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Tzvetan
Todorov
est un sémiologue et essayiste né le 1er
mars 1939 à Sofia (Bulgarie) et mort le le 7 février 2017 à Paris. Il
a abordé une grande variété de sujets dans ses oeuvres, allant de la
critique littéraire à la philosophie morale et politique, en passant
par l'analyse des idéologies et la réflexion sur l'histoire. Les contributions
théoriques de Todorov sont marquées par leur interdisciplinarité, leur
profondeur analytique et leur engagement éthique
Todorov grandit Ã
Sofia. Son père, Tzvetan Todorov senior, est libraire et imprimeur, ce
qui expose le jeune Todorov à une riche culture littéraire dès son plus
jeune âge. Il poursuit des études de philologie à l'université de Sofia,
où il s'intéresse particulièrement à la littérature et à la linguistique.
En 1963, il obtient son diplôme et décide de quitter la Bulgarie
pour des raisons politiques et intellectuelles, cherchant à échapper
au régime communiste qui règne alors.
Todorov émigre en
France et s'installe à Paris. Il s'inscrit à l'École pratique des hautes
études, où il commence à travailler sous la direction de Roland
Barthes, une figure majeure de la critique littéraire structurale.
Il publie en 1966 sa première grande œuvre en français, une traduction
et une introduction à la pensée de Mikhaïl Bakhtine, intitulée Théorie
de la littérature. Cette publication le met en contact avec les cercles
intellectuels parisiens.
En 1968, Todorov
devient directeur de recherche au CNRS (Centre national de la recherche
scientifique) et commence à développer ses propres théories littéraires,
influencées par le structuralisme, le
formalisme russe et la sémiotique. Deux ans plus tard, il publie Introduction
à la littérature fantastique, où il établit une définition précise
du genre fantastique et en analyse les mécanismes. Ce travail le consacre
comme un critique littéraire de premier plan. En 1971, sa Poétique
de la prose, où il analyse les structures narratives et les techniques
littéraires, se présente comme une autre oeuvre majeure qui renforce
sa réputation dans le domaine des études littéraires.
Entre 1973 et 1978,
Todorov continue à publier des travaux influents, notamment La Grammaire
du Décaméron (1973) et Symbolisme et interprétation (1978).
Il commence également à s'intéresser de plus en plus aux questions de
la philosophie morale et politique. Une orientation qui préfigure ses
travaux ultérieurs. En attendant, Todorov s'est imposé comme une figure
centrale du structuralisme.
• Introduction
à la littérature fantastique (1970) propose une définition du genre
fantastique comme un moment d'incertitude entre le naturel et le surnaturel,
où ni l'explication rationnelle ni l'explication surnaturelle ne prévalent
totalement. Cette incertitude crée une tension qui caractérise le fantastique.
• Poétique
de la prose (1971) et Grammaire du Décaméron (1972) analysent
les structures narratives afin de dégager les règles et les conventions
qui sous-tendent les récits littéraires. Todorov distingue plusieurs
niveaux de récit (histoire, discours, etc.) et propose des modèles pour
leur analyse.
• Théories
du symbole (1977) traite dess différentes conceptions du symbole Ã
travers l'histoire, de l'Antiquité à nos jours, et propose une typologie
des symboles. Todorov analyse comment les symboles fonctionnent dans la
littérature et la culture.
Sa trajectoire intellectuelle
ne va pas cesser de se marquer par une constante ouverture à l'interdisciplinarité
et une volonté de comprendre les mécanismes sous-jacents aux phénomènes
culturels et sociaux. Il commence, à la fin des années 1970 et tout au
long des années 1980 à élargir ses recherches à des domaines plus variés,
notamment l'histoire des idées et la critique des idéologies. En 1984,
Todorov devient directeur du Centre de recherches sur les arts et le langage
(CRAL) au CNRS, un poste qu'il occupe jusqu'en 1987. Un emploi qui l'amène
à interagir avec divers penseurs et disciplines. Citons parmi les travaux
de cette période :
• Mikhaïl
Bakhtine : le principe dialogique (1979) consolide les études de Todorov
sur le philosophe russe à travers l'examen du dialogue en tant que principe
fondamental de la communication et de la culture.
• La conquête
de l'Amérique : la question de l'autre (1982) est une analyse
des rencontres entre les Européens et les Amérindiens, qui aborde les
dynamiques du pouvoir et de la colonisation et de l'altérité. Todorov
montre comment les Européens ont construit l'image de l'autre et justifié
la colonisation. Cette oeuvre marque un tournant vers des sujets plus historiques
et anthropologiques.
• Nous et les
autres : la réflexion française sur la diversité humaine (1989)
est, une analyse des discours sur la diversité culturelle en France. Todorov
y examine comment les sociétés perçoivent et traitent les différences
culturelles.Il y critique les simplifications et les stéréotypes.
Les années 1990 et
2000 vont être des années d'engagements philosophiques et politiques.
• Face
à l'extrême (1991) est une réflexion sur les comportements humains
dans les situations extrêmes, comme les camps de concentration nazis et
les goulags soviétiques. Cette oeuvre montre son intérêt croissant pour
la philosophie morale.
• Éloge
du quotidien : Essai sur la peinture hollandaise du XVIIe
siècle ( 1993) est un essai sur la représentation du quotidien dans
la peinture hollandaise, marquant une incursion dans l'histoire de l'art.
• Les abus de
la mémoire (1995) examine comment la mémoire historique peut être
manipulée à des fins politiques ou idéologiques. Todorov met en garde
contre les dangers d'une mémoire sélective et instrumentalisée.
• L'homme
dépaysé (1996) livre une réflexion autobiographique sur le
déracinement et l'expérience de l'exil.
• Mémoire du
mal, tentation du bien (2000) est un ouvrage où Todorov médite sur
les leçons du XXe siècle Il examine les
horreurs des idéologies totalitaires et les dangers des utopies.
Au cours de ses dernières
années, Todorov a continué à écrire et à intervenir dans les débats
publics, publiant des ouvrages comme Les ennemis intimes de la démocratie
(2012) et Insoumis (2015), où il s'attaque aux dérives de la démocratie
contemporaine et plaide pour une éthique de la résistance face aux injustices.
Il se montre défenseur de l'esprit des Lumières.
• Le
jardin imparfait (2002) est une défense des valeurs humanistes et
des Lumières face aux défis contemporains, où Todorov plaide pour un
humanisme modéré et critique.
• Le nouvel
ordre mondial : réflexions d'un Européen (2003) critique l'unilatéralisme
américain post-11 septembre. L'auteur prône une Europe plus autonome
et humaniste.
• L'esprit des
Lumières (2006) défend les principes de la raison, de la tolérance
et de l'humanisme des Lumières, les opposant aux nouvelles formes d'intolérance
et de fanatisme. Il critique affirme la pertinence des valeurs des Lumières
aujourd'hui.
• La peur des
barbares : au-delà du choc des civilisations (2009) analyse la peur
de l'autre dans le contexte post-11 septembre et critique les politiques
qui en découlent. Todorov plaide pour un humanisme modéré et critique,
s'opposant aux extrémismes de tous bords.
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