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Parodie (c.-à-d. contre-chant; du grec para, contre, et ôdè, chant). - Imitation burlesque d'un ouvrage sérieux. La parodie nous vient des Grecs; des érudits en ont attribué l'invention au poète Archiloque, ou à Nipponax; mais la Batrachomyomachie attribuée à Homère était déjà une parodie de l'Iliade. Le Cyclope d'Euripide parodiait le 9e chant de l'Odyssée. Les Silles [1] appartiennent au même genre de plaisanterie. Chez les Modernes, Berthelot parodia quelques belles strophes de Malherbe; Scarron travestit l'Enéide.
[1] Les silles (du grec sillos, sarcasme), sont vers mordants chez les anciens Grecs. Xénophane en avait composé contre tous les poètes et les philosophes de son temps. Timon de Phlionte et Didyme figurent aussi parmi les sillographes.
La parodie des ouvrages dramatiques remonte, dit-on, à Hégémon de Thasos, et celle-là surtout a prospéré : les comédies d'Aristophane sont remplies de traits où il parodie Eschyle et surtout Euripide. Mais les Anciens n'eurent pas de pièces parodiant d'autres pièces d'un bout à l'autre; ce genre de composition appartient aux Modernes. Si l'intention de la parodie peut être innocente, et même servir les intérêts de l'art en éclairant le public sur les défauts d'un ouvrage, elle a aussi des résultats regrettables : travestir, par exemple, une oeuvre dramatique, c'est lui enlever presque infailliblement le prestige qui tient aux illusions de la scène; on n'entend plus avec la même disposition d'esprit un langage dégradé par la parodie, on ne s'abandonne plus aux effets de situations dénaturées par le burlesque. Si la parodie n'est qu'une forme adoptée par la médiocrité envieuse pour avilir les productions du génie ou du talent, ou si elle s'attaque aux personnes, elle ne mérite que le mépris. 

Dans tous les cas, si elle a quelque esprit, on lui fait généralement accueil, parce qu'il est dans la nature ou dans le rôle de beaucoup de gens de ne rien admirer, et de n'être pas fâchés qu'on livre à leur risée, tout ce qui leur est supérieur. Au XVIIe siècle, Subligny donna, sous le nom de la Folle querelle, une parodie de l'Andromaque de Racine. Au XVIIIe, le Théâtre de la Foire et la Comédie-Italienne parodièrent la tragédie et l'opéra; Fuzelier, Dorneval, Favart, Lesage, Dominique, Romagnesi, se sont particulièrement distingués dans ce genre. On citera toujours comme modèles l'Agnès de Chaillot, parodie de l'Inès de Castro de Lamotte; le Mauvais ménage, parodie de la Marianne de Voltaire; la Petite Iphigénie ou les Rêveries renouvelées des Grecs, parodie d'Iphigénie en Tauride de Guimond de La Touche; les Petites Danaïdes de Désaugiers, parodie de l'opéra des Danaïdes; le Roi Lâ de Parisot, parodie du Roi Lear de Ducis. On peut ridiculiser, au lieu d'un ouvrage spécial, un genre tout entier; c'est ainsi qu'on a parodié le mélodrame dans le Retour du Croisé, ou la Femme innocente, malheureuse et persécutée.

La parodie n'a pas toujours l'importance d'un ouvrage complet : elle se borne souvent à employer dans un cadre différent les mêmes moyens dont on s'est servi pour arracher des larmes, à changer en bouffonnerie une pensée, un sentiment, une expression sérieuse. Ainsi, Racine, jouant sur un mot, a parodié un vers de Corneille, quand il appliquait à un huissier dans ses Plaideurs (1, 5) ce qu'on dit, dans le Cid (I, 1), du père de Rodrigue : 
Ses rides sur son front ont gravé ses exploits.
Racine et Boileau ont parodié quelques scènes du Cid dans leur Chapelain décoiffé.

La parodie s'est aussi exprimée en chansons, sur le ton burlesque et même grivois; Désaugiers a presque créé ce genre dans sa parodie de l'opéra la Vestale. La parodie est un genre assez facile. A la renaissance de l'esprit de société en France, au commencement du XIXe siècle, on usa et l'on abusa de la parodie : au XVIIIe siècle, on ne parodiait que les ouvrages sérieux, telles que les tragédies; sous le 1er Empire français, les parodistes s'en prirent même aux comédies; ainsi la comédie les Deux Gendres, par Étienne, fut parodiée dans un vaudeville intitulé Cadet Roussel beau-père. De notre temps, la liberté de l'esprit critique a fait tort à la parodie : elle paraît moins piquante, et l'on en use plus sobrement; elle ne se montre plus guère que dans certaines pièces en vaudevilles, jouées sur les théâtres secondaires au renouvellement de l'année, et dites Revues, parce qu'on y passe en revue certains événements, les modes, et surtout les principaux ouvrages dramatiques représentés sur les théâtres de Paris pendant le cours de l'an écoulé. Chacun a sa petite part dans cette parodie en bloc : c'est une espèce de carnaval littéraire, qui amuse quand il est spirituel, mais sans tirer à conséquence, car ses meilleures critiques et ses gaietés les mieux venues n'ont jamais fait tort à un ouvrage de quelque valeur.

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