| Abbaye de Port-Royal, à Paris (XIVe' arrondissement). - Cette abbaye avait été fondée en 1204 par Matthieu de Montmorency dans une vallée près de Chevreuse; comme elle était située dans un endroit marécageux et très malsain, elle fut transférée à Paris en 1625 dans une maison du faubourg Saint-Jacques, qu'on éleva avec les dons de la marquise de Sablé, de la princesse de Guémenée, de madame de Guénégaud et de plusieurs autres dames; mais l'ancienne maison, le Port-Royal des Champs, continua de subsister, et, ayant été rebâti, devint en 1669 une abbaye indépendante de la maison de Paris. On sait quelle célébrité Port-Royal des Champs acquit dans le XVIIe siècle par l'austérité et l'indépendance de ses opinions, comment il fut détruit en 1709 par la vengeance des jésuites, comment ses biens furent réunis à ceux de Port-Royal de Paris. Cette maison a eu une existence moins orageuse que celle de sa soeur : néanmoins, ses religieuses eurent aussi à souffrir, à cause de leur attachement aux doctrines des pieux solitaires dont le nom vivra autant que ceux des Arnaud, de Pascal et de Racine. Elle n'en fut pas moins, comme Port-Royal des Champs de la part de tous ceux qui l'avaient habité ou fréquenté, l'objet d'une vénération profonde et de l'amour le plus touchant, et plusieurs personnages célèbres se retirèrent « du service des rois de la terre pour servir le Roi des rois », dans le voisinage de cette illustre maison. Parmi eux on remarque le sieur de Pontis, l'auteur des Mémoires sur le règne de Louis XIII, qui y était enterré. C'est à Port-Royal que se retira et mourut madame de Sablé. C'est là que voulut être inhumée la duchesse de Fontanges, morte à vingt-deux ans en 1681. Pendant la Révolution, cette maison fut transformée en prison sous le nom de Port-Libre, et l'on y renferma la plupart des suspects du faubourg Saint-Germain, les vingt-sept fermiers-généraux, Malesherbes, Lechapelier, d'Espremesnil, le garde des sceaux Miromesnil, les princes de Rohan et de Saint-Maurice, mademoiselle de Sombreuil, les duchesses du Châtelet et de Grammont, etc. « Rien ne ressemblait moins à une prison, dit Riouffe; point de grilles, point de verroux; les portes n'étaient fermées que par un loquet. De la bonne société, excellente compagnie, des égards, des attentions pour les femmes; on aurait dit qu'on n'était qu'une même famille réunie dans un vaste château. » Il n'est pas de prison où l'on ait fait plus de madrigaux et de chansons. Un vieil acacia, sous lequel avaient pieusement rêvé les religieuses de Port-Royal, servait à couvrir les amours des détenus : « C'était le rendez-vous de la gaieté, dit le même historien; on s'y retirait après l'appel, et on y prenait le frais jusqu'à onze heures du soir. » Mais, après la loi du 22 prairial, Port-Libre devint, comme les autres prisons, « l'antichambre de la Conciergerie et du tribunal révolutionnaire. » La plupart des détenus n'en sortirent que pour aller à l'échafaud. - La prison de Port-Libre (Port-Royal). En 1796, Port-Royal devint l'hospice de la Maternité pour les enfants nouveaux-nés, et, en 1805, l'hôpital d'accouchement, c'est-à-dire l'un des plus tristes asiles de la misère humaine : il renfermait cinq cent quinze lits et recevait annuellement deux mille femmes enceintes. On l'appellait vulgairement la Bourbe, à cause du nom ancien de la rue voisine, absorbée aujourd'hui dans le boulevard de Port-Royal. A cet hôpital fut annexée une école pratique d'accouchement, où quatre-vingts élèves recevaient au XIXe siècle l'instruction nécessaire à la profession de sage-femme. C'est dans une des salles de cet hospice que le cadavre du maréchal Ney, fusillé à quelques pas de là, fut transporté. Le lieu correspond aujourd'hui à la maternité Port-Royal (clinique Baudelocque). (Th. Lavallée). | |