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Les
Aborigènes
d'Australie sont les peuples autochtones du continent australien, dont
l'histoire remonte à plus de 65 000 ans, faisant d'eux l'une des plus
anciennes civilisations du monde. Leur culture, extrêmement riche et diversifiée,
comprend des langues, des pratiques religieuses, des formes d'art et des
systèmes sociaux profondément enracinés dans leur connexion avec la
territoire dans lequel ils évoluent. Cependant, l'arrivée des colons
européens à partir de 1788 a eu un impact dévastateur sur les populations
autochtones. La colonisation a entraîné la perte de terres, la destruction
de cultures et la marginalisation des communautés autochtones. Les Aborigènes
ont été soumis à des politiques de ségrégation, de relocation et d'assimilation,
qui ont eu des conséquences profondes et durables sur leur bien-être
et leur identité.
Histoire de l'Australie
autochtone
La période pré-européenne.
Il est largement
accepté que les ancêtres des Aborigènes sont arrivés en Australie en
provenance d'Asie du Sud-Est. Cette migration a probablement eu lieu durant
une période glaciaire, lorsque le niveau de la mer était plus bas, créant
des ponts terrestres et des passages étroits entre les îles. Il est possible
aussi que ces ancêtres aient voyagé en petites embarcations rudimentaires
pour atteindre les côtes nord de l'Australie. Les recherches génétiques
et archéologiques suggèrent que les Aborigènes sont arrivés il y a
au moins 65 000 ans, bien avant l'apparition de l'agriculture dans le Croissant
fertile.
Au cours des milliers
d'années qui ont suivi leur arrivée, les Aborigènes se sont lentement
dispersés à travers le continent australien. Ils ont dû s'adapter Ã
des changements climatiques importants, notamment des périodes de sécheresse
intense et des variations dans les cycles de mousson. Ces adaptations ont
influencé leur mode de vie et leur gestion de l'environnement. Ces populations
ont développé des stratégies de subsistance spécifiques à chaque région
: chasse, pêche, cueillette, agriculture limitée et gestion des feux
(ce que l'on appelle le feu aborigène ou fire-stick farming),
qui consistait à utiliser des feux contrôlés pour stimuler la croissance
de certaines plantes et pour faciliter la chasse. Cette pratique a également
façonné le paysage australien sur des milliers d'années, créant des
écosystèmes spécifiques.
Avant l'arrivée
des colons européens, il existait plusieurs centaines de langues
et dialectes aborigènes distincts, correspondant à une grande diversité
de groupes ethniques. Ces langues et ces cultures formaient une mosaïque
riche de systèmes sociaux et territoriaux, chaque groupe ayant des coutumes
et des traditions adaptées à son environnement spécifique. Ces sociétés
étaient organisées autour de clans ou de groupes familiaux, avec des
structures de gouvernance complexes et des lois orales qui réglaient la
propriété des terres, les mariages, les relations commerciales et les
interactions avec les autres groupes (V. plus bas). Les Aborigènes vivaient
en groupes tribaux ou clans basés sur des liens familiaux, chacun ayant
des territoires définis. Leur religion fondée sur le concept du Rêve
(ou Temps du rêve) était le fondement de leur culture. Il expliquait
la création du monde, les origines des peuples et les lois qui régissent
leur société. Les outils aborigènes incluaient des lances, des boomerangs,
et des haches.
La colonisation
européenne.
Avant l'arrivée
des Européens, les Aborigènes n'avaient eu que peu de contacts avec d'autres
cultures, notamment des pêcheurs macassars (originaire de Sulawesi, Indonésie),
qui venaient chercher du tripang (holothurie) dans les eaux du nord de
l'Australie. En 1788, les Britanniques établissent une colonie pénitentiaire
à Sydney. Les terres aborigènes sont déclarées terra nullius
( = terre n'appartenant à personne), niant les droits des populations
autochtones. Les Aborigènes sont chassés de leurs terres traditionnelles,
entraînant une perte de moyens de subsistance, de lieux sacrés et de
liens culturels. La variole, la rougeole et d'autres maladies introduites
par les Européens provoquent des épidémies dévastatrices parmi les
Aborigènes, réduisant drastiquement leur population. Des affrontements
violents opposent les colons et les Aborigènes, comme les guerres de la
Frontière (Frontier Wars). Des massacres systématiques sont organisés
dans certaines régions.
