| Sur la liste officielle reproduite dans la Gerarchia cattolica, Félix II est inscrit comme trente-huitième pape, né à Rome, élu en 363, mort en 365, après un pontificat de un an, trois mois et deux jours. Sur le Calendrier romain, il est mis au rang des martyrs : fête le 29 juillet. Au contraire, suivant bon nombre d'auteurs très orthodoxe, parmi lesquels saint Athanase, saint Hilaire, Rufin, saint Augustin, saint Optatus, Eutychius, Sozomen et Théodoret, Félix n'aurait été ni martyr, ni saint, ni pape, mais antipape suspect d'arianisme ou au moins complice des ariens. De là, une controverse qui agite des questions fort désagréables pour les adversaires obstinés de l'infaillibilité des papes et fort difficiles pour l'historien qui veut discerner les faits parmi des documents contradictoires. La difficulté provient de ce que le pontificat de Félix est intercalé dans le pontificat de Libère, qui fut élu le 22 mai 352 et mourut le 24 septembre 366. Dans les lignes affectées au pontificat de Libère, le Liber pontificalis rapporte que, après l'exil de ce pape et sur son conseil, le clergé de Rome élut pour le remplacer Félix, prêtre vénérable. Dans un concile composé de dix-huit évêques, Félix excommunia les ariens Ursace et Valens. Ceux-ci sollicitèrent alors et obtinrent de l'empereur le rappel de Libère, à certaines conditions favorables à l'arianisme. Libère accepta ces conditions, revint d'abord s'établir dans le cimetière de Saint-Agnès et finalement rentra dans Rome, où il tint un concile d'évêques hérétiques qui expulsa Félix. Il s'ensuivit une persécution ; plusieurs membres du clergé orthodoxe furent martyrisés dans leurs églises. Félix se retira dans une ferme qui lui appartenait et y mourut en paix le 29 juillet. Au nom de Félix, le même Liber pontificalis le présente pareillement comme un pape légitime et zélé pour l'orthodoxie; mais cette deuxième notice contient des détails qui contredisent la première et que dément l'histoire de l'Eglise. Félix aurait été évêque de Rome seulement pendant un an et deux mois. Il aurait dénoncé Constantin comme hérétique et comme ayant été baptisé une seconde fois par Eusèbe de Nicomédie. En conséquence, il aurait été condamné à mort par l'empereur et décapité secrètement avec d'autres fidèles. Le Liber pontificalis confond ici Constantin avec Constance et commet une erreur grossière sur l'époque de la mort de Constantin et de celle de Eusèbe de Nicomédie. Il convient de remarquer, en outre, qu'après avoir laissé Félix mourir paisiblement dans sa ferme, le Liber pontificalis le fait décapiter par ordre de l'empereur. A part quelques différences dans les dates, les Actes de saint Félix s'accordent avec le Liber pontificalis. D'après les Actes de saint Eusèbe, inscrit aussi sur le Martyrologe romain (14 août), ce saint confesseur, qui était prêtre à Rome, prêchait contre Libère et contre Constance, qu'il accusait d'arianisme. Le parti orthodoxe, que soutenait Félix, ayant été chassé des églises, Eusèbe continua à célébrer le service divin dans sa propre maison. Amené devant le pape et devant l'empereur, il leur reprocha courageusement leur hérésie. L'empereur le fit enfermer dans une étroite prison, où il mourut de langueur sept mois après. Les Bollandistes (Acta sanctorum) défendent longuement l'orthodoxie et la sainteté de Félix et d'Eusèbe; ce qui implique la chute de Libère. Dans une pétition (Libellus precum) adressée aux empereurs Valentinien et Théodose, Marcellin et Faustin, prêtres romains, rapportent que, aussitôt après l'exil de Libère, l'archidiacre Félix jura devant le peuple, avec tout le clergé de Rome, qu'il n'accepterait aucun autre évêque avant la mort de Libère. Néanmoins le clergé finit par élire Félix; mais le peuple protesta en s'abstenant de prendre part à l'élection. Lors de la consécration de Félix, à laquelle trois évêques hérétiques procédèrent dans le palais impérial, le peuple ne fut représenté que par trois eunuques de l'empereur. Trois ans après, Libère, qui s'était soumis aux conditions imposées par Constance, rentra à Rome; le peuple l'accueillit avec joie. Félix fut chassé de la ville; il y revint quelque temps après, rappelé par le clergé qui l'avait élu, et s'établit dans une basilique au delà du Tibre; mais la multitude des fidèles l'en expulsa ignominieusement. Il mourut le 22 novembre. Les histoires de Sozomen et de Théodoret concordent avec l'ensemble de ce témoignage contemporain, auquel elles ajoutent divers détails. Cependant, à la mort de Libère, comme Damase dut son élection aux partisans de Félix, il semble bien que ceux-ci étaient plus nombreux que ne prétendent leurs adversaires. Il n'est pas invraisemblable de supposer, comme le fait Lipsius, que la soumission de Libère à l'arianisme avait diminué son parti et que Félix périt dans un conflit entre les deux factions rivales, mort qui aurait été considérée comme un martyre par ses adhérents. Lorsque Grégoire XIII fit reviser le martyrologe romain (1582), Baronius proposa d'en exclure Félix et il composa un traité exposant amplement les motifs de cette exclusion. Le cardinal Sanctorius prit la défense de Félix. Pendant ce débat, on découvrit fort à propos, sous un autel de l'église Saint-Cosme et Saint-Damien, un cercueil portant cette inscription : Corpus sancti Felicis, papae et martyris, qui damnavit Constantium. Convaincu par cette exhibition, Baronius se rétracta. Félix garda sa place dans le martyrologe; mais le titre de pape lui fut retiré plus tard dans la prière du bréviaire romain. Pour justifier l'inscription de Félix sur la liste officielle des papes et la concilier avec la durée généralement assignée au pontificat de Libère, Bellarmin (De Romanis pontificibus) suppose que, après l'exil de Libère, Félix fut légitimement élu et que, après la mort de Félix, Libère fut rétabli par une nouvelle élection. Il est impossible de trouver dans l'histoire la moindre trace de cette seconde élection. Deux fausses décrétales ont été attribuées à ce pape ou antipape. (E.-H. V.). | |