|
. |
|
Jean de La Fontaine |
Aperçu | La vie de La Fontaine | Les contes et les fables |
Jean La Fontaine, l'inimitable fabuliste, est né à Château-Thierry le 7 ou le 8 juillet 1621 et est mort à Paris le 13 avril 1695. Il ne se fit remarquer, jusqu'à l'âge de 19 ans, que par une extrême insouciance. Son père, Charles de la Fontaine, maître des eaux et forêts, le mit, à Reims, au séminaire de Saint-Magloire, dépendant de la congrégation de l'Oratoire, dans l'intention de faire de lui un prêtre, mais la vocation manquait absolument et, après 18 mois, le jeune La Fontaine quitta la soutane sans avoir appris autre chose qu'un peu de latin et plusieurs histoires égrillardes qu'il devait plus tard mettre en vers. - Jean de la Fontaine (1621-1695), par Rigaud. Son père, très inquiet sur l'avenir d'un jeune homme qui lui paraissait tout à fait nul et dont les distractions faisaient la risée de tous ceux qui avaient l'occasion de le fréquenter, crut le rendre un peu plus sérieux en lui faisant épouser Marie Ericart, fille du lieutenant au bailliage de La Ferté-Milon (1647); après quoi, il lui transmit sa charge. Un jour, un officier, en garnison à Château-Thierry, déclama devant le futur poète, l'Ode de Malherbe sur la tentative d'assassinat commise en 1605 sur Henri IV. Ce fut, dit-on - mais ce n'est peut-être qu'une légende -, un trait de lumière : La Fontaine, enthousiasmé, sentit quelle était sa véritable vocation. A partir de ce moment, il se livra à l'étude des poètes antiques et surtout aux vieux écrivains français, des fabulistes français et des conteurs italiens. Mauvais administrateur et mauvais mari, il se hâta de vendre la charge et d'abandonner le foyer conjugal : il en vint même, si l'on en croit certaines anecdotes, à oublier qu'il eût été jamais marié. Quelques-uns de ses premiers essais ayant attiré l'attention de la duchesse de Bouillon, qui se trouvait à Château-Thierry, cette dame l'admit près d'elle, l'emmena à Paris et se, déclara sa protectrice : elle l'appelait son Fablier. A ce moment, il avait déjà joyeusement mangé une partie de « son fonds avec son revenu ». Durant cette première partie de sa carrière littéraire, La Fontaine se mêle aux sociétés du temps, et se confond avec les poètes précieux et les poètes libertins alors en vogue. Il adore Voiture et Benserade, mais il raffole surtout de Rabelais, de Marot, de Boccace; d'ailleurs, il en lit qui sont du Nord et qui sont du Midi : il aime tout et tous, il est Polyphile. La Fontaine, alors, est un bel esprit, mais un bel esprit gaulois. Il traduit l'Eunuque de Térence (1654), écrit une comédie, Clymène (vers 1659), un petit poème, Adonis, fait des petits vers, des épîtres, des ballades, des relations, des épigrammes, et déjà rêve à ses contes.
La Fontaine est présenté au surintendant Fouquet, qui le devina et le nomma son poète, aux appointements de 1000 livres, à condition d'en acquitter chaque quartier par une pièce de vers. Il célèbre son protecteur au temps de sa faveur (le Songe de Vaux) et le défendra noblement dans sa chute (Elégie aux Nymphes de Vaux, 1661; Ode au roi, 1663). Mais, déjà, le goût public s'est affiné : Molière et Boileau sont venus. La Fontaine se lie avec ces grands esprits, avec Racine encore à ses débuts. C'est l'époque où les quatre amis se réunissent dans le logis de la rue du Vieux-Colombier ou dans quelque cabaret à la mode. De cette féconde intimité sortira, en 1669, le joli roman (en prose entrecoupé de vers) les Amours de Psyché et de Cupidon. Quelques années après la chute de Fouquet, La Fontaine avait été recueilli par la duchesse de Bouillon, nièce de Mazarin; ses amis lui firent ensuite obtenir la charge de gentilhomme servant de la duchesse douairière d'Orléans dont il reçut une pension. Mais la première de ses deux protectrices fut exilée et la seconde vint à mourir; le poète reçut chez Mme de la Sablière une hospitalité qui allait durer vingt années. C'est ainsi qu'après une longue jeunesse (La Fontaine a quarante-trois ans) passée « chez les autres [...] à ne rien faire », que La Fontaine avait donc trouvé enfin sa voie, qui n'était point celle du poème, ni du théâtre, mais plutôt celle du conte.