A partir des années
1850, les Aborigènes sont regroupés dans des missions religieuses et
des réserves où ils subissent une tentative d'assimilation forcée. Leur
culture et leurs langues sont souvent interdites. Ils sont exclus des droits
civiques et politiques. Ils ne sont pas comptés dans le recensement national,
et leurs terres sont progressivement annexées. Les pratiques culturelles
sont réprimées, et l'introduction d'alcool et d'autres influences européennes
perturbe leurs communautés. Un des chapitres les plus tragiques va être
celui des Générations volées (Stolen Generations) : au début
du XXe siècle, les gouvernements adoptent
une politique visant à intégrer les Aborigènes dans la société blanche.
Cela se traduit par des restrictions sur leurs déplacements, leur emploi
et leur vie quotidienne. De 1910 Ã 1970, des milliers d'enfants
aborigènes métissés ou non sont enlevés de leurs familles pour être
élevés dans des institutions ou des familles blanches, afin de les "civiliser".
Cela cause des traumatismes intergénérationnels qui perdurent. Pendant
cette période, les Aborigènes n'ont pas le droit de vote dans la plupart
des États australiens, sont souvent payés en nature au lieu d'un salaire,
et subissent des lois discriminatoires les maintenant dans la pauvreté.
Les années 1960
voient cependant émerger un mouvement pour les droits des Aborigènes,
inspiré par les luttes des Afro-Américains.
Des figures emblématiques comme Vincent Lingiari ou Eddie Mabo jouent
un rôle clé. Un référendum est organisé pour modifier la Constitution
australienne. Plus de 90 % des électeurs approuvent que les Aborigènes
soient inclus dans le recensement national et permettent au gouvernement
fédéral de légiférer en leur faveur. Dans les années 1970, des revendications
pour le droit à la terre émergent, comme l'affaire Gurindji qui conduit
à la restitution symbolique de terres par le Premier ministre Gough Whitlam.
En 1992, Ã l'issue de l'affaire Mabo, la Haute Cour australienne
reconnaît que les Aborigènes avaient des droits fonciers traditionnels
avant la colonisation. Cette décision annule le concept de terra nullius
et conduit à la loi sur les titres fonciers indigènes (Native Title
Act). En 1997, le rapport Bringing Them Home documente l'impact
des "générations volées". En 2008, le Premier ministre Kevin Rudd présente
des excuses officielles au nom du gouvernement australien. Des efforts
commencent alors à être déployés pour préserver les langues
aborigènes, promouvoir l'art autochtone et inclure les traditions
dans l'identité australienne.
Les Aborigènes continuent
aujourd'hui de revendiquer leur reconnaissance dans la Constitution australienne,
avec des débats sur l'instauration d'une Voix indigène au Parlement.
Malgré les progrès, les Aborigènes représentent une part disproportionnée
de la population carcérale et continuent de faire face à des inégalités
en matière de santé, d'éducation et d'emploi. Des communautés aborigènes
s'organisent pour regagner le contrôle de leurs territoires et promouvoir
des solutions fondées sur leurs traditions. La Journée nationale de la
Réconciliation et la Semaine NAIDOC célèbrent la culture aborigène
et visent à sensibiliser les Australiens non autochtones. En 2017, est
publié l'Uluru Statement from the Heart, un document qui
appelle à la création d'une Voix indigène au Parlement et à un traité,
mais ses recommandations n'ont pas encore été pleinement mises en œuvre.
Eléments de la culture
aborigène australienne
Culture et système
de croyances anciens.
Contrairement Ã
de nombreuses religions qui établissent une distinction entre le sacré
et le profane, la religion aborigène imprègne tous les aspects de la
vie quotidienne. Si bien que pur présenter la culture des populations
autochrones d'Australie, il convient de commencer par exposer les lignes
de force de leurs croyances et de leur vision du monde, qui est intégrée
et holistique, qui envisage l'humain, la nature et le monde autre (le Temps
du rêve) dans une continuité essentielle.
