| II faut chercher dans les travaux des moines du Moyen âge les premiers monuments de la sculpture allemande : ce sont des devants d'autels, des reliquaires, des vases sacrés, des ivoires, recouverts de figures ou d'ornements. Parmi les oeuvres les plus anciennes, on doit citer : la couverture de l'Évangéliaire de l'abbaye de St-Emeran à Ratisbonne, exécutée sous le règne d'Othon II, et que l'on conserve à la bibliothèque de Munich; le parement d'autel en or, donné par Henri II à la cathédrale de Bâle, et la couverture d'un évangéliaire du même prince (aujourd'hui à Munich); un calice de l'abbaye de Weingarten en Souabe, par Conrad de Muse; un autre calice du XIIe siècle, conservé dans le Trésor de la cathédrale de Mayence. Les Allemands excellaient principalement dans la fonte des métaux, et, dès le Xe et le XIe siècle, il est fait mention de colonnes et de portes coulées en bronze. Mais la grande statuaire avait encore fait peu de progrès jusqu'au règne de la maison de Souabe. Des rapports multipliés qui s'établirent alors entre l'Allemagne et l'Italie, il résulta un échange fécond d'idées : tandis que des artistes allemands travaillaient à l'église de St'-François d'Assise et à la cathédrale d'Orviéto, et qu'un maître de Cologne exécutait à Florence des sculptures, aujourd'hui détruites, mais qui firent l'admiration de Ghiberti lui-même, les artistes de l'Italie se répandaient dans l'Allemagne méridionale, surtout en Souabe. La pierre, le bronze, et principalement le bois, furent employés par les sculpteurs des XIIe, XIIIe et XIVe siècles, dont une foule de statues, de tabernacles, de calvaires, de chaires, de stalles, etc., attestent le merveilleux talent. De tous ces artistes, les seuls à peu près dont les noms ont été transmis jusqu'à nous sont Jean de Cologne, Bertold d'Isenach et Sabine de Steinbach. Parmi les oeuvres anonymes, on remarque la statue colossale de Rodolphe IV à Neustadt, le portail de l'église St Laurent et les sculptures de l'hôtel de ville à Nuremberg, le baptistère en cuivre de St-Sébald dans la même ville, le maître-autel de la cathédrale de Marbourg, les sculptures de la Chartreuse de Buxheim, les tombeaux de la cathédrale d'insprück et de l'église St-Barthélemy à Francfort, le tombeau en bronze de Rodolphe de Souabe à Mersebourg, le tabernacle et le baptistère de Lubeck, la table d'or de Lunebourg, le Calvaire de Spire, etc. Au XVe siècle, Jean Syrlin sculpta les stalles et les autels de la cathédrale d'Ulm; Henri Eichlern, la chaire de l'église Ste-Anne à Augsbourg; Jean Creitz, le tabernacle de Nordlingen; Nicolas de Haguenau, le maître-autel de Strasbourg; Nicolas Lersch, le tombeau de l'empereur Frédéric III dans la cathédrale de Vienne. Nuremberg, où déjà, au siècle précédent, les frères Ruprecht et Sébald Schonhoffer avaient élevé l'admirable fontaine de Ste-Marie, produisait toute une école d'habiles sculpteurs: Jean Decker exécutait un Jugement dernier, une Passion et une Descente de croix: Adam Kraff bâtissait la chapelle St-Laurent, et y sculptait en bois la Passion; Veit Stoss et Sébastien Lindenast se distinguaient comme fondeurs. Mais Pierre Vischer s'éleva au-dessus de tous : la grille de la maison de, ville, le mausolée de l'évêque Ernest de Magdebourg, le Crucifiement de l'église St -Gilles, et surtout le tombeau de St Sébald, le placent au premier rang des sculpteurs allemands du Moyen âge. Le luthéranisme arrêta le développement de la sculpture, auxiliaire de l'architecture religieuse.; de nouveaux iconoclastes brisèrent. ou fondirent les statues; les pieux simulacres disparurent des temples protestants, et les pays catholiques, agités et appauvris par les guerres de religion, ne purent s'appliquer aux beaux-arts. Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, la sculpture allemande, privée d'élan et de spontanéité, se traîna sur les traces de l'école italienne dégénérée, et le seul artiste qui ait mérité sa réputation fut le Tyrolien Mathieu Collin, auteur du tombeau de l'archiduc Maximilien d'Autrice à Salzbourg. (B.). | |