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Innocent XI

Innocent XI, Benoît Odelscalchi, est le 247e, pape. Il a été élu le 21 septembre 1676, et est mort le 12 août 1689. Il était né en 1611 à Come (duché de Milan) ou à  à Pesaro. D'une famille noble, il embrassa, suivant quelques-uns, la carrière des armes, mais la quitta certainement à l'âge de 20 ans, après une grave blessure. Il entra au service de l'Eglise, et y devint successivement protonotaire, président de la chambre apostolique, commissaire dans la province de la Marche et gouverneur de Macerata. Sous Innocent V, il fut créé cardinal (1647), envoyé comme légat à Ferrare et nommé évêque de Novare. 

La plupart des historiens s'accordent à louer la rigueur de ses moeurs, la droiture de ses intentions, l'élévation de ses sentiments et la fermeté de son caractère. Dès le commencement de son pontificat, il entreprit de rétablir la discipline ecclésiastique, de ramener le clergé aux études sérieuses, de réprimer quelques superstitions nuisibles à la religion, de condamner les casuistes, docteurs de morale relâchée, de réformer les abus qui s'étaient introduits dans l'Eglise et dans l'Etat, de diminuer les dépenses en abolissant les sinécures, d'asseoir l'impôt sur des bases équitables et de corriger les moeurs. Quelques-unes de ses ordonnances témoignent aussi de son manque de mesure; c'est ainsi que dans ses édits somptuaires, il enjoignit aux femmes, sous peine d'excommunication ipso facto, pour elles et leurs parents ou maris trop indulgents, de se couvrir d'étoffe non transparente le sein et les épaules jusqu'au cou, et les bras jusqu'aux poignets. Dès le commencement aussi, il entama contre Louis XIV une lutte qui dura jusqu'à sa mort, et dont les principaux objets furent la régale, la Déclaration du clergé de France et les franchises des ambassadeurs à Rome

A Rome, les ambassadeurs des puissances catholiques jouissaient de l'inviolabilité, non seulement pour leur palais, mais pour ce qu'on appelait leur quartier, c.-à-d. pour les rues et les places entourant ce palais : aucun officier de la police romaine n'y devait pénétrer; ce qui faisait de ces quartiers un asile recherché par tous les criminels. Jules II, Pie IV, Grégoire XIII, Sixte V avaient tenté de supprimer cet abus; leurs bulles ne furent pas exécutées. En ses premières réformes, Innocent avait ordonné aux gens de sa police d'aller partout où leurs fonctions le nécessiteraient. Pour alléger les charges de ses sujets, il avait de plus supprimé un autre privilège, en vertu duquel les ambassadeurs étaient exempts de droits d'entrée, pour tout ce qui était apporté à Rome en leur nom : occasion de nombreuses fraudes, préjudiciables aux finances des Etats de l'Eglise. Il obtint l'assentiment de tous les princes, à l'exception du roi de France, qui répondit qu'il ne s'était jamais réglé sur l'exemple des autres. violenté, dépouillé et menacé, s'empressa d'adhérer à la ligue que Guillaume d'Orange formait alors contre le roi de France. Déjà, en 1683, il avait traversé les desseins politiques de Louis XIV, en décidant Jean Sobieski à secourir Vienne assiégée par les Turcs, complices du roi.

Près de dix ans après, lorsque le conflit résultant de la Déclaration du clergé avait pris son caractère le plus acerbe, Innocent abolit de nouveau et péremptoirement les franchises des ambassadeurs, excommuniant ceux qui prétendaient les conserver (bref du 12 mai 1687). En France, le procureur général appela de ce bref au futur concile général. Louis XIV envoya à Rome le marquis de Lavardin, avec ordre exprès de braver ces ordonnances. Le marquis se présenta escorté de 400 gardes de la marine, 400 officiers volontaires, 200 hommes de livrée, tous armés. Quand les douaniers voulurent visiter ses bagages, il les menaça de leur couper le nez, et il prit possession de son palais, de son quartier et de l'église Saint-Louis-des-Français. Le pape mit l'interdit sur l'église et l'excommunia. 

Par représailles, un arrêt du parlement de Paris ordonna de s'assurer de la personne du nonce, en plaçant des gardes autour de son palais. Vers le même temps, le cardinal de Furstemberg, favorisé par Louis XIV, avait été élu par le chapitre de Cologne archevêque-électeur. Mais, en vertu du concordat germanique, le pape avait le droit de conférer l'évêché à l'élu, et il devait être confirmé par l'empereur pour l'électorat. Innocent s'entendit avec l'empereur pour récuser le cardinal et pour instituer en sa place Clément de Bavière, frère de l'archevêque décédé (octobre 1688). Louis XIV se vengea en saisissant le Comtat-Venaissin, après appel interjeté par le procureur général de tout ce que le pape pourrait faire au préjudice de Sa Majesté et des droits de sa couronne. Naturellement, le pape ainsi 

Dès le 17 février 1678, Innocent avait publié un décret condamnant un livre imprimé à Milan et intitulé Office de l'immaculée conception de la très sainte Vierge, nostra signora; un autre décret du 17 mars supprima un grand nombre d'indulgences. En 1679, il condamna comme propositiones laxorum moralistarum soixante-seize propositions extraites des écrits d'Escobar, Suarès et autres casuistes de la même école. Caulet, évêque de Pamiers, dont il releva l'appel au sujet de la régale, était un janséniste déclaré. Un acte de la Sacrée Congrégation de la Propagande, daté de 1684, défendit aux Jésuites de recevoir des novices. 

Les adversaires d'Innocent lui reprochaient, non seulement de n'avoir jamais prononcé aucune condamnation contre le Jansénisme, mais d'en avoir protégé les partisans. Les Jansénistes l'en louaient beaucoup et s'ingéniaient à répandre ses décrets en France; les Jésuites, de leur côté, l'accusaient d'être janséniste. Cette accusation fut reprise par Talon, dans le célèbre plaidoyer qu'il prononça contre Innocent le 23 janvier 1688. Un sûr moyen de plaire au roi était de parler et d'écrire contre Innocent. On ne le négligea pas; La Fontaine lui-même rima des épigrammes contre ce pape; Racine aussi dans son prologue d'Esther. Innocent avait réprouvé les violences de Louis XIV contre les Calvinistes, à raison des représailles qu'elles pouvaient provoquer contre les Catholiques dans les pays protestants, et parce que la contrainte lui semblait un très mauvais moyen de conversion, peut-être aussi un peu par rancune naturelle, le clergé de France ayant motivé sa Déclaration par la nécessité d'enlever aux hérétiques un de leurs arguments. Il n'approuva pas, comme on l'a prétendu, l'entreprise de Guillaume d'Orange contre son beau-père, mais il s'abstint de prendre la défense de Jacques.

Il faisait une pension à la reine Christine, réfugiée à Rome. (E.-H. V.).

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