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Le Seistan
qui forme aujourd'hui une partie d'une province orientale de l'Iran
était autrefois plus étendu. On le connaissait aussi sous
les nom de Sistan et, dans les géographes arabes, de Sidjistan
(Sacastène, pays des Sakas). Cette région comprenait
tout le territoire borné par le Khoraçan
au Nord, la région de l'Indus à l'Est, le Kirman à
l'Ouest, et le Mekran au Sud. Sa capitale était autrefois Ram-Chahristan,
qui fut remplacée par Zerendj; ces villes sont aujourd'hui ruinées.
Le sol du Seistan est stérile et
sablonneux; la chaleur y est très grande, et le palmier y vient
bien. Le vent y souffle sans interruption et avec assez de force pour faire
tourner les moulins à vent qui, paraissent y avoir été
inventés; il transporte des dunes de sable contre lesquelles les
habitants se défendent au moyen d'un procédé ingénieux
: ils élèvent autour des dunes des palissades de bois, de
broussailles ou d'autres matériaux, et pratiquent ensuite une porte
au bas de la palissade; le vent s'y introduit, soulève le sable
et le reporte plus loin.
Ces habitants, qui coiffaient leur tête
de quatre turbans de couleur différente, appartenaient au rite hanéfite;
on y trouvait cependant parmi eux un grand nombre de kharédjites.
A l'époque de la conquête musulmane,
ils stipulèrent qu'on ne chasserait pas les hérissons, parce
que ces animaux les délivraient des vipères qui pullulent
dans leur pays; aussi chaque maison avait son hérisson. Parmi les
dépendances de la province, on citait la ville et la région
de Rokhkhedj, qui a conservé le nom de l'antique Arachosie et de
Bost, où l'on voyait les ruines de l'écurie du héros
Roustem.
Aujourd'hui, une grande partie du Seistan
relève de l'Afghanistan
et du Pakistan;
il n'est resté sous la domination de l'Iran qu'une portion rattachée
au Baloutchistan iranien pour former une province.
Les principales rivières du Seistan
sont le Hilmend, le Khach-Roud, le Farrah-Roud et le Harout-Roud, qui descendent
toutes, du Nord au Sud, de la chaîne du Paropamise; la première
seule décrit une vaste courbe, court du Sud au Nord, et se jette,
ainsi que les autres, dans l'ensemble de lagunes et de marais qui, suivant
la saison et même suivant les années, forment un seul lac,
des marécages isolés ou un fond de cuvette salsugineux parfaitement
sec, ensemble dont le nom générique, dans cette région,
est hamoun (pers., plaine).
Dans l'épopée nationale
de l'Iran, le Séistan joue un grand rôle, parce qu'il est
le fief héréditaire des ancêtres de Roustem. Alexandre
le traversa probablement dans sa route vers l'Inde,
tandis que son retour eut lieu par la côte (Gédrosie
et Carmanie, Mekran et Kirman); cependant
il envoya une colonne légère, sous les ordres de Cratère,
à travers l'Arachosie et la Drangiane.
Il fit partie de l'empire des Sassanides et
de celui des Califes; sous ces derniers, il atteignit
le sommet de la prospérité; les ruines qui couvrent le pays
en sont le meilleur indice (mosquées et collèges, portes
surmontées d'inscriptions arabes à Poulki, Nâdâli
et Pechâvéran). C'est là que fut fondée la dynastie
des Saffarides.
Ruiné par les expéditions
de Gengis Khan,
de Tamerlan
et des Afghans, le Séistan ne
retrouva de tranquillité que sous Ahmed-Shah Abdali, fondateur de
la dynastie Dourrâni en Afghanistan. Après la mort de son
successeur Timour-Shah (1793), cette province dépendit alternativement
de Hérat et de Kandahar.
En 1841, le voyageur anglais Forbes y fut
assassiné, à la chasse, par un chef local ivrogne, Ibrahim-Khan.
Après la mort de Yâr-Mohammed de Hérat, la Perse, vers
1851, tenta de recouvrer son ancienne possession; un chef local, Ali-Khan,
arbora le pavillon persan et reçut en mariage une princesse de la
cour de Téhéran. Malgré
les termes précis du traité de
Paris (1856), ce chef local et son successeur Tadj-Mohammed reconnurent
la suzeraineté de Nasr-ed-Din-Chah, qui fut rendue effective en
1866 par une occupation militaire. En 1872, une mission anglaise, sous
les ordres du général sir F. Goldsmid, fut chargée
d'examiner sur place les réclamations respectives de l'Afghanistan
et de la Perse, et conclut à la division du Seistan en deux parts,
attribuées chacune aux deux pays limitrophes.
La position de cette contrée, à
mi-chemin-entre Meshed et le golfe Arabo-Persique,
en fait un point stratégique qui a attiré l'attention des
Russes et des Anglais;
ceux-ci proposèrent la construction d'un chemin de fer descendant
la vallée de l'Helmend depuis Kandahar, ou passant par Tchaman (Baloutchistan).
(Cl. Huart). |
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