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Attila

Attila, roi des Huns, fils de Moundzouk, et le plus redouté des chefs barbares lors des grandes invasions. Depuis l'année 442, où le meurtre de son frère Bléda lui laissa tout le pouvoir, jusqu'à l'année 453, où il mourut, la terreur de son nom ne cessa de s'accroître, et finit par lui valoir son surnom de Fléau de Dieu. L'effroi de la nouveauté a été pour beaucoup : un peuple à peine entrevu jusque-là se ruait sur le monde gréco-romain de l'Empire, entraînant, déplaçant ou détruisant ceux des Barbares que l'ancienne société était habituée à voir à côté d'elle, Goths, autres Germains, Slaves, etc. Le portrait qu'a laissé de lui Jornandes, qui lui attribue un nez épaté, des yeux petits et enfoncés dans une grosse tête, un teint basané, est sans doute plus représentatif de l'idée que se faisait l'auteur des Huns en général - ces Barbares des Barbares - que de la physionomie d'Attila, dont on ne sait que peu de choses au final. Au moins peut-on deviner que l'image de rejet qu'il inspirait aux sédentaires, devait être assez réciproque...

Attila fut le grand destructeur des villes, et l'oppresseur méprisant des empereurs. La platitude de Théodose le Jeune, qui lui envoya un titre de général romain avec une sorte de tribut, ne fit que l'enhardir davantage; et lorsqu'il eut achevé la soumission du monde barbare, dont les nombreux rois se trouvaient ses lieutenants, il ravagea l'empire d'Orient jusqu'aux Thermopyles. On ne l'arrêta que par le traité de Margus, qui lui livrait les transfuges réclamés par lui, et l'argent des sujets de l'empire. Pour se débarrasser de ce joug insupportable, la cour de Byzance imagina un complot d'une odieuse perfidie, que les ambassadeurs eux-mêmes dirigeaient contre la vie d'Attila. Le roi des Huns, qui entretenait partout une sorte de diplomatie secrète, avait en mains tous les fils de la conspiration. Le moment venu, il accabla les Byzantins de son mépris, et, sans trop se venger, les soumit à quelques nouvelles exigences. 

Attila ne songeait déjà plus beaucoup à l'Orient, et lorsqu'un nouvel empereur, le brave Marcien, lui fit dire qu'il avait de l'or pour ses amis et du fer pour ses ennemis, c'était déjà d'une invasion en Occident qu'Attila, mobile et changeant dans ses idées, se préoccupait. Il était appelé de ce côté par diverses causes, qui ne sont pas toutes bien connues. la soeur de Valentinien III Honoria, lui avait envoyé autrefois un anneau de fiançailles, sans qu'Attila se souciât d'elle, mais maintenant il réclamait une partie de l'Empire comme l'époux désigné d'une princesse; d'autre part, Genséric, roi des Vandales, qui avait ravagé l'Afrique romaine, lui faisait signe de ravager aussi la Gaule et l'Italie; enfin un prince franc et peut-être aussi des officiers romains l'appelaient pour venger leurs querelles. Quoi qu'il en soit, une immense armée se dirigea sur le Rhin, du côté de Bâle, pendant l'année 451. 

Toutes les villes de cette frontière furent dévastées, puis les cavaliers d'Attila pénétrèrent dans l'intérieur du pays. Il est difficile d'attribuer un plan de campagne précis : tout ce qu'on peut supposer, c'est que le roi des Huns voulait faire autant de butin que possible en Gaule, et ensuite aller renverser l'empereur d'Occident. Metz, Trèves, Tongres, Reims, furent les principales cités victimes. Les évêques s'insurgèrent contre ces raids, et par la suite, les propagateurs de la religion nouvellement maîtresse du monde romain surent habilement exploiter l'attitude courageuse des représentants de l'Église lors de cette campagne atroce dans leur propagande. Ainsi naquit à Paris, la légende de la bergère Geneviève, devenue sa patronne pour avoir, dit-on, déconseillé aux habitants de s'enfuir., ou la légende de saint Aignan, évêque d'Orléans, qui organisa la résistance contre les Huns jusqu'à l'arrivée d'une armée de secours. En effet le préfet Aétius, lui-même peut-être d'origine hunnique, avait réconcilié contre l'ennemi commun les rois germains de la Gaule, et il arrivait lui-même avec le Wisigoth Théodoric I pour repousser l'invasion...

C'est en Champagne, dans les champs catalauniques, qu'eut lieu la bataille décisive. Ce fut un des plus affreux massacres de l'Antiquité : le sang forma une rivière au pied d'un monticule que l'on se disputa. Attila vaincu se retira derrière son enceinte de chariots, et put repasser le Rhin. Il ne se reposa guère et, à travers les Alpes, vint assiéger Aquilée, qui fut détruite, comme sur son passage Augsbourg venait de l'être. C'est alors que les fuyards de la Vénétie fondèrent Venise dans les lagunes. Toute la partie inférieure du bassin du Pô éprouva la fureur des Huns, mais les succès partiels d'Aétius contre les lieutenants d'Attila, peut-être aussi la crainte de mourir subitement comme Alaric s'il venait à prendre Rome, et l'arrivée du pape saint Léon qui venait traiter de la paix, décidèrent de la délivrance de l'Italie. Attila passa les derniers mois de sa vie dans son palais de bois, sur les bords du Danube, non loin de l'actuelle Budapest, où il s'entourait d'un luxe pris de toutes parts, et d'où il dirigeait les chasses immenses auxquelles se complaisait ce peuple de cavaliers. La nuit qui suivit son mariage avec une nouvelle épouse, Ildico, il expira. 

Son empire ne put lui survivre. L'immense ébranlement causé par ces quelques années n'en a pas moins eu des conséquences durables pour la géographie de l'Europe centrale. Quatre siècles et demi après Attila, les Magyars installés dans la plaine du moyen Danube, revendiqueront encore l'héritage du roi des Huns. Une réhabilitation de celui qui avait été le Fléau de Dieu était en route. La poésie allemande du Moyen âge, elle-même, a couvert de ses broderies bienveillantes le portrait d'Attila (Niebelungen, Walther d'Aquitaine...). (Edouard Sayous). 

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Dictionnaire biographique
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