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Richard Rorty

Richard Rorty est un philosophe né le 4 octobre 1931 à New York et mort le 8 juin 2007 à Palo Alto (Californie). Il a avoir redéfini les contours de la philosophie pragmatique en la combinant avec des éléments de la philosophie continentale et en rejetant les dichotomies traditionnelles telles que l'objectivité et la subjectivité. 
Son rejet de la quête de vérités absolues au profit d'une philosophie plus pragmatique et contextualisée a eu un impact profond sur la philosophie analytique et la théorie critique. Il est aujourd'hui considéré comme une figure clé du pragmatisme néo-socratique et post-analytique, et son influence continue à se faire sentir dans de nombreux domaines académiques et intellectuels. 

Richard McKay Rorty naît dans une famille intellectuelle. Ses parents, James et Winifred Rorty, sont tous deux écrivains et militants politiques. Dans les années 1940, il est exposé très jeune aux idées progressistes et à la philosophie par l'influence de sa famille. Il fréquente des écoles où l'enseignement est centré sur des approches expérimentales et progressistes. En 1946, il part étudier à l'université de Chicago, où il obtient un Bachelor of Arts en 1949. Pendant ses études à Chicago, il est influencé par le pragmatisme et commence à s'intéresser à la philosophie analytique. Après avoir obtenu son diplôme de premier cycle, Rorty poursuit ses études à l'université Yale, où il obtient une maîtrise en philosophie en 1952.

Rorty effectue son service militaire dans l'armée américaine de 1952 à 1956. Pendant cette période, il continue de lire et de réfléchir à la philosophie. Il retourne ensuite à Yale pour poursuivre son doctorat en philosophie, qu'il obtient en 1956 avec une thèse intitulée The Concept of Potentiality. De 1956 à 1958, il enseigne  à l'université de Wellesley, pui obtient un poste à l'université de Princeton, où il enseigne jusqu'en 1982. Pendant cette période, il se concentre sur la philosophie analytique et la philosophie du langage, dans le sillage de penseurs comme Ludwig Wittgenstein, Willard Van Orman Quine et Wilfrid Sellars.

Durant les années 1960, Rorty publie plusieurs articles sur la philosophie de l'esprit et la philosophie analytique. Il commence à se détacher progressivement de la philosophie analytique traditionnelle, influencé par ses lectures de philosophes continentaux comme Martin Heidegger et John Dewey. Il contribue en 1967 à un ouvrage intitulé The Linguistic Turn, qui est une collection d'essais sur la philosophie du langage. Cette publication est significative car elle met en lumière les débats et les développements en cours dans la philosophie analytique, tout en marquant le début de son propre tournant vers une approche plus pragmatiste et post-analytique.

Rorty commence à développer sa critique de la philosophie traditionnelle, prônant un retour au pragmatisme et une réévaluation du rôle de la philosophie dans la société. Il s'oppose à l'idée que la philosophie peut fournir une fondation ultime pour la connaissance et la vérité. Dès 1971, il commence à travailler sur les idées qui deviendront plus tard les fondements de son ouvrage majeur, Philosophy and the Mirror of Nature, qu'il publiera finalement en 1979. Ce livre critique les concepts traditionnels de la représentation et de la connaissance en philosophie. Rorty y soutient que la vérité doit être considérée comme une construction sociale et linguistique. L'ouvrage a un impact majeur sur la philosophie contemporaine et marque un tournant vers le postmodernisme et le pragmatisme.

