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La lettre J
Phonétique.
Le j, qui ne se distinguait pas de la voyelle i dans l'alphabet latin et qui est la dixième lettre du nôtre, est proprement le son consonne que l'i voyelle est susceptible de prendre devant une autre voyelle; en d'autres termes, c'est une de ces voyelles transformées sous l'influence d'une voyelle suivante auxquelles on a donné le nom de semi-voyelle.

Le sanscrit changeait l'i en la semi-voyelle correspondante toutes les fois que celui-là précédait une autre voyelle. En grec et en latin, le même changement n'était qu'éventuel et a dépendu sans doute, pour chaque cas particulier, de légères altérations des sons aptes à le subir dans la bouche de ceux que le hasard a faits les initiateurs de cette coutume phonétique. Dans tous les cas, le grec n'a pas affecté de signe particulier à la représentation de l'i semi-voyelle. Mais, comme il est constant que le proto-grec possédait ce son, il faut en conclure qu'il s'était éteint avant l'introduction de l'alphabet en Grèce.

En latin, ou bien l'i semi-voyelle (j) s'est conservé moyennant la chute de la consonne qui le précédait, comme dans major pour *magjor,*magior, et Jupiter pour *Djupiter, *Diupiter ou bien le j est tombé à la suite de cette consonne; exemple : duus dans biduus, etc., pour *djuus, *diuus, cf. dies, diu, etc.

Non seulement le français, en tenant compte du moins des emprunts d'origine savante, a gardé le j partout où le latin l'avait conservé lui-même; exemples : majeur (auprès de major), Jupiter, joindre (auprès de jungere), etc., mais il a continué pour son compte la consonantification de l'i (ou de l'e affaibli en i) devant une autre voyelle. Toutefois, en pareil cas, l'orthographe distingue entre le j d'origine latine et la semi-voyelle romane, en affectant à la représentation de celle-ci le g palatal ou chuintant, comme dans rage pour *rabje, auprès du latin rabies, cage pour cavje, auprès du latin cavea, d'où *cavia, etc. Dans ces exemples, d'ailleurs, la consonne précédant la semi-voyelle est tombée comme en latin. Ajoutons que, quand cette consonne est une forte, sous son influence le g palatal prend la forme de la forte correspondante, soit ch, comme dans notre mot ache pour *apche, *apje, auprès du latin apium. (Paul Regnaud).

Paléographie.
La lettre J est la plus moderne de tous les caractères de notre alphabet. Elle a été créée pour différencier le son consonne de l'i de l'i voyelle, distinction qui, dans l'écriture, n'est pas antérieure au XVIe siècle. C'est au grammairien lyonnais Meigret, qui publia en 1542 un Traité de l'écriture française, et qui avait en vue une notation phonétique plus exacte, qu'on attribue la distinction de l'i et du j. Il faut remarquer toutefois qu'il n'a pas inventé un caractère nouveau : l'i long dont il a fait le j était depuis longtemps en usage, mais cette notation était sans rapport aucun avec la prononciation. On a prétendu toutefois que dans certains manuscrits provençaux-catalans du XIVe siècle, la forme j avait été déjà réservée à la notation de l'i consonne. (GE).

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