Le
Temps du rêve.
La religion aborigène
est enracinée dans le concept de Temps du rêve ou Rêve.
Ce concept structure la compréhension du monde et les relations sociales.
Il fait référence à une époque mythique où les ancêtres créateurs
ont non seulement donné forme aux paysages, mais ont aussi établi les
lois et les coutumes qui régissent les sociétés aborigènes. Ces esprits,
qui continuent d'habiter les lieux sacrés, sont généralement associés
à des animaux spécifiques, à des éléments naturels (comme les rochers,
les rivières ou les montagnes), ou à des phénomènes (comme le soleil
et la pluie). Le Rêve n'est pas seulement un passé mythique; il est considéré
comme un temps éternel et toujours présent. Dans la culture aborigène,
le Temps du rêve continue d'exister parallèlement au temps actuel. Les
Aborigènes croient que les esprits des ancêtres sont toujours présents
et que les individus peuvent entrer en contact avec eux grâce à des pratiques
et rituels particuliers. Les récits du Temps du rêve sont intrinsèquement
liés aux paysages, aux éléments naturels et aux sites sacrés. Chaque
groupe aborigène a des histoires et des chants spécifiques qui expliquent
comment ses ancêtres ont façonné leur territoire. Cette connexion le
monde surnaturel est centrale dans l'identité aborigène.
.
Le
totémisme.
Le totémisme est
une pratique religieuse centrale pour les Aborigènes. Un totem est un
être naturel (animal, plante, ou élément du paysage) qui symbolise la
filiation mythique et l'identité d'un individu, d'une famille ou d'un
groupe. Chaque individu aborigène est associé à un ou plusieurs totems,
qui sont considérés comme des manifestations de leurs ancêtres mythiques.
Ce lien totémique implique des responsabilités et des interdits : il
est par exemple interdit de chasser ou de consommer l'animal totem de son
propre groupe.
Les
rites et les cérémonies.
Les cérémonies
permettent de se connecter avec le monde du Rêve et de maintenir le lien
avec les esprits ancestraux. Ces cérémonies comportent des danses, des
chants, des rituels de peinture corporelle et des récits mythiques. Elles
marquent des événements importants de la vie comme la naissance, le passage
à l'âge adulte, le mariage, et la mort. Les danses et les chants racontent
fréquemment des récits du Rêve et permettent de transmettre les enseignements
religieux et culturels. Ces cérémonies ont aussi pour but de protéger
le groupe et d'assurer la continuité de l'harmonie entre les humains et
autres composantes, matérielles ou non, de l'univers.
Les
lieux sacrés.
Les paysages australiens
sont remplis de lieux considérés comme sacrés par les Aborigènes. Ces
lieux sacrés sont des endroits où les esprits ancestraux ont laissé
une marque pendant le Temps du rêve. Par exemple, le site d'Uluru (ou
Ayers Rock) est sacré pour les Anangu, une population d'Australie centrale.
Les lois traditionnelles régissant ces lieux sacrés sont strictes, et
il est parfois interdit d'y pénétrer sans autorisation, voire même de
les photographier ou de les escalader.
Les
règles sociales et morales.
Les lois et les
règles qui régissent la vie en communauté et les interactions avec l'environnement.
sont parfois appelées Lois du Rêve. Elles encadrent les comportements
sociaux, les relations familiales, le partage des ressources et la gestion
des conflits. Les transgressions de ces lois sont considérées comme des
violations de l'ordre sacré, et elles peuvent entraîner des sanctions
qui pzuvent aller jusqu'Ã l'exclusion du groupe.
Organisation
sociale.
L'organisation sociale
traditionnelle des Aborigènes d'Australie repose sur des structures communautaires
asées sur des liens familiaux, religieux et territoriaux. Le concept du
Temps du rêve structure non seulement la cosmologie,mais aussi les lois,
ls relations sociales et le lien avec le territoire. Cette organisation
se distingue par une absence de hiérarchies strictes et par des systèmes
de prise de décision collective et de gouvernance basés sur le respect
de l'âge, du savoir et du lien mythique avec la terre.
