| On donne le nom d'échevins à des personnages qui apparaissent dans les documents au cours du VIIIe siècle; le nom latin scabini, sous lequel ils figurent dans les textes, est dérivé d'un ancien mot allemand qui signifie juger. Ce sont d'abord, semble-t-il, des hommes libres analogues aux rachimbourgs désignés pour participer aux plaids, mais bientôt la réforme de l'administration de la justice sous Charlemagne les substitue complètement aux rachimbourgs et les transforme en fonctionnaires royaux ayant la mission permanente de rendre la justice avec les comtes et les centeniers. Ils étaient nommés par les missi ou par les comtes avec la participation du peuple et semblent avoir exercé leur charge à vie, sauf le cas de révocation. Cette institution des échevins et cette organisation des tribunaux des comtés persista sans grand changement pendant toute la période carolingienne et se perpétua même, en se transformant, bien au delà. Lorsque s'organisa au cours du Xe siècle la justice seigneuriale, les tribunaux échevinaux, loin de disparaître, se multiplièrent au contraire et constituèrent la juridiction des non-nobles, paysans ou habitants des villes. Il semble que les populations furent en général très attachées à cette juridiction, si bien que la révolution communale eut, dans la plupart des villes, pour effet de transformer les échevins en magistrats municipaux et de leur conférer de nouvelles attributions. Dans quelques villes, cependant, le tribunal échevinal persista plus ou moins longtemps à côté des nouvelles magistratures. L'identité des échevins municipaux et des échevins carolingiens, longtemps contestée, est aujourd'hui admise par la plupart des historiens; beaucoup d'entre eux cependant persistent à désigner les scabini de l'époque carolingienne sous le nom de scabins, réservant le nom d'échevins pour les scabini municipaux. Ceux-ci continuèrent d'abord à être nommés à vie et par les seigneurs des villes où ils étaient établis, mais peu à peu, au cours du XIIe siècle, les habitants prirent à leur élection une part de plus en plus grande, et des réformes survenues, soit à la fin de ce siècle, soit dans la première moitié du suivant, transformèrent presque partout leurs charges en magistratures annuelles et électives. A l'imitation des villes qui avaient, eu un tribunal d'échevins avant de devenir des communes, certaines localités qui obtinrent une charte de commune donnèrent le nom d'échevins aux collèges de magistrats qu'elles créaient de toutes pièces. Dans les unes comme dans les autres, leurs attributions n'étaient pas restreintes à l'administration de la justice; il s'y joignait, bien entendu, les attributions administratives militaires et de police qui incombaient aux magistrats municipaux. Bientôt, dans le nord de la France particulièrement, des collèges d'échevins ou échevinages furent établis dans la plupart des villes et dans celles même qui n'avaient pas le rang de communes et ne possédaient pas de droits de justice. Depuis le XVe siècle, la monarchie ne cessa de créer des échevinages dans les localités qui en étaient dépourvues. Le nombre et les attributions des échevins ne furent jamais uniformément fixées pour tout le royaume. La haute justice fat enlevée aux villes au XVIe siècle, par les ordonnances de Moulins et de Blois, mais presque partout les échevinages conservèrent la juridiction de police et continuèrent à former un tribunal sous la présidence du maire ou du prévôt. Souvent les fonctions municipales étaient réparties entre les divers membres de l'échevinage; il y avait à cet égard, du reste, une infinie variété, et les règlements différaient de ville à ville. Au XVIIIe siècle, seulement, on se préoccupa de donner aux villes une administration uniforme; l'édit de Compiègne, du mois d'août 1764, fixa à quatre le nombre des échevins des bonnes villes, mais ses dispositions ne furent point généralement appliquées. Le titre d'échevin n'a pas survécu en France à l'Ancien régime. (A. G.). | |