Vidal-Lablache ca. 1910 | Toute l'administration de la France repose sur la division en départements instituée par l'Assemblée constituante. L'oeuvre de la Constituante n'a, depuis un siècle, subi que de légères retouches. Si l'on met à part les changements survenus le long des frontières de Belgique, d'Allemagne et d'Italie, par suite des pertes ou des acquisitions de territoires, on ne trouve guère à signaler, dans l'intérieur même du pays, que la séparation du Rhône et de la Loire, et la création de Tarn-et-Garonne, aux dépens des départements voisins. France administrative
Dans cette refonte des divisions administratives de la France, la Constituante est loin de s'être affranchie, aussi complètement qu'on le dit quelquefois, des tracés de limites fournis par les divisions antérieures. Certaines provinces [Les Anciennes Provinces de la France] sont assurément difficiles à identifier avec un groupe de départements bien défini; on en trouve au contraire pour lesquelles la concordance est complète : ainsi la Bretagne, dont les limites n'ont pas bougé depuis le milieu du treizième siècle. De même la Charente-Inférieure [= Charente-Maritime] correspond exactement aux gouvernements d'Aunis et de Saintonge. Sur beaucoup d'autres points on retrouve une concordance analogue. Cela est frappant surtout pour un certain nombre de limites marquées par des cours d'eau. Avant comme après 1791, le Rhône formait, sur tout son parcours, une frontière intérieure. La Loire séparait presque aussi exactement les Bituriges des Aedui et le Berry du Nivernais, que le Cher de la Nièvre. La Bresle et l'Epte limitaient la Normandie, comme elles limitent la Seine-Inférieure [= Seine-Maritime] et l'Eure. La haute Sarthe séparait la Normandie du Maine, comme elle sépare l'Orne de la Sarthe; de même pour l'Indre entre la Touraine et le Poitou, comme aujourd'hui, entre Indre-et-Loire et la Vienne. Instruction publique. | Densité de population. | Justice, cours d'appel | Evêchés, archevêchés | Cliquez sur les cartes pour les agrandir. Plus nombreuses encore apparaîtraient les coïncidences si l'on examinait les subdivisions de l'Ancien régime (bailliages, etc.). C'est là, en effet, que survivaient les divisions les plus anciennes et, en même temps, les plus voisines de la nature. On peut dire qu'elles survivent encore dans nombre de départements. Avec eux ont reparu sur la carte quelques-unes des civitates ou des pagi gaulois. L'Indre-et-Loire, ce sont les Turones; - la Dordogne, les Petrocorii; - l'Aveyron et le Tarn, les Ruteni ; - la Loire et le Rhône, les Segusiavi, etc. Ainsi, à travers les inévitables transformations de l'histoire, se sont perpétués plusieurs tracés de limites qui sont comme des repères marqués par la nature. Ceci explique en partie pourquoi la division départementale, sans effacer dans le langage et les moeurs les distinctions provinciales, y a pris une place désormais prépondérante. Il n'y aurait peut-être de caduc en elle que les arrondissements (simplification des districts de la Constituante, qui paraissent à leur tour trop petits, depuis l'établissement des chemins de fer et des télégraphes. (P.-D.). | |