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Fondée en 630 par Dagobert, réédifiée en 1144 par l'abbé Suger, la basilique-cathédrale (d'abord abbatiale) de Saint-Denis a été restaurée par Viollet-Le-Duc, en 1869. Le nom de cette église se rattache, selon les uns, à Denis l'Aréopagite (que l'on considère alors comme identique à Saint Denis de Paris) et daterait du Ier siècle, soit, plus vraisemblablement, au Denis martyrisé pendant la persécution de l'empereur Dèce au IIIe siècle. C'est un édifice très intéressant au point de vue historique plus encore qu'artistique. Le plan et les dispositions générales de la basilique ne diffèrent guère des premières cathédrales gothiques : la façade actuelle (reproduction incomplète de l'ancienne) présente trois portails à vantaux de bronze, des parapets crénelés, une tour romane à double étage, à droite (qui correspond à une tour bien plus belle, qui avait, avec sa flèche, 86 m et qui dut être démolie à la suite d'une restauration maladroite, sous Louis-Philippe); la nef n'a de chapelles qu'à droite; quatre tours inachevées s'élèvent au transept dont le portail Nord, à statues et statuettes, est surmonté d'une rose admirable; le rond-point est entouré de sept chapelles. L'intérieur est éclairé largement par des fenêtres hautes et sans triforium, mais les vitraux sont modernes et médiocres; quelques vitraux anciens subsistent aux chapelles du rond-point (en particulier, trois vitraux du XIIe s.) La longueur de l'église est de 108 m, sa hauteur sous voûte de 29 m; sous le choeur règne une crypte dont l'hémicycle central est carolingien. Façade occidentale de la basilique de Saint-Denis. Pendant douze siècles, la basilique de Saint-Denis a été la nécropole des rois de France; les mausolées vides de leurs cendres sont pour la plupart sans authenticité quelques-uns cependant subsistent et sont très intéressants pour l'art (le mausolée de Dagobert avec ses statues et bas-reliefs du XIIIe siècle : la statue de la reine Mathilde est une des plus belles parmi celles qui nous restent du Moyen âge; le mausolée de Louis XII et d'Anne de Bretagne, oeuvre des Juste, sculpteurs florentins, de 1517 à 1531: vingt statues y représentent les vertus cardinales, les apôtres et les défunts; le tombeau de Henri II et de Catherine de Médicis, de Pierre Lescot et de Germain Pilon; enfin le mausolée de François Ier de Philibert Delorme et Pierre Bontemps, une des plus belles productions de la Renaissance; un certain nombre de mausolées provenant d'autres églises ont été envoyés à Saint-Denis au cours du XIXe siècle. Le trésor de la basilique, dispersé en 1793, a été en partie reconstitué (il contient des objets liturgiques, des couronnes royales, un retable en cuivre ciselé du temps de Suger).