Le
clan et le territoire.
Les Aborigènes
étaient traditionnellement organisés en clans ou groupes de parenté,
chaque clan ayant une relation abstraite et territoriale spécifique. Le
clan représente un groupe de familles apparentées qui partagent des droits
sur une région déterminée, souvent liée à des sites sacrés associés
aux ancêtres et aux récits du Temps du rêve. Ces territoires sont appelés
des "pays", et chaque clan est responsable de la protection de ces terres
sacrées, qui sont une partie essentielle de leur identité.
Relations
inter-claniques et alliances.
Les Aborigènes
australiens avaient des systèmes de relations entre les différents clans
et groupes ethniques. Ces relations incluaient des échanges économiques
et culturels, qui renforçaient la cohésion sociale et permettaient de
gérer les ressources de manière collective.
• Échanges
et commerce. - Les Aborigènes échangeaient divers objets, tels que
des pierres précieuses, de l'ocre, des plumes et des coquillages, entre
différentes communautés. Ce commerce permettait de créer des alliances
et de renforcer les liens.
• Rituels de
partage et cérémonies collectives. - Certaines cérémonies inter-claniques,
comme le corroboree, rassemblaient différents groupes pour célébrer
et renforcer leur unité culturelle. Ces rassemblements permettaient aussi
de résoudre des différends, d'organiser des mariages et de renforcer
les alliances.
Le
corroboree est une cérémonie culturelle importante quicombine plusieurs
formes d'expressions artistiques et religieuses : la danse, la musique,
le chant et le récit. Le corroboree permet de se connecter aux Ancêtres
et aux esprits de la terre, et peut comporter des aspects de la mythologie
du Temps du Rêve. Les danses dans le corroboree sont généralement symboliques
et imitent des gestes d'animaux ou des actions liées à la nature, chaque
mouvement ayant une signification. La musique est assurée par des instruments
traditionnels comme le didgeridoo (un long instrument à vent en bois)
et des bâtons rythmiques. Le corroboree est par ailleurs un moyen éducatif
pour transmettre des valeurs culturelles et des connaissances pratiques,
comme les méthodes de chasse, les traditions de guérison et les lois
sociales. Il enseigne également les histoires sacrées de chaque groupe.
Il permet ainsi derenforcer l'identité culturelle et les liens au sein
de la communauté. Aujourd'hui, les corroborees peuvent être privés,
réservés aux membres de la communauté, ou ouverts au public, dans le
but de sensibiliser et de partager la culture aborigène avec les visiteurs.
Ils sont ainsi essentiels pour la préservation et la valorisation de l'héritage
des peuples aborigènes d'Australie.
Les
systèmes de parenté.
Les Aborigènes
ont développé des systèmes de parenté (kinship systems), qui
régulent les relations entre les individus, les responsabilités
sociales, les alliances et les interdits. Ces systèmes de parenté déterminent
la manière dont les Aborigènes se marient, se répartissent les rôles
dans la communauté et interagissent avec d'autres clans.
• Systèmes
de mariage. - Les mariages sont normalement organisés pour respecter
les règles de parenté et d'alliance. Par exemple, certains clans suivent
des règles de mariage exogame, obligeant leurs membres à se marier en
dehors de leur propre clan pour renforcer les liens entre différentes
communautés.
• Totems et
liens mythiques. - Chaque individu et chaque clan est lié à un ou
plusieurs totems, des animaux, plantes ou éléments naturels représentant
leurs ancêtres et leurs rôles dans la société. Ces totems marquent
leur appartenance et guident leur comportement et leurs relations avec
la nature.
Lois
et justice traditionnelle.
Les Aborigènes
appliquent un système juridique basé sur des lois coutumières souvent
appelées lois du Temps du rêve. Ces lois englobent des règles
de comportement, de respect des rituels, et des relations sociales, qui
sont considérées comme sacrées et héritées des ancêtres. Les sanctions
pour les infractions aux lois coutumières varient selon la gravité de
l'acte. Elles peuvent inclure des réparations symboliques, des châtiments
corporels ou l'exil temporaire du groupe. Certaines infractions peuvent
être résolues par des cérémonies de pardon ou des rituels de réconciliation,
permettant à la personne fautive de réintégrer la communauté après
s'être repentie.
