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Pulcinella
Polichinelle
Pulcinella. - Polichinelle, que l'on fait remonter sous son nom italien Pulcinella (bec de poulet) à Naples comme pays d'origine, a une plus grande antiquité. Il est certain que les Romains le connaissaient au temps de la République : il s'appelait alors Maccus, et les farces atellanes étaient pleines de ses exploits; on a retrouvé aux environs de Naples uns figurine de bronze antique qui représente Maccus sous la forme d'un personnage au long nez crochu, bossu par devant et par derrière. Polichinelle est donc un personnage antique et classique; il avait même déjà ce bredouillement caractéristique qu'il a conservé jusqu'à nous et qui le distingue des autres marionnettes; c'est son accent natal, car Maccus était né chez les Osques, peuple renommé par ses saillies spirituelles et mordantes; on jouait à Rome, sur le théâtre, des jeux osques, petites pièces qui, le matin, précédaient la grande pièce.

Dans la comédie italienne, Pulcinella, qui depuis est devenu une marionnette de bois, était un personnage, avec Pierrot, Arlequin, Colombine, le Docteur et Cassandre hâbleur, fat, cynique et dépravé, c'est un type d'effronterie. Le Pulcinella napolitain est un personnage au nez crochu en bec d'oiseau, grand et mince, sans bosses, vif et bruyant; il porte le demi-masque noir, un bonnet gris pyramidal, une camisole blanche sans fraise, un large pantalon blanc serré à la ceinture et plissé. Il berne Cassandre, dont la bêtise a égayé l'Italie pendant des siècles. Naples adorait son Polichinelle dont elle était plus fière que du tombeau de Virgile; on conte qu'un jour un prédicateur napolitain voyant l'église se vider pendant le sermon, le populaire courant assister aux bouffonneries de Polichinelle, tâcha de ramener son auditoire en brandissant le crucifix et criant : Ecco il vero Pulcinella, pieux artifice qui ne choqua pas le public napolitain.

En passant en France, Polichinelle a pris quelques caractères nouveaux. Devenu marionnette, il reste matamore, narquois, batailleur, fanfaron, et chante : 

« Quand je marche, la terre tremble. C'est moi qui conduis le soleil ». 
Son costume éclatant et bariolé, sa double bosse, son tricorne, ses jambes disloquées, font la joie des enfants: il porte le chapeau, la veste, la culotte mi-partie rouge et vert, galonnés d'or; une jambe rouge avec un bas vert, des sabots rouges recouverts de peau de mouton blanche; une manche verte à parements rouges, la perruque et la moustache blanches, le nez rouge, le menton et le front bourgeonnés, une collerette et des manchettes de dentelle. Son petit public ne se lasse pas de le voir battre sa femme, narguer ses créanciers, bâtonner le commissaire et pendre le bourreau. Il a gardé un accent spécial, grâce à la pratique dont se sert l'impresario qui le fait parler sur la scène du Guignol en plein vent : cette pratique est un petit morceau de tôle ou de fer-blanc, mince et sonore, placé dans la bouche et qui produit un son de voix grêle et criard. Avant d'être le héros principal des petites pièces enfantines, Polichinelle a été le comique obligé du théâtre de la Foire. D'Orneval, Fuzelier, etc., ont composé pour lui de petites pièces où il parodiait les héros des tragédies et des opéras nouveaux. Le mime Mazurier a, au XIXe siècle, redonné un corps à Polichinelle, et Champfleury dans ses originales pantomimes l'a fait reparaître sur la scène en chair et en os.

Les Allemands ont aussi leur Polichinelle; c'est Hanswurst (= Jean Boudin), bouffon qui se caractérise, au dire de Lessing, par sa voracité et sa balourdise. En Angleterre, il a pris un caractère original sous la forme à peine modifiée de Punchinello, devenu Punch, qui apparut à l'époque des Stuarts. C'est un vert-galant, tapageur et hâbleur, mais pas méchant, qu'a chanté Addison. Plus tard, il a pris une figure plus sombre. Il est devenu une sorte de Don Juan populaire, dont l'histoire fait le sujet du célèbre drame Punch and Judy (Punch et sa femme Judith) et est relatée dans une ballade populaire de 1795 dont le refrain est « Right tol de rol lol. ». Punch commet méfaits sur méfaits, tue sa femme, ses enfants, séduit toutes les dames, pend le bourreau et d'un coup de son bâton tue le vieil old Nick, le diable. Ce Punch scélérat, qui date du XVIIe siècle, subsiste à côté du Punch jovial et bon enfant. (Ph. B.).
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