L'église et l'ancienne abbaye se sont élevées sur le terrain d'une villa nommée Catulliacum, du nom de la famille et de la femme qui la possédait : Catulla, étant parvenu à se procurer le corps de saint Denis et de ses diacres Rustique et Eleuthère décapités en 273 sur la colline de Montmartre, les ensevelit dans son jardin et bâtit un oratoire sur leur sépulture. A la fin du Ve siècle, sainte Geneviève fit, selon la tradition, élever une première basilique sur cet emplacement, et une communauté de prêtres se forma autour du sanctuaire qui ne tarda pas à grouper les habitants d'un bourg : le premier abbé mentionné est Dodon (627). L'intérieur de la basilique, et ses vitraux. Pépin le Bref commença une troisième basilique monumentale (754) qui fut terminée et consacrée par Charlemagne (775). La prospérité de l'abbaye était considérable dès cette époque : le monastère avait des possessions dans toutes les parties de la France, en Italie, en Alsace, en Flandre, en Angleterre. Dagobert avait institué dans la ville une foire, et Charles le Chauve y ajouta la foire célèbre appelée Indictum, d'ou le nom de Landit. Saint-Denis eut deux grands bienfaiteurs Suger et saint Louis. Suger devint en 1122 abbé de Saint-Denis et ne cessa d'accroître ses prérogatives et ses domaines pendant vingt-neuf ans; de 1132 à 1144, il fit reconstruire les travées inférieures de l'église avec un triple portail et développa dans tous les sens le choeur qui fut doté d'un rond-point et de chapelles rayonnantes, le transept fut refait et la nef surélevée : ces constructions magnifiques ont permis de dire que Suger fut un des fondateurs de l'art gothique. La basilique due à l'abbé Suger, le premier en date des édifices gothiques, fut encore une fois remaniée (de 1231 à 1281) avec la légèreté et les ressources de l'art ogival parvenu à son épanouissement; saint Louis favorisa cette reconstruction et fit élever à ses prédécesseurs des mausolées dignes de la sculpture du XIIIe siècle (par exemple celui de Dagobert); il combla l'abbaye de donations, et bientôt elle devint si riche et si florissante que plusieurs rois de France portèrent le titre d'abbé de Saint-Denis. C'est depuis saint Louis que l'église est devenue définitivement la sépulture des rois de France. Depuis le roi Louis-Philippe, la bannière rouge, oriflamme de Saint-Denis, devint la bannière des rois de France qui allaient la chercher à Saint-Denis avant de partir à la guerre : elle figura en dernier lieu à Azincourt.- Porte centrale de la basilique de Saint-Denis. Ci-dessous : détails des bas-reliefs. La prospérité de Saint-Denis se maintint pendant la Renaissance. Sous Charles VIII, le sculpteur italien Paganino exécuta un tombeau en cuivre où le roi était représenté à genoux; les mausolées de Louis d'Orléans et de Valentine de Milan, de Louis XII, de François Ier, par leurs grandes dimensions, occupèrent bientôt toute la place; Catherine de Médicis fit alors construire par Pierre Lescot, en dehors de l'église et contre le croisillon nord, une vaste rotonde pour le mausolée d'Henri II qui ne fut pas achevée par les Bourbons et que le régent eut le vandalisme de faire détruire en 1719 (on a recueilli au Louvre quelques-unes des magnifiques sculptures intérieures de Germain Pilon). Henri IV abjura dans la basilique le 25 juillet 1593, et Marie de Médicis y fut couronnée le 12 mai 1610, mais ils ne prirent pas de disposition pour leur sépulture. Louis XIV, hostile à l'abbaye, supprima le titre d'abbé et les revenus qui y étaient attachés en 1686, au profit de la maison d'éducation de Saint-Cyr qu'il dota de la sorte. Sous Louis XV, l'abbaye commença à être mutilée : la rotonde des Valois fut détruite; les bâtiments conventuels du XIIIe siècle furent lourdement reconstruits par Robert de Cotte dans un goût détestable, les portails de l'église furent mutilés par le même architecte. Louis XVI autorisa la destruction des tombeaux que les religieux trouvaient gênants pour la circulation (c.