Rôles
et responsabilités basés sur l'âge et le sexe.
Dans les communautés
aborigènes traditionnelles, les rôles et les responsabilités sont
divisés en fonction de l'âge et du sexe.
• Les
hommes sont généralement responsables de la chasse, de la fabrication
des outils et des armes, et de la protection du clan. Ils joueent aussi
un rôle important dans les cérémonies religieuses.
• Les femmes
se chargent de la cueillette des plantes, des soins aux enfants et de la
transmission des savoirs liés aux plantes médicinales et aux cycles naturels.
Les femmes ont également des rôles religieux et rituels spécifiques,
particulièrement liés à la fertilité et à la vie domestique.
• Les anciens
sont des membres respectés de la communauté, souvent choisis pour leur
sagesse et leur connaissance des lois et des traditions. Ils ont une influence
prépondérante dans la prise de décision et la transmission des savoirs
ancestraux.
+ Le
conseil des Anciens est une institution clé dans la gouvernance aborigène.
Ce conseil est composé de membres respectés, qui possèdent une connaissance
approfondie des lois du Temps du rêve et des coutumes. Les Anciens prennent
des décisions sur des questions importantes, comme la gestion des ressources,
les relations inter-claniques, les mariages, et la résolution des conflits.
Les décisions sont généralement prises de manière collective, avec
une forte importance accordée au consensus et à la discussion. Chaque
membre du conseil peut donner son avis, et la parole de ceux qui détiennent
le savoir religieux et ancestral est particulièrement respectée. Les
Anciens jouent également un rôle de médiateurs et de guide pour la communauté,
conseillant les plus jeunes et facilitant la résolution des conflits de
manière pacifique.
Cérémonies
et rituels d'initiation.
Les rituels de passage,
notamment, marquent le passage de l'enfance à l'âge adulte et sont essentiels
pour inculquer les valeurs de la communauté et les savoirs spirituels.Les
jeunes, à l'adolescence, doivent souvent passer par des cérémonies d'initiation
pour être acceptés en tant qu'adultes dans la communauté. Ces rites
comportent l'apprentissage des responsabilités, des récits smythologiques,
et des règles de comportement. Pendant ces cérémonies, les jeunes apprennent
ainsi des récits du Temps du rêve, des techniques de survie, des connaissances
médicinales, et les chants et danses rituels de leur clan.
Le dingo dans
la culture aborigène.
Contrairement Ã
d'autres cultures, les Aborigènes n'ont pas domestiqué d'animaux en dehors
du dingo, qu'ils ont intégré à leur mode de vie. Le dingo (Canis lupus
dingo), considéré comme un chien semi-sauvage, a une relation singulière
avec les populations autochtones, mêlant utilité pratique, valeur symbolique
et interactions écologiques. Il serait arrivé en Australie il y a environ
4000 ans, probablement introduit par des navigateurs austronésiens ou
des commerçants venus d'Asie du Sud-Est. Les preuves génétiques montrent
qu'il descend de chiens domestiques asiatiques, mais il s'est adapté rapidement
au mode de vie sauvage. Après son arrivée, le dingo s'est dispersé Ã
travers le continent, s'adaptant aux différents environnements australiens,
des déserts arides aux forêts tropicales. Il n'est ni complètement domestique
comme un chien, ni totalement sauvage comme un loup. Il vit souvent en
groupes sociaux autonomes mais peut coexister avec les humains dans un
cadre semi-domestique.
