, dominé par le Malawi Congress Party (MCP). Toute opposition est réprimée, et Banda gouverne avec une poigne de fer, contrôlant l'armée, la police et les médias. Sous Banda, le Malawi connaît une certaine stabilité économique, mais les inégalités sont criantes. Le pays reste fortement agricole, avec des cultures d'exportation comme le tabac, le thé et le sucre. Banda adopte une politique étrangère conservatrice et pro-occidentale, ce qui lui permet de maintenir de bonnes relations avec les États-Unis et l'Afrique du Sud de l'apartheid, malgré les critiques internationales.

Dans les années 1980, le régime de Banda commence à faire face à une opposition croissante. La répression violente, les privations des libertés et la stagnation économique alimentent le mécontentement populaire. Les pressions internes et internationales pour la démocratisation s'intensifient. Banda accepte finalement des réformes démocratiques. En juin 1993, un référendum est organisé sous la pression des églises, des syndicats et des mouvements pro-démocratie. Les Malawites votent massivement en faveur de la fin du système à parti unique, ce qui ouvre  la voie à des élections multipartites.

Lors des premières élections libres en mai 1994, Hastings Banda est battu par Bakili Muluzi, du parti Front Démocratique Uni (United Democratic Front),  leader de l'opposition et ancien ministre sous Banda. Cette élection marque la fin de 30 ans de régime autoritaire et le début d'une nouvelle ère démocratique au Malawi. Muluzi, devenu président, entame un processus de libéralisation politique et économique.Il introduit des réformes qui renforcent la liberté de la presse, les droits civiques et la participation politique. Le multipartisme devient la norme, et plusieurs partis émergent. Mais, bien que le gouvernement de Muluzi mette en place des réformes économiques, le Malawi reste l'un des pays les plus pauvres du monde. La corruption endémique devient un problème majeur. Muluzi tente de modifier la constitution pour briguer un troisième mandat, mais cette tentative échoue en raison de l'opposition populaire.

En 2004, Bingu wa Mutharika, soutenu par Muluzi mais rapidement devenu indépendant et avoir fondé son propre parti, le Parti démocrate progressiste, devient président. Mutharika lance des réformes économiques qui améliorent la sécurité alimentaire et stabilisent l'économie. Son initiative de subvention des engrais est particulièrement saluée, réduisant la famine et augmentant la production agricole. Cependant, son régime devient de plus en plus autoritaire, avec une répression accrue des opposants et des manifestations. En 2011, le Malawi entre en crise économique, aggravée par la mauvaise gestion et les tensions avec les bailleurs de fonds internationaux. Des manifestations massives éclatent, réprimées violemment. En 2012, Mutharika meurt soudainement.

Après la mort de Mutharika, Joyce Banda, sa vice-présidente, qui avait auparavant lancé son propre parti, le Parti populaire, lui succède. Elle initie des réformes économiques et restaure les relations avec la communauté internationale. Cependant, son mandat est marqué par le scandale dit du Cashgate, une affaire de corruption massive impliquant des détournements de fonds publics à grande échelle. Ce scandale affaiblit son gouvernement et contribue à sa défaite aux élections de 2014, qui sont remportées par Peter Mutharika, frère de Bingu wa Mutharika. Celui-ci poursuit les politiques de son prédécesseur, mais son régime est critiqué pour la corruption, l'autoritarisme et l'incapacité à améliorer les conditions de vie des Malawites. Le pays fait face à des crises alimentaires, des inondations et des tensions sociales. Les élections de 2019 sont fortement contestées par l'opposition, qui dénonce des fraudes. De grandes manifestations éclatent à travers le pays, conduisant à une décision historique de la Cour constitutionnelle en 2020, qui annule les résultats et ordonne une nouvelle élection.

Lazarus Chakwera, leader du Parti du Congrès du Malawi, remporte l'élection présidentielle de 2020 dans le cadre d'une alliance avec Saulos Chilima. Sa victoire est vue comme une victoire démocratique et un tournant pour le Malawi. Chakwera s'engage à lutter contre la corruption, à renforcer les institutions démocratiques et à revitaliser l'économie. 

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