Jürgen Habermas

Habermas grandit pendant l'époque nazie, une période qui marquera profondément sa pensée ultérieure. En 1949, après la Seconde Guerre mondiale, il commence ses études de philosophie, d'histoire, de psychologie de littérature allemande et d'économie à l'Université de Göttingen. De 1950 à 1954, il continue ses études à l'université de Zurich puis à l'université de Bonn, où il obtient son doctorat sous la direction d'Erich Rothacker avec une thèse sur Schelling.

Après son doctorat, il travaille comme journaliste et critique littéraire, notamment pour le Frankfurter Allgemeine Zeitung. En 1956, Habermas rejoint l'Institut de recherche sociale de Francfort, dirigé par Theodor W. Adorno et Max Horkheimer. C'est là qu'il se familiarise avec la théorie critique de l'École de Francfort. Il obtient son habilitation à diriger des recherches en 1961 avec une thèse intitulée Strukturwandel der Öffentlichkeit (L'Espace public). Il  enseigne à l'université de Heidelberg, où il devient proche de Hans-Georg Gadamer et Karl Löwith, tout en continuant à développer ses idées sur la communication et la rationalité. En 1964, il succède à Max Horkheimer comme professeur de philosophie et de sociologie à l'université Johann Wolfgang Goethe de Francfort.

Habermas publie en 1971 Erkenntnis und Interesse (Connaissance et intérêt), ouvrage dans lequel il étudie les fondements épistémologiques de la connaissance humaine et critique les approches positivistes. En 1973, il devient co-directeur de l'Institut Max Planck de Starnberg pour les conditions de vie dans le monde technique-scientifique. Il y travaille sur des thèmes liés à la science, à la technologie et à la société.

Habermas publie en 1981 son ouvrage majeur en deux volumes, Théorie de l'agir communicationnel (Theorie des kommunikativen Handelns). Dans ce livre, il propose une théorie systématique de la rationalité communicative, qui distingue l'agir communicationnel de l'agir stratégique et mettant en lumière l'importance du discours éthique et rationnel dans la société. En 1986, il publie Der Philosophische Diskurs der Moderne (Le Discours philosophique de la modernité), une critique des courants postmodernes.

 En 1992, Jügen Habermas  fait paraître Faktizität und Geltung (Droit et Démocratie. Entre faits et normes), où il questionne les fondements du droit et de la démocratie délibérative, intégrant la théorie de l'agir communicationnel dans un cadre normatif plus large. Au milieu des années 1990, il participe à des débats sur la bioéthique et les implications éthiques de la génétique, notamment en lien avec les avancées scientifiques de l'époque.

Au cours des années 2000, Habermas a porté sa réflexion surs religions et leur rôle dans la société contemporaine. Dans son ouvrage Glauben und Wissen (Foi et savoir), publié en 2001, Habermas discute de la place de la religion dans le monde moderne. Il y réafirme  l'importance du dialogue entre les différentes traditions culturelles et religieuses. En 2005, il  publie Entre naturalisme et religion (Zwischen Naturalismus und Religion), où il approfondit les thèmes de la rationalité, de la religion et de la sécularisation. Il participe l'année suivante à un célèbre débat avec le philosophe Joseph Ratzinger (plus tard le pape Benoît XVI), discutant des rôles respectifs de la religion et de la raison dans la société.

Habermas publie encore en 2011 Zur Verfassung Europas (La Constitution de l'Europe), un ouvrage où il défend l'idée d'une constitution européenne démocratique et appelle à une plus grande intégration politique au sein de l'Union européenne. En 2021, Habermas publie Auch eine Geschichte der Philosophie (Une autre histoire de la philosophie), une vaste étude en deux volumes de l'histoire de la philosophie où il s'intéresse particulièrement à l'évolution des concepts de rationalité et de liberté. Depuis, il a continué d'écrire et de participer à des débats publics, abordant des sujets variés tels que la démocratie, le populisme, les défis écologiques et la justice sociale.