• Philosophy and the Mirror of Nature (1979). - Ce livre représente un tournant crucial dans la philosophie contemporaine, proposant une critique radicale de la tradition philosophique occidentale, en particulier de la philosophie analytique et de l'épistémologie. Rorty rejette l'idée que la connaissance est une représentation fidèle de la réalité. Il critique ce qu'il appelle le mythe de la représentation, une conception selon laquelle l'esprit humain fonctionne comme un miroir reflétant le monde extérieur. Pour Rorty, cette métaphore est problématique et doit être abandonnée. Il soutient que l'épistémologie traditionnelle, qui cherche des fondations solides pour la connaissance, est une entreprise inutile. Il critique les tentatives de la philosophie de garantir la certitude ou de trouver des bases indubitables pour la connaissance. Influencé par les pragmatistes américains comme John Dewey, Rorty propose une alternative pragmatiste. Il défend une vision anti-fondationaliste, où les croyances sont justifiées non pas par leur correspondance avec une réalité objective, mais par leur utilité et leur capacité à résoudre des problèmes pratiques. L'auteur voit la philosophie non pas comme une discipline capable de découvrir des vérités absolues, mais comme une conversation continue au sein de la culture. Il souligne l'importance du dialogue et de l'échange d'idées sans la nécessité de parvenir à un consensus final ou à des fondations immuables. Cela le conduit à proposer l'idée de redescription, où le langage et les concepts sont continuellement réinventés pour mieux s'adapter aux nouvelles situations et expériences. Il valorise la création de soi, où les individus sont libres de créer et recréer leurs propres identités et croyances.
En 1982, Rorty publie Consequences of Pragmatism, une collection d'essais qui continue de développer ses idées sur le pragmatisme et critique la philosophie analytique. La même année, il quitte l'université de Princeton pour rejoindre l'université de Virginie, où il enseignera jusqu'en 1998. Dans l'intervalle, il publie notamment Contingency, Irony, and Solidarity (1989), dans lequel il étudie les implications sociales et politiques de ses idées philosophiques, soutenant que les valeurs et les croyances sont contingentes et sujettes à changement. Il introduit la notion de libéralisme ironique, où les individus reconnaissent la contingence de leurs propres croyances tout en s'engageant dans des pratiques démocratiques et solidaires.
• Contingency, Irony, and Solidarity (1989). -  Dans ce texte, Rorty propose une vision novatrice de la vérité, de la subjectivité et de la solidarité, en mettant l'accent sur la contingence des croyances et des valeurs humaines. Il y soutient que les croyances, les valeurs et les structures sociales sont contingentes, c'est-à-dire qu'elles ne sont pas déterminées par des vérités universelles ou des principes immuables. Selon lui, elles sont le produit de circonstances historiques et culturelles spécifiques. Il critique les tentatives de fonder des valeurs ou des vérités sur des bases absolues ou universelles, affirmant plutôt que ces fondations sont elles-mêmes contingentes. L'ironie est présentée comme une attitude philosophique qui reconnaît la contingence des systèmes de croyance tout en continuant à les utiliser. Une personne ironique comprend que ses propres croyances sont également contingentes et que d'autres personnes pourraient avoir des systèmes de croyance différents. Rorty montre comment l'ironie peut permettre de vivre en harmonie avec d'autres qui ont des systèmes de croyance différents, tout en restant critique à l'égard des prétentions absolues à la vérité. Malgré la reconnaissance de la contingence et l'adoption d'une attitude ironique, le philosophe affirme l'importance de la solidarité humaine. Il soutient que nous devrions nous engager à améliorer le bien-être des autres et à construire des communautés inclusives. La solidarité est envisagée comme une base pour construire des sociétés justes et éthiques, où les individus travaillent ensemble pour créer des conditions de vie meilleures pour tous.
Richard Rorty rejoint l'université Stanford en 1998, où il continue à enseigner et à écrire jusqu'à sa retraite en 2005. EN 1998, il fait paraître Truth and Progress: Philosophical Papers, Volume 3, qui rassemble plusieurs de ses essais sur la vérité, la relativité culturelle et le progrès social. En 2000, paraît Achieving Our Country: Leftist Thought in Twentieth-Century America, où il critique la gauche américaine contemporaine et appelle à un renouveau du patriotisme progressiste et plaide pour une réorientation des priorités vers des objectifs de justice sociale et de solidarité. En 2004, sort Philosophy and Social Hope, une collection d'essais qui reflète son engagement en faveur de la démocratie et de l'espoir social. Son dernier livre, Philosophy as Cultural Politics: Philosophical Papers, Volume 4, est publié peu après sa mort en 2007.
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