-à-d. du plus grand nombre). La Révolution acheva la destruction les tombeaux et objets d'art de Saint-Denis qui en faisaient depuis six siècles un musée d'architecture, de sculpture et de ciselure furent pillés ou brisés, les cendres des rois jetées au vent, les magnifiques verrières de saint Louis brisées. Le musée des Petits-Augustins, formé par Alexandre Lenoir, a sauvé un certain nombre de pièces. Napoléon Ier et surtout les Bourbons s'occupèrent de la Restauration de Saint-Denis, mais les mausolées entassés dans la crypte furent reconstitués au hasard; l'architecte Debret restaura la nef dans un mauvais gothique, abîma la façade et reconstruisit la flèche si mal qu'il fallut détruire la tour. Sous Napoléon Ill, la restauration de Viollet-le-Duc a rétabli dans une certaine mesure l'église et les tombeaux. La nécropole. Côté nord de l'église. 9e trouée (2e collatéral). Catherine de Courtenay. Louis de France, comte d'Artois, et Marguerite, sa femme. Contre le pilier qui sépare la 9e travée de la 10e et le 2ecollatéral du 1er, statue de Marie de Bourbon, abbesse de Poissy. En face, près du pilier adossé au mur, Charles de France, comte de Valois. Entre la 9e et la 10e travée. Blanche, femme de Philippe VI, et Blanche de France, sa fille. 10e travée (2e collatéral). Charles d'Anjou, roi de Sicile. Louis et Philippe d'Alençon. Blanche de France, fille de saint Louis. 10e travée (grande nef). Louis, fils de saint Louis. Philippe, frère de saint Louis. Transept. En entrant par le 2e collatéral : tombeau de Louis XII et d'Anne de Bretagne. Le roi et la reine sont représentés deux fois : nus et morts, sur le sarcophage; vivants et agenouillés, sur la plate-forme du tombeau. On y voit, entre autres bas-reliefs : l'entrée de Louis XII à Milan, le 6 octobre 1499; le passage des montagnes de Gênes, en avril 1507; la bataille d'Agnadel, gagnée sur les Vénitiens le 14 mai 1509. Ce magnifique tombeau a passé longtemps pour avoir été exécuté à Venise par Paul Ponce; il paraît certain aujourd'hui qu'il a été fait à Tours, sous la direction d'un Français, Jean Juste, et terminé dans cette ville en 1591. Tombeau d'Henri II et de Catherine de Médicis (dans le même croisillon). Chef-d'oeuvre admirable de Germain Pilon. Construit d'un beau marbre blanc, ce tombeau est orné de douze colonnes composites élevées sur un soubassement en forme de piédestal. Quatre ravissantes statues de bronze; qui représentent les quatre Vertus cardinales, et qui passent pour être chacune l'image d'une des maîtresses d'Henri II, sont placées aux angles. Au milieu gisent, morts et nus, Henri Il et Catherine de Médicis en marbre. Au-dessus de l'entablement, tous deux sont représentés une seconde fois vivante et à genoux, en bronze. Ils avaient autrefois, devant leurs mains, des prie-Dieu en bronze qui ont disparu. Au-delà du transept et dans l'axe de l'édifice, se trouve le maître-autel, aux côtés duquel deux petits escaliersdonnent accès vers l'abside ou choeur des reliques. On arrive également à cette partie de l'église par deux belles rampes de 16 marches. 1re travée du choeur : Philippe VI et Jean II. Philippe V, Charles IV et Jeanne d'Evreux. Blanche de France. Les gisants de Philippe V, Jeanne d'Evreux et Charles IV. 2e travée (choeur des reliques). Statues drapées d'Henri II et de Catherine de Médicis. Marie de Bourbon. Dans le 1erbas-côté du Nord et à gauche du grand autel se trouvent d'autres tombeaux : Robert d'Artois et Constance, sa femme. Louis le Hutin et Jean, son jeune fils (Jean Ier le Posthume). Henri Ier. Louis VI. Jeanne de Navarre, fille de Louis X. Clovis Ier. Childebert Ier. Carloman. Hermentrude, femme de Charles le Chauve. Philippe, fils de Philippe IV. Constance de Castille, épouse de Louis VII. Tombeau des ducs d'Orléans. 