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Histoire des arts décoratifs
Le style Louis XII
Louis XII fut roi de France de 1498 à 1515. Les guerres d'Italie mettent la France en rapport avec la renaissance des arts d'au delà des monts. Déjà, sous Charles VIII, les descriptions de costumes et d'intérieurs témoignent d'un grand raffinement dans le luxe de la vie privée. Claude Seyssel, dans son Éloge de Louis XII, parle du nombre de «-grands édifices tant publics que privés » que l'on bâtit par tout le royaume. Il constate que les maisons sont meublées de toutes choses plus somptueusement que jamais elles ne furent. L'ambassade de César Borgia en 1499 contribua à répandre parmi les seigneurs des glorioles de prodigalité qui se feront jour surtout sous François Ier à propos de l'entrevue du Camp du Drap d'or
« Devant César Borgia marchaient vingt-quatre mulets fort beaux, chargés de bahuts, coffres, valises, couverts de tapis avec les écussons dudit duc; après venaient vingt-quatre autres mulets avec des couvertures de rouge et jaune mi-parties, car ils portaient la livrée du roi qui était jaune et rouge; puis venaient dix mulets ayant couvertures de drap d'or, dont l'une était de drap d'or frisé et l'autre ras, qui font en tout soixante-dix par compte; après vinrent seize beaux grands coursiers, lesquels on tenait en main, couverts de drap d'or rouge et jaune; après cela venaient dix-huit pages chacun sur un beau coursier, dont seize étaient vêtus de velours cramoisi et les deux autres de drap d'or frisé. De plus par six laquais étaient menées, comme de ce temps on en usait fort, six belles mules, richement enharnachées de selles, brides, harnais tous complets, de velours cramoisi et les laquais vêtus de même; et après venaient deux mulets portant coffres et tout couverts de drap d'or. Puis après venaient trente gentilshommes vêtus de drap d'or et de drap d'argent. Item, il y avait trois ménétriers, c'est à savoir deux tambours et un rebec vêtus de drap d'or et aussi les instruments étaient d'argent avec des chaînes d'or et allaient lesdits ménétriers entre les gentilshommes et le duc sonnant toujours. Item quatre trompettes et clairons d'argent richement habillés sonnant toujours de leurs instruments. Il y avait aussi vingt-quatre laquais tous vêtus de velours cramoisi, mi-parti de soie jaune et étaient tous autour dudit duc [...] Il était monté sur un gros et grand coursier ferré d'or massif, harnaché fort richement avec une robe de satin rouge et de drap d'or mi-partie et brodée de force riches pierreries et grosses perles. A son bonnet étaient doubles rangs de cinq ou six rubis gros comme une grosse fève qui montraient une grande lueur. Sur le rebras de sa barrette il y avait aussi grande quantité de pierreries; jusques à ses bottes qui étaient toutes lardées de cordons d'or et bordées de perles et un collier qui valait bien trente mille ducats. Le cheval qu'il montait était tout chargé de feuilles d'or et couvert de bonne orfèvrerie, avec force perles et pierreries. Outre cela il avait une belle petite mule pour se promener par la ville, qui avait tout son harnais comme la selle, la bride et le poitrail tout couvert de roses de fin or épais d'un doigt. Et pour faire la queue de tout, il y avait encore vingt-quatre mulets avec des couvertures rouges ayant les armoiries dudit seigneur avec force carriage de chariots qui portaient force autres besognes, comme lits de campagne, de la vaisselle et autres choses. »
Au spectacle de ce luxe incroyable que nous décrit un auteur presque contemporain, on passa de l'étonnement à l'admiration, puis de l'admiration à l'imitation.

Dans l'architecture le style Louis XII, comme on peut en juger au château de Blois, dans des panneaux du château de Gaillon, du Louvre, dans le tombeau de Louis XII à Saint-Denis, est d'abord un mélange de la Renaissance qui commence et du gothique qui finit. Cette transition entre les deux styles est lente et progressive ; il y a encore beaucoup de gothique au château de Blois, il n'y en a plus au monument de Louis XII.

Les caractéristiques de l'ornementation sont une composition tranquille, discrète dans ses combinaisons de lignes, sans rien de tourmenté, de violent, d'accentué. Ce n'est pas la fougue débordante qui triomphera plus tard sous François Ier. La décoration est d'une sobriété délicate qui, au premier abord, n'est pas sans un peu de froideur. Ce style présente quelque analogie avec le style Élisabeth, style anglais de l'extrême fin du XVIe siècle, mais sans avoir la lourdeur des figures grimaçantes et des personnages à gaine. En effet la figure est presque absente du style Louis XII. Quand elle y paraît, animale ou humaine, il semble que l'artiste ait diminué à dessein son importance en lui ôtant toute expression et en lui donnant un rôle tellement secondaire dans la composition qu'elle n'a pas plus de vie que les détails floraux et les rinceaux déroulés. 

La figure, animale ou humaine, se restreint à une simple tête d'où part en arrière, comme d'un culot, un rinceau à tige filiforme, à feuillage menu et simple formant des ornements dont l'ensemble est facile à saisir au premier coup d'oeil. Ce décor qui orne les panneaux, les frises, les surfaces plates des pilastres (le style Louis XII emploie plus volontiers le pilastre que la colonne), a peu de reliefs, surcharge peu les fonds. On y voit figurer souvent des cartouches de forme simple et géométrique à découpures franches et peu compliquées, sans enroulements, sans ourlets. De petites bandes plates d'une largeur et d'un relief constants se mêlent aux floraisons, où les fruits et les guirlandes sont rares. La symétrie des deux côtés des motifs décoratifs est le plus souvent accentuée par une ligne droite verticale. (Paul Rouaix).

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Dictionnaire Architecture, arts plastiques et arts divers
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