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Falstaff (Falstof)

Sir John Falstaff est le nom sous lequel est aujourd'hui ordinairement désigné sir John Fastolf, chevalier anglais, né vers 1378, mort le 5 novembre 1459. D'une ancienne famille de Great Yarmouth (Norfolk), il était fils de sir John Fastolf, seigneur des manoirs de Caister et de Reedham. 

Page de Thomas Mowbray, duc de Norfolk, avant 1398, il entra ensuite au service du second fils de Henri IV, Thomas de Clarence, qu'il accompagna en Irlande (1405-1406). Il épousa, en 1408, la fille de Robert, lord Tibetot, riche héritière du Yorkshire. Déjà, sous Henri IV, il prit probablement part à la guerre franco-anglaise sur le continent; en juin 1415, il s'engagea à servir Henri V dans cette guerre avec dix hommes d'armes et trente archers. Il se distingua devant Honfleur, à la bataille d'Azincourt, à la prise de Caen et au siège de Rouen en 1417. Gouverneur de Condé-sur-Noireau en 1417, il fut chargé du gouvernement de la Bastille en 1420. 

Après la mort de Henri V, il devint (janvier 1422) grand maître de la maison du régent Bedford. En 1423, il était lieutenant du roi et régent en Normandie, gouverneur du Maine et de l'Anjou. A la bataille de Verneuil (1424), il fit prisonnier Jean II, duc d'Alençon. Il guerroya dans le Maine durant les années suivantes (prise de Sillé-le-Guillaume en 1425); mais c'est en 1429 qu'il accomplit son principal exploit. Il avait été chargé de ravitailler l'armée qui assiégeait Orléans; le convoi qu'il escortait fut attaqué à Rouvray par une armée française sous le comte de Clermont; il sortit victorieux, malgré l'infériorité numérique de ses troupes, de cette célèbre « bataille des Harengs » (12 février 1429). Cependant Jeanne d'Arc avait paru; le vent avait tourné; les Anglais, obligés de lever le siège d'Orléans, furent entièrement défaits à Patay (18 juin 1429). A Patay combattirent les deux principaux capitaines des Anglais : Talbot et Fastolf. Talbot fut fait prisonnier. Quant à Fastolf, il est accusé par Monstrelet d'une fuite honteuse, et à cause de sa lâcheté en cette occasion, il aurait été dégradé de l'ordre de la Jarretière. 

La version de Monstrelet a été adoptée par la postérité. Un contemporain, Jean de Wavrin, dit seulement que Fastolf commanda une manoeuvre qui fut mal comprise et qui entraîna un désastre. S'il y eut, comme on l'avance, une enquête faite par Bedford sur la conduite de Fastolf à Patay, elle n'aboutit sûrement pas, comme l'affrme Monstrelet, à une condamnation infamante, car notre capitaine reçut bientôt après des commandements et des marques de la confiance royale, comme auparavant. En 1431, il fit prisonnier le duc de Bar devant Vaudémont, et, en 1432, fut nommé ambassadeur anglais au concile de Bâle après une visite en Angleterre. En 1434, il paraît comme un des négociateurs de la paix d'Arras. Il fut un des exécuteurs testamentaires du duc de Bedford (mort le 14 septembre 1435). Après avoir bataillé en Normandie jusqu'en 1440, il se retira du service à cette date et retourna en Angleterre, où il fut inscrit sur la liste des conseillers privés. Les rebelles de 1450 le tenaient pour traître et responsable des malheurs arrivés sur le continent; à leur approche, sir John fut obligé de se réfugier à la Tour de Londres. 

Fastolf s'était enrichi en France : en 1446, il avait déjà commencé la construction d'un magnifique château à Caister, dont les fondations couvraient une superficie de 5 acres, et qui n'était pas encore achevé en 1453. La vie que le célèbre capitaine mena dans cette princière résidence du Norfolk jusqu'à sa mort est très bien connue, grâce à la précieuse correspondance originale qui a été publiée sous le titré de Paston Letters. John Paston, auteur de cette correspondance, était le voisin et l'ami de Fastolf, et les archives de celui-ci nous ont été transmises en partie, mêlées à celles de celui-là. Il ressort de ces papiers que Fastolf était, dans sa vieillesse, un homme avide, avare, très ferré sur la procédure, très dur pour ses serviteurs et ses tenanciers. 

On lui a prêté assez gratuitement des goûts littéraires : son secrétaire Worcester eut à se plaindre de lui; et les fondations qu'il aurait faites dans les universités de Cambridge et d'Oxford ne sont pas toutes attestées par des documents authentiques. Il s'occupa cependant de fonder à Caister, à partir de 1456, un collège de sept prêtres et de sept pauvres écoliers. Il laissa la plus grande partie de sa fortune à Paston. Cette fortune était considérable elle comprenait, d'après son testament, 94 manoirs, 4 résidences seigneuriales (Yarmouth, Norwich, Southwark, Caister), une riche garde-robe, 3400 onces de vaisselle d'argent et près de 3000 livres en espèces. Mais l'authenticité du testament fut très vivement contestée : Paston fut accusé de l'avoir fabriqué de toutes pièces. Le duc de Norfolk s'empara d'une portion de l'héritage. La querelle dura quinze ans. Finalement, les Paston restèrent en possession, après avoir apaisé leurs adversaires par des concessions partielles. En 1474, le collège fondé par Fastolf à Caister fut transféré à Oxford; Fastolf est devenu ainsi l'un des principaux bienfaiteurs de Magdalen College, sans l'avoir voulu. 

Sir John Fastolf doit à Shakespeare, sous le nom de Falstaff, une célébrité immense et peu méritée. L'identification du personnage de Shakespeare et du châtelain réel de Caister n'est pas douteuse : tous deux sont représentés comme originaires du Norfolk. Fastolf avait une maison à Southwark (the Boar's Head), et c'est à la taverne de Boar's Head, à Southwark, que Falstaff passe sa vie crapuleuse (Henri IV, les Joyeuses Commères de Windsor). Le Falstaff de Shakespeare est un lâche, et Fastolf a été accusé de lâcheté à Patay. Mais Shakespeare ne s'est pas piqué de respecter entièrement la vérité historique; son personnage de Falstaff est imaginaire en tant que compagnon de débauches de Henri V, en tant que bohème et pilier de cabaret. Le véritable Fastolf, plus âgé que Henri V de dix années seulement, fut un homme d'affaires, dur à lui-même comme à autrui, riche, économe, sévère : un chef d'armées, et non un soudard. Il est remarquable, d'ailleurs, que Shakespeare avait donné, dans la première rédaction de Henri IV, le nom de sir John Oldcastle à son grotesque personnage; il changea ce nom en celui de Falstaff à la requête de lord Cobham, descendant d'un Oldcastle. (Ch.-V. L.).

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Dictionnaire biographique
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