10e travée (2e collatéral). Vase renfermant le coeur de François Ier. Entre les deux collatéraux, Marguerite de Flandre. Entre la 10e travée et le transept (2e collatéral), tombeau de François Ier et de Claude de France. Ce monument, l'un des plus splendides de la Renaissance, a été commencé en 1552, sous la direction de Philibert Delorme. La partie sculpturale est l'oeuvre de Pierre Bontemps, d'Ambroise Perret, de Jacques Chantrel, de Pierre Bigoigne, de Bastile Galles et de Jean de Bourgy. Les bas-reliefs représentent les principaux faits militaires de François Ier : Marignan, Cérisoles, etc. Les figures agenouillées sur la plateforme sont celles de François Ier et de Claude de France, sa femme, du dauphin François et de Charles d'Orléans, leurs fils, de Charlotte de France, leur fille. Mausolée de François Ier et de Claude de France. Ci-dessous, détails du tombeau et, à droite, l'urne contenant le coeur de François Ier. Dans le 1e collatéral et dans le transept : Louis III et Carloman. Isabelle d'Aragon. Philippe III. Philippe IV. Clovis II. Charles Martel. Béatrix de Bourbon. Renée d'Orléans. 1re travée du choeur (2e collatéral auquel s'ajoute une chapelle du XVe s. qui déborde sur le transept) : Charles V et sa femme. Du Guesclin. Charles lI et Isabeau de Bavière. Ex-voto provenant de l'abbaye de Royaumont et offert à Notre-Dame par les sergents d'armes du roi, après la bataille de Bouvines. Dans la chapelle voisine, on peut admirer les magnifiques statues en marbre de Louis XVI (par Edme Gaulle, 1816) et de Marie-Antoinette (par Pierre Petitot, 1830). A droite du maître-autel, tombeau de Dagobert. La statue de ce roi, représenté mains jointes et couché, est moderne. Le reste du monument date du XIIIe s. Malgré les nombreuses dégradations qu'il a subies, ce tombeau passe, à juste titre, pour un des monuments les plus curieux du Moyen âge, comme oeuvre d'art et à cause du caractère allégorique de son ornementation. Le tombeau de Dagobert. 2e travée du choeur (entre la grande nef et le collatéral) : tombeau de Frédégonde, dalle tumulaire du VIIe s. provenant de l'abbaye de Saint-Germain des Prés de Paris. Les chapelles du choeur sont dédiées : celles de gauche, à Notre-Dame-la-Blanche, à saint Eustache, à saint Firmin, à sainte Osmanne, à saint Pérégrin; celle du centre, à la Vierge; celles de droite (en redescendant) à saint Cucuphas, à saint Eugène, à saint Louis (sacristie haute), à saint Hilaire, à saint Romain, à saint Benoît, à saint Jean-Baptiste. Cette dernière est aussi appelée chapelle des Charles. Deux seulement des chapelles absidales ont conservé leurs anciens vitraux intacts; trois sont du temps de Suger, et ils offrent, avec la figure de cet abbé, les légendes explicatives qu'il avait fournies pour les sujets, tous tirés de la vie de Moïse ou de l'Apocalypse. Ces vitraux brillent de teintes exquises, et les couleurs sont dans un état de conservation incroyable. La crypte. Un caveau central, éclairé et aéré par diverses ouvertures que Viollet-le-Duc y a fait pratiquer, renferme les cercueils de Louis XVIII, de Louis XVI, de Marie-Antoinette, de Louis VII et de Louise de Lorraine. C'est là que les rois, suivant l'antique cérémonial, devaient attendre leur successeur, avant d'être descendus, pour toujours, dans la grande salle funéraire , qui s'ouvre à quelques pas plus loin au fond d'une étroite galerie et contient les cénotaphes des Bourbons. On peut y voir notamment le coeur supposé de Louis XVII dans une ampoule, qui y est exposé depuis 2004. Ci-dessous : Chapiteaux historiés de la crypte; au centre : ampoule contenant le coeur supposé de Louis XVII. Photos : © Serge Jodra, 2011.
Diverses oeuvres d'art de plusieurs époques sont encore renfermées dans le déambulatoire et les chapelles de la crypte, notamment deux sarcophages mérovingiens, des pierres tombales (XIIIe et XIVe s.) de princes de la famille royale, des bustes d'Henri IV, de Marie de Médicis, de Louis XVIII (par Valois). Dans une autre partie de la crypte, se présente le caveau des Condés où repose le prince Louis-Henri-Joseph, mort le 27 août 1830. Il fut question, durant les dernières années du règne de Louis XVI, d'ériger dans la crypte une rotonde sépulcrale destinée à former le mausolée spécial de la dynastie des Bourbons. La Révolution empêcha seule l'exécution de ce malencontreux projet, qui eût occasionné des mutilations considérables. (A. Joanne).
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