| En communication avec l'océan Indien, par le détroit de Ormouz et le golfe d'Oman, le golfe Persique ou Arabo-persique n'a que très peu le caractère océanique. Géologiquement, c'est la suite de la dépression qui sépare les montagnes de l'Iran (Zagros) du plateau de l'Arabie, coupure qui commence au Nord par la dépression où coulent l'Euphrate et le Tigre. Le bord iranien du golfe a par suite un caractère asiatique, tandis que le bord arabique a un caractère africain. La côte orientale est escarpée et présente fort peu d'indentations, tandis que la côte occidentale est basse, avec deux grands golfes, celui de Bahreïn et celui de Bahr el Benat. Le développement total des côtes est dé 3420 km. La superficie, avec le golfe d'Oman, qui entre dans le calcul pour un tiers à peine, est de 236.835 km². Le golfe Persique est parsemé d'îlots; ceux de la côte iranienne ont, comme le littoral, un caractère montagneux, avec des côtes à pic et une mer libre autour d'eux. Ceux de la côte arabique sont bas, entourés de bancs de sable; ils sont particulièrement nombreux dans le golfe de Bahreïn; d'après les assyriologues, ces îles de Bahreïn auraient été, au Néolithique, un des premiers foyers de civilisation dans cette région du monde, et les traditions phéniciennes font partir de ces îles les premières migrations des Pouni. Le golfe Persique est très peu profond; nulle part la sonde ne dépasse 80 m, et la profondeur moyenne est de 40 à 50 m. Le golfe Persique est d'ailleurs une région d'alluvionnement intense; au temps des Sargonides, l'extrémité Nord du golfe atteignait le 31e parallèle, et le Tigre et l'Euphrate s'y jetaient séparément. De 1793 à 1833, le progrès du delta (Chatt el-Arab) aurait été, selon le colonel Rawlinson, de 3200 m., c.-à-d. de 53 m par an en moyenne. Il n'y a pas, dans le golfe, de courants généraux et persistants; les eaux se déplacent sous l'influence du vent, en particulier des moussons. La marée est aussi à peu près insensible, en raison de la situation au milieu des terres; dans le Bahr et Benat; cependant, on observe une lente oscillation dont le flux et le reflux durent chacun douze heures. La faune compte de nombreux individus, et la population des côtes est historiquement composée de pêcheurs. On y a trouvé des baleines de très grande taille (Balaenoptera indica) l'abondance des animaux quasi microscopiques y produit souvent des phénomènes de phosphorescence. La couleur même de l'eau est verdâtre, surtout en comparaison des eaux très bleues de l'océan Indien, et les habitants de la côte l'appellent la mer Verte. - Carte du Golfe Persique. Pendant très longtemps ce qui a fait l'importance économique du golfe Persique, c'étaient ses pêcheries de perles qui occupaient encore au début du XXe siècle 6000 barques et 70.000 pêcheurs d'huîtres perlières. La découverte et l'exploitation du pétrole et du gaz naturel à partir du XXe siècle ont radicalement modifié le contexte économique et démographique de toute la région. (Ludovic Marchand).
| Collectif, Le Golfe et ses Emirats, Revue Hérodote n°133, 2009. - Long de 1300 km, le Golfe persique - selon l'appellation traditionnelle - ou Golfe arabique pour les Arabes, est une zone géopolitique de grande importance. Et cela ne date pas de la découverte des gisements pétroliers au début du XXe siècle, et surtout dans l'entre-deux-guerres. La ligne de front entre l'Empire ottoman et l'Empire perse s'étendait en effet sur toute sa longueur , puisque les Turcs contrôlaient en principe les côtes d'Arabie - mais le chiisme perse y était aussi présent. Et c'est à la suite de l'arrivée des Anglais dans la région, dès la fin du XVIIIe siècle, que ceux-ci passèrent, en 1823, des accords avec les ports arabes de la côte ouest du Golfe, la "côte des pirates" devenant la "Trucial Coast" (côte de la trêve). C'est l'origine des sept émirats qui ont constitué la fédération des Émirats arabes unis au départ les Britanniques en 1971, peu après les premières découvertes offshore de pétrole. Comme l'explique ce numéro d'Hérodote, qui revient sur cette histoire méconnue, les événements contemporains ont fait de la région une zone de tensions géopolitiques majeure : révolution khomeyniste en Iran (1979), suivie par l'embargo américain, guerre Irak-Iran (1980-1988), puis invasion du Koweït et "guerre du Golfe" (1990-1991). La Ve flotte de l'US Navy a établi son QG à Bahreïn; et c'est au Qatar que, depuis l'invasion américaine de l'Irak en 2003, est basé le "quartier général avancé" du Centcom, qui dirige les opérations de l'US Army dans tout le Moyen-Orient. Les Émirats arabes unis, malgré - ou peut-être à cause de - tous ces bouleversements, ont connu une croissance économique considérable, du fait des profits pétroliers, mais aussi à cause de diverses spéculations financières (notamment avec des Iraniens). Les super gratte-ciels qui s'élèvent sur la mer et le désert veulent proclamer la vision d'une mondialisation centrée sur les marches de l'Asie et du monde arabe. Reste à savoir comment la crise financière mondiale va se traduire dans les Émirats et comment vont évoluer les rapports de forces entre l'Iran et les États-Unis. Sommaire : Le Golfe, zone pétrolière exceptionnelle et zone d'affrontements multiples, Yves Lacoste. Dubaï, utile ou futile? Portrait d'une ville rêvée à l'heure de la crise, Marc Lavergne. L'histoire des Émirats du Golfe, André Bourgey. Les défis géopolitiques d'une nouvelle puissance régionale : les Émirats arabes unis, Philippe Boulanger. Les Émirats et les royaumes arabes : une croissance sans main-d'oeuvre?, Ali Ratsbeen. Les chiites d'Arabie saoudite, la province du Hasa, David Rigoulet-Rose. La Ve Flotte de l'US Navy, QG à Bahrein, Kenneth Pollack. (couv.). | - | |