| Dêvî (déesse en sanscrit), un des noms de l'épouse de Shiva (Hindouisme) considérée comme une divinité à part, appelée aussi Dourgâ (de difficile abord), Chandikâ (furieuse ou victorieuse de Chanda), Kâli (noire). Elle est, pour ses dévots, la divinité toute-puissante qui crée, conserve et détruit, détruit surtout, mais ne détruit que les monstres et les fléaux. Elle peut, à son gré, se renforcer en absorbant en elle l'énergie des autres dieux ou se multiplier en faisant émerger d'elle-même des divinités auxiliaires. Plusieurs écrits shivaïtes, consacrés à la glorification de cette déesse, portent le nom de Dêvîmâhâtmyam (= grandeur de Dêvî). Le plus important se trouve dans le Mârkandeya-purâna. Il attribue à Dêvî une part dans la victoire de Vishnou sur les géants Madhou et Kaitabhou. - Dêvî, sur la façade du Temple d'Or, à Pashupatinath (Népal). Photo : © Serge Jodra, 2011. C'est elle aussi qui, à l'appel de Vishnou imploré par les dieux, défit leur oppresseur Mahicha et le tua, malgré les formes diverses qu'il savait prendre comme Protée. Voici l'apalyse de cet épisode, d'après Burnouf : A la fin d'un kalpa, ou d'un des grands âges de l'univers, pendant que Vishnou dormait étendu sur le serpent Sécha, deux géants, nommés Kaitabha et Madhou, cherchèrent à détrôner Brahma. Celui-ci, du haut du lotus où il était assis, appela à son secours Dêvî, qui lui apparut et réveilla Vishnou. Le dieu attaqua les géants, qui, frappés de terreur par Dêvî, tombèrent et périrent sous ses coups. Plus tard, un démon nommé Mahicha détrôna les dieux et les chassa du ciel. Les vaincus se présentèrent devant Vishnou qui, à la nouvelle de leur défaite, poussa un grand cri et fit retentir sa conque; la redoutable Dêvî apparut, concentrant en elle la puissance de tous les dieux ensemble, car chacun d'eux composait une partie de son corps; elle s'avança au-devant de Mahicha, terrassa l'armée ennemie et la mit en déroute. A la vue de ses troupes en désordre, l'Asoura se précipita sur l'armée de la déesse, et un instant y porta le trouble; mais Dêvî lui lança une chaîne, dans les replis de laquelle elle l'enlaça fortement. Le démon lui échappe cependant en changeant de forme; il devient lion, puis homme, puis éléphant enfin contraint de reprendre sa première forme, il tombe sous les coups de Dêvî qui lui tranche la tête. Une autre rois, les dieux; vaincus de nouveau par deux autres démons, se rassemblèrent autour du mont Himalaya, sur lequel Dêvî avait fixé son séjour, et la supplièrent de leur accorder son appui bienveillant. Soumbha, l'un des Asouras, qui avait vu la déesse, envoya un ambassadeur lui faire des propositions de mariage; mais rebuté par elle, il appela à son secours Dhoumra-Lotchana, autre démon, et lui ordonna de s'emparer de Dêvî; Dhoumra-Lotchana lui livre un combat dans lequel il trouve la mort. En vain Soumbha renouvelle, ses tentatives. en faisant fondre contre elle les Asouras Chanda et Moundu , la déesse leur tranche encore la tête. Soumbha se prépare de nouveau au combat; les épouses de Brahma, d'lsa, de Kartika, de Vishnou et d'lndra, s'incarnent et arrivent au secours de la déesse. Dêvî lutte contre le démon Raktavidja, et le met à mort; elle livre ensuite le combat à Nisoumbha, frère de Soumhha; elle le tue et met en fuite, toute l'armée ennemie. Soumbha, furieux de tant de défaites, ne s'avoue pas encore vaincu; il crie à la déesse : « Ne t'enorgueillis pas, ô Dêvî, de tes succès; tu triomphes, mais tu n'es pas seule, et d'autres que toi ont part à la victoire. » La déesse répond : « Je suis seule dans le monde; quel autre que moi existe dans l'univers? Regarde et vois ces forces diverses rentrer dans mon sein. » A ces mots, les forces des dieux sont absorbées par Dêvî, et la déesse reste seule en face de l'Asoura. « Me voilà seule, s'écrie-t-elle; avance et combats. » Une lutte terrible s'engage. Enfin, la déesse terrasse le démon et le perce de son glaive. Les, dieux, sous la conduite d'Agni, s'avancèrent en chantant un hymne en l'honneur de la déesse. Satisfaite de leurs éloges, elle leur promit qu'elle exaucerait leurs voeux. Les dieux demandèrent la paix pour les trois mondes; Dêvî se rendit à leurs prières, prédit ses apparitions futures, et énuméra les récompenses qui attendaient ceux qui seraient fidèles à son culte. La représentation la plus simple de Dêvî est une femme à quatre bras, à la longue chevelure et au corps bleuâtre, tenant généralement sous ses pieds un ennemi terrassé et porteuse d'armes diverses, entre autres du trident de Shiva. Mais il en existe des représentations plus complexes. (L. Feer / A19). | |