|
Le
khanat de Kokand (1709-1876), du nom de sa capitale, la ville de
Kokand, fut un État d'Asie centrale situé
dans la vallée de Fergana, en grande partie dans l'actuel Ouzbékistan.
Sa création et son développement sont marqués par des dynamiques politiques,
économiques, et culturelles qui en ont fait un centre majeur dans la région
jusqu'Ã son annexion par l'Empire russe.
Ce khanat fut fondé
vers 1709 par Shahrukh Beg, chef de la tribu Ming, issue des populations
turco-mongoles, et qui avait pris
le contrôle de la vallée de Fergana. Shahrukh s'autoproclama khan,
posant ainsi les bases de ce nouvel État qui allait prospérer durant
près de deux siècles. L'objectif initial du khanat était de protéger
les populations locales des attaques régulières de tribus nomades venues
des steppes environnantes. La position géographique de Kokand, au carrefour
de plusieurs routes commerciales, fut déterminante pour sa prospérité.
Le khanat devint rapidement un centre de commerce pour les caravanes qui
traversaient l'Asie centrale.
Sous le règne d'Erdene
Beg (fils de Shahrukh) et surtout d'Abd al-Karim Bek et de son fils Umar
Khan, le khanat de Kokand connut une période d'expansion territoriale
et de prospérité. Umar Khan (1798-1822), l'un des khans les plus notables,
est particulièrement connu pour ses réformes administratives et son mécénat
culturel. Il soutint la construction de nombreuses mosquées, madrasas
(écoles religieuses), et caravanserails. Il encouragea également la poésie
et les arts, et attira des poètes comme Nodira et Uvaysiy, qui contribuèrent
à l'essor culturel du khanat.
À son apogée, le
khanat de Kokand s'étendait sur un vaste territoire, de Tachkent
à l'ouest jusqu'aux montagnes du Pamir à l'est, couvrant également une
partie de l'actuel Kirghizistan
et du sud du Kazakhstan. Cette expansion
territoriale a permis au khanat de rivaliser avec les autres khanats d'Asie
centrale, notamment Boukhara et Khiva.
La vallée de Fergana était une région fertile et propice à l'agriculture,
ce qui permit au khanat de devenir un important producteur de coton, de
fruits, de céréales et de soie. Kokand se trouvait également sur la
Route de la Soie, permettant un commerce florissant
entre l'Asie centrale, la Chine, et le
Moyen-Orient. La ville devint un centre majeur pour la production de textiles
et de produits artisanaux. Le khanat développa même une monnaie, contribuant
à sa souveraineté économique et facilitant le commerce.
Malgré sa prospérité,
le khanat de Kokand fut régulièrement en proie à des conflits internes
et à des rivalités de succession. Ces luttes pour le pouvoir affaiblirent
progressivement l'autorité des khans. En outre, la situation géographique
de Kokand, à la frontière de plusieurs grands États rivaux, entraîna
de fréquents conflits pour le contrôle des territoires et des ressources.
Les khanats de Boukhara et de Khiva tentèrent à plusieurs reprises de
soumettre Kokand ou d'étendre leur influence sur la vallée de Fergana,
ce qui provoqua des guerres intermittentes et affaiblit la cohésion interne
du khanat.
Au XIXe
siècle, l'Empire russe, cherchant à étendre son influence en Asie
centrale, entama une série de campagnes militaires pour s'imposer dans
la région. Le khanat de Kokand, en position vulnérable, fut contraint
de reconnaître une certaine forme de vassalité envers la Russie
dans les années 1860. La présence russe devint de plus en plus influente,
et le khanat perdit progressivement son autonomie. En 1865, les forces
russes prirent le contrôle de Tachkent, une ville stratégique pour le
khanat. Le khan Khudayar Khan, qui régnait alors sur Kokand, tenta de
préserver son pouvoir en s'alliant avec les Russes, mais cela entraîna
un mécontentement parmi les nobles locaux et les citoyens. Une série
de révoltes éclatèrent contre Khudayar Khan, accusé de faiblesse et
de favoritisme envers les Russes.
Après une révolte
en 1875-1876, menée par Pulat Khan, un prétendant au trône, le khanat
sombra dans l'instabilité. Profitant de cette situation, les forces russes
prirent le contrôle total de Kokand en 1876. Le khanat de Kokand fut officiellement
dissous, et ses territoires furent annexés par l'Empire russe, devenant
une partie de l'oblast du Turkestan. Cette annexion marqua la fin de
l'indépendance politique de Kokand et l'intégration de la vallée
de Fergana dans la sphère d'influence russe. La région fut rapidement
transformée sous l'administration russe, avec une introduction de nouvelles
infrastructures, une modernisation forcée et une exploitation économique,
notamment pour la production de coton. |
|