Son véritable titre de gloire est son recueil de Fables (1668-1694), chefs-d'oeuvre inimitables dans lesquels on ne sait ce qui l'on doit le plus admirer, de la grâce pleine de variété dans le récit, de la simplicité du style, de l'harmonie prosodique, de la diversité des caractères, de la finesse pleine de bonhomie des appréciations, de la moralité des enseignements, ou de l'exactitude des observations; c'est un livre qui se trouve entre toutes les mains et qui a mérité d'être traduit ou imité dans toutes les langues. Les Fables, dès leur apparition, eurent pour elles le suffrage des gens de goût-: Boileau, Molière, Mme de Sévigné, etc. Elles n'obtinrent pourtant pas chez les contemporains de La Fontaine, vu la modestie du genre, tout le succès qu'elles méritaient. En dehors des Fables, dont le second recueil (liv. VII-XI) parut en 1678, et le troisième (livre XII) en 1694, La Fontaine donna, en 1671 et 1675, de nouveaux recueils de Contes. Il composa pour le théâtre des opéras : Daphné (1674); Galatée (1682); Astrée (1691); des comédies : le Florentin (1685) ; la Coupe enchantée, Je vous prends sans vert, Ragotin (avec Champmeslé); des poèmes : la Captivité de Saint-Malc (1673); le Quinquina (1682); Philémon et Baucis (1685); beaucoup de poésies, parmi lesquelles il faut noter la belle Epître à Huet et le Discours à Mme de La Sablière; quelques épigrammes, et aussi des poésies religieuses. Il nous reste encore de lui des Lettres, souvent charmantes, notamment celles adressées, en 1663, à Mme de La Fontaine, et celles à son ami Maucroix. On a tout dit sur le charme de ces petits récits, si vrais et si vivants, sur la variété presque homérique de cette « ample comédie à cent actes divers, et dont la scène est l'univers », sur le réalisme de l'observation, et l'art souverain qui transforme le sec apologue d'Esope et de Phèdre en un poème achevé. Signalons seulement deux qualités par lesquelles La Fontaine se place au-dessus des autres poètes de son temps. Sa versification est une des plus souples et des plus ingénieuses qu'ait jamais connues la langue française : l'auteur se joue avec un art infini dans la liberté des rythmes. De plus, La Fontaine est déjà lyrique, au sens moderne du mot : il sent et exprime vivement, il jouit avec délices du spectacle de la vie; il peint d'un trait pittoresque plantes, bêtes et gens; il aime la nature; il se met lui-même dans son oeuvre avec ses opinions et ses goûts. Boileau n'a cité ni La Fontaine ni la fable dans l'Art poétique. Il faut dire que rivaux dans leur candidature pour l'Académie française, ces deux grands poètes n'y entrèrent que difficilement, commun obstacle qu'on explique par l'esprit satirique de l'un et par la fidélité obstinée de l'autre pour son bienfaiteur en disgrâce, le surintendant Fouquet, auquel il a élevé dans ses vers un si honorable monument de reconnaissance : mais n'est-il point permis de penser que les Contes de La Fontaine, dont le meilleur n'est pas celui que Boileau a tant loué ( sa Dissertation sur Joconde), et peut-être aussi ses admirables apologues, où si souvent la satire frappe plus haut que ne l'est osé faire l'auteur du Lutrin, durent contribuer pour quelque part à la défaveur de l'émule du poète favori?
Louis XIV n'agréa le choix de l'Académie qui appelait La Fontaine à remplacer Colbert (2 mai 1684), que lorsqu'à son tour Boileau y dut succéder à M. de Bezons. Quelque méritées que fussent les louanges prodiguées avec candeur par La Fontaine à son prédécesseur, dans le discours d'étiquette, on ne peut se défendre d'une admiration profonde quand on songe qu'il les adressait aux mânes de ce même ministre, puissant dispensateur des grâces du monarque, et dont il n'avait reçu jamais que les dédains d'une injuste rigueur. Taine a admirablement analysé, dans un livre fameux, le caractère de La Fontaine. Pourtant, il ne faudrait pas exagérer le côté sensuel et égoïste du bonhomme, ni ses légendaires distractions, ni la prétendue lourdeur d'esprit qu'il montrait au public (d'après La Bruyère). Sans doute fut-il un coureur de jupons invétéré et un pique-assiette assumé. Mais La Fontaine ne connut ni l'ambition, ni l'avarice, ni l'hypocrisie; il aima profondément ses amis; il fut compatissant aux petits et aux faibles. Enfin, ce Paysan du Danube était doué de l'esprit le plus fin, et savait plaire, quand il voulait. En définitive, s'il avait été moins désinvolte, la vie de La Fontaine n'aurait pas loin d'être celle d'un honnête homme, comme on disait en son temps. En tout cas, ce titre lui conviendrait sûrement bien davantage qu'à nombre de ses contemporains qui se prévalaient d'une morale plus rigide. Dans ses dernières années, cédant, non sans combattre, aux pressantes sollicitations de l'abbé Poujet, il parut regretter les atteintes que ses Contes, très libres (et pourtant imprimés avec privilège) avaient pu porter aux moeurs et à la religion catholique, et il finit par se soumettre aux réparations qu'on lui prescrivit. Toutefois ces réparations qu'on imposa au bon vieillard lui durent être pénibles, quelle que fut sa repentance, si l'on en juge par l'apostrophe suivante qu'adressa (si l'on en croit la tradition) la servante de La Fontaine au jeune ecclésiastique attaché à le convaincre : "Eh! ne le tourmentez pas tant! il est plus bête que méchant;La Fontaine mourut à Paris le 13 avril 1695, dans la maison de Mme Hervard, dernier asile que lui offrit l'amitié après qu'il eut perdu Mme de la Sablière, chez qui, pendant tant d'années, il avait reçu la plus délicate et la plus généreuse hospitalité. (NLI / T.). -
Oeuvres. Parmi les oeuvres très variées de La Fontaine les principales sont : 1° Les Fables. - Livres I à VI (1668), VII à XI (1678), XII (1694).
|
. |
|
| |||||||||||||||||||||||||||||||
|