| Théurgie (du grec théos, Dieu, et ergon, ouvrage). - Ce mot, qui signifie proprement opération divine, paraît avoir été introduit dans le vocabulaire philosophique et théologique par les Alexandrins. Il désigne l'ensemble des procédés par lesquels les humains peuvent se mettre effectivement en relation avec la divinité ou, plus généralement, avec les puissances surnaturelles. En ce sens, la magie elle-même peut être considérée comme une branche de la théurgie, laquelle dès lors contiendrait aussi bien l'évocation des morts et des démons que l'extase. Ou plutôt il y aurait lieu de distinguer une théurgie inférieure, à l'usage des magiciens et des sorciers, et une théurgie supérieure, réservée aux théologiens et aux philosophes. L'une et l'autre cependant reposent au fond sur le même postulat, à savoir qu'il existe des lois en vertu desquelles certaines conditions étant remplies, les puissances surnaturelles doivent nécessairement se révéler ou se communiquer aux humains, de telle sorte que la connaissance de ces lois donne à celui qui les possède, et qui peut et veut s'en servir, un véritable empire sur les forces du ciel et de l'enfer. On retrouve cette même idée au fond de beaucoup de cérémonies religieuses, et, par exemple, dans le catholicisme, la plupart des sacrements peuvent être considérés comme rentrant sous la formule de la théurgie, en particulier le sacrement de l'eucharistie, où le prêtre, par la vertu des paroles de la consécration, force en quelque sorte la divinité à venir s'enfermer sous les apparences du pain et du vin. (E. Boirac). La théurgie n'est en réalité que la philosophie occulte, cherchant à se mettre en rapport avec Dieu, d'une manière sensible, quand l'esprit ne sait pas encore ou ne peut plus s'élever jusqu'à lui par la pensée. Les Égyptiens, les Chaldéens, les Persans pratiquèrent la théurgie. Dans les derniers temps de la philosophie grecque, les Néoplatoniciens, qui se rattachaient à l'Orient, s'adonnèrent aux pratiques de la théurgie. Porphyre s'arrêta assez tôt sur cette pente pour se demander si la théurgie n'était pas le délire d'une âme religieuse qui fait de rien des montagnes. Après lui, Jamblique et ses successeurs la regardèrent comme le seul moyen de s'unir aux dieux. La philosophie devint pour eux la théurgie, et la science hiératique, si pratiquée en Égypte, remplaça les doctrines de Platon et de Plotin. Julien fut un sectateur ardent de la théurgie, aux secrets de laquelle il fut initié par Maxime, le théurge le plus renommé de son temps. Proclus semble considérer la théurgie plutôt comme la doctrine commune d'une école particulière que comme une croyance extravagante que quelques Alexandrins auraient partagée, et il attribue aux théurges plusieurs opinions sur des questions purement spéculatives, telles que la nature de Dieu et les hypostases divines. Cette opinion de Proclus rappelle celle des critiques qui rattachent la théurgie à certaines sectes de Gnostiques. (R.). | |