|
Harold
Pinter est un dramaturge britannique
né le 10 octobre 1930 à Londres et décédé
le 24 décembre 2008. Il est reconnu comme l'un des dramaturges les plus
importants du XXe siècle, aux côtés
de figures comme Samuel Beckett et Tennessee
Williams. Son utilisation du langage et des silences est devenue une référence.
Sa capacité à évoquer des tensions invisibles et des rapports de pouvoir
subtils fait de lui un maître de la suggestion et de l'ambiguïté. Ses
œuvres littéraires autant que ses engagements politiques incarnent l'idée
que l'art peut à la fois refléter et questionner la société.
Harold Pinter grandit
dans le quartier populaire de Hackney à Londres. Fils unique d'une famille
juive d'origine portugaise et polonaise, il est confronté très tôt Ã
l'antisémitisme et au climat tendu des années précédant la Seconde
Guerre mondiale. En 1939, lors du Blitz, il est temporairement évacué
à la campagne, une expérience qui l'isole de sa famille et le marque
profondément. Il commence à s'intéresser au théâtre durant son adolescence
et, malgré une brève incursion à la Royal Academy of Dramatic Art (RADA),
il quitte rapidement cette école pour se lancer dans une carrière d'acteur
sous le pseudonyme de David Baron. Durant les années 1950, il travaille
pour des troupes de théâtre itinérantes en Angleterre.
En 1957, Pinter écrit
sa première pièce, The Room, une pièce en un acte qui aborde
les thèmes de l'insécurité et de la menace qui deviendront centraux
dans son Åoeuvre. Il enchaîne avec The Birthday Party (1958), sa
première pièce en trois actes, qui reçoit d'abord un accueil mitigé,
mais est aujourd'hui considérée comme une de ses oeuvres majeures. Dans
cette pièce, il met en scène des personnages ordinaires confrontés Ã
des situations absurdes, menaçantes, qui révèlent leurs failles psychologiques.
Harold Pinter devient
rapidement une figure centrale du théâtre britannique et international.
Ses pièces se distinguent par leur économie de moyens et leur intensité
dramatique, qui réside davantage dans les sous-entendus et les silences
que dans les actions. Parmi ses oeuvres les plus célèbres figurent :
• The
Caretaker (1960). - Cette pièce, l'une de ses plus connues, dépeint
la relation entre deux frères et un vagabond, et expose des dynamiques
de pouvoir subtiles et des jeux de manipulation.
• The Homecoming
(1964). - Une pièce provocatrice où un homme ramène sa femme dans sa
famille dysfonctionnelle. L'oeuvre questionne les structures familiales
et les rapports de pouvoir, tout en brouillant les frontières entre normalité
et déviance.
• Old Times
(1971). - Un triangle amoureux ambigu où les souvenirs de trois personnages
s'entremêlent et où la réalité reste insaisissable. La pièce aborde
la mémoire et le caractère éphémère de la vérité.
• Betrayal
(1978). - Inspirée par la propre expérience de Pinter, cette pièce,
racontée en ordre chronologique inversé, dévoile l'infidélité et l'ambiguïté
dans les relations humaines. Elle est l'une de ses oeuvres les plus personnelles
et universellement reconnues.
L'un des traits distinctifs
du style "pinterien" est son utilisation des pauses et des silences —
des moments où le non-dit pèse plus lourd que les paroles. Les dialogues
de Pinter sont volontiers laconiques et ambigus. Ils laissent planer un
sentiment de malaise. Il utilise également le langage comme un moyen de
domination et de manipulation, s'intéressant à la manière dont les mots
peuvent être employés pour cacher des vérités, pour intimider ou pour
soumettre.
Outre le théâtre,
Pinter a également travaillé pour le cinéma et la télévision. Il a
écrit des scénarios adaptés d'Åoeuvres littéraires célèbres.
Parmi ses adaptations on retiendra notamment The Servant (1963),
The Go-Between (1971) et The French Lieutenant’s Woman
(1981).
À partir des années
1970, Harold Pinter devient de plus en plus actif sur le plan politique.
Il critique ouvertement l'impérialisme américain, le régime de Margaret
Thatcher, et plus tard, la guerre en Irak.
Dans les années 1980 et 1990, il milite pour les droits
humains, s'attaquant aux politiques répressives de divers gouvernements
à travers le monde. Il utilise sa célébrité pour dénoncer les injustices,
et certains de ses discours, notamment celui qu'il prononcera lors de son
discours de Nobel, sont de véritables plaidoyers politiques. Dans les
années 1990, ses oeuvres théâtrales prennent un tournant encore plus
politique avec des pièces comme One for the Road et Mountain
Language, qui abordent directement des thèmes de répression, de torture
et de censure. Ces oeuvres marquent un changement par rapport à ses premières
pièces, en étant plus explicites dans leur message.
En 2005, Harold Pinter
reçoit le prix Nobel de littérature. Il est trop malade pour se rendre
en Suède, mais son discours, enregistré sous forme de vidéo, fait forte
impression. Dans ce discours passionné, Pinter dénonce vigoureusement
les abus de pouvoir, notamment ceux des États-Unis
et de la Grande-Bretagne, et appelle
à un examen critique de l'histoire récente. Son discours de Nobel reste
l'un des plus mémorables, marquant son attachement aux questions de justice
et de vérité. Harold Pinter meurt en 2008, à l'âge de 78 ans, des suites
d'un cancer. |
|