Les Aborigènes apprivoisaient
fréquemment des dingos pour diverses tâches. Ils étaient utilisés pour
localiser et attraper des proies, leur flair et leur agilité en faisant
des alliés précieux. Ils aidaient à protéger les campements contre
les intrus ou les prédateurs, notamment les varans ou d'autres animaux
nuisibles. Les dingos apprivoisés dormaient parfois avec les membres des
communautés, apportant chaleur et confort pendant les nuits froides. Les
dingos apprivoisés restaient proches de leur nature sauvage et n'étaient
pas élevés sélectivement comme les chiens domestiques modernes. Ils
retournaient souvent à la vie sauvage en cas de besoin. Dans de nombreuses
cultures aborigènes, le dingo occupe une place importante dans Temps du
rêve, où il est vu comme un ancêtre ou un gardien spirituel. Des
récits mythologiques expliquent parfois l'origine du dingo ou son rôle
dans la création du monde. Certaines tribus considéraient le dingo comme
un animal totem, associé à des clans spécifiques. Il symbolisait des
qualités telles que la loyauté, la ruse ou l'endurance.
Avec l'arrivée des
colons européens, le dingo est devenu un ennemi pour les éleveurs de
bétail, accusé de prédation sur les moutons. Cela a conduit à des campagnes
de persécution, notamment la construction de la célèbre Dingo Fence,
une barrière de plus de 5 600 km destinée à empêcher les dingos de
pénétrer dans les zones de pâturage. La persécution des dingos par
les colons a également modifié la relation qu'entretenaient les Aborigènes
avec cet animal. Leur rôle comme auxiliaires à la chasse et comme compagnons
a été réduit au fur et à mesure que les structures traditionnelles
étaient perturbées par la colonisation. Le dingo est aujourd'hui reconnu
comme une espèce importante pour la biodiversité australienne. Il reste
aussi un symbole de l'identité aborigène et un sujet de fierté culturelle.
Dans certaines régions, des efforts sont faits pour rétablir un équilibre
entre les populations de dingos, les activités humaines et la conservation
de l'environnement.
La culture matérielle
traditionnelle.
La culture matérielle
aborigène n'est pas uniquement utilitaire; elle est profondément imprégnée
de religion et de symbolique. Chaque objet est chargé de sens et de connexions
au Temps du rêve, aux ancêtres et aux lois de la communauté. Les compétences
de fabrication, les histoires et les significations symboliques de ces
objets sont transmises par la tradition orale et les cérémonies.
Habitations.
Les mia-mia
ou gunyah sont des abris temporaires fabriqués à partir
de branches, d'écorces, de feuilles et d'herbes. Ces structures, conçues
pour s'adapter aux climats variés d'Australie, étaient souvent construites
pour les besoins saisonniers. Dans certaines régions plus clémentes,
comme le nord tropical, les Aborigènes construisaient des habitats semi-permanents
avec des branches de palmiers et des plantes locales.
Armes
et outils de chasse.
Le boomerang
est sans doute l'objet aborigène le plus célèbre. Contrairement à la
croyance populaire, tous les boomerangs ne reviennent pas. Ceux destinés
à la chasse sont souvent incurvés et plus lourds, tandis que les boomerangs
de retour étaient plutôt utilisés pour le divertissement et l'entraînement.
La lance est un autre outil de chasse essentiel, parfois utilisée avec
un propulseur appelé woomera ou miru. Ce dernier permet
d'augmenter la vitesse et la précision de la lance. Taillés dans la pierre
et le bois, les marteaux et les haches servaient à la chasse, à la coupe
du bois et à d'autres tâches de subsistance. Les têtes de hache étaient
ordinairement fixées sur des manches en bois à l'aide de résine naturelle.
Récipients
et outils de cueillette.
Les Aborigènes
tressaient des paniers et des nattes en utilisant des fibres végétales,
comme l'écorce, les feuilles et les joncs. Ces récipients servaient Ã
transporter et à stocker la nourriture ou à puiser de l'eau. Le coolamon,
par exemple, est un récipient en bois, creusé dans une pièce de bois
solide. Il est utilisé pour transporter de l'eau, des graines, des aliments
ou pour bercer les enfants. Sa forme est allongée et incurvée, permettant
de le porter sur la tête ou sur l'épaule.
Les femmes utilisaient
des bâtons à fouir pour extraire des racines comestibles, des tubercules
et d'autres plantes du sol. Ces bâtons étaient fabriqués en bois dur
et parfois décorés.
Vêtements.
Les vêtements des
Aborigènes étaient minimaux, adaptés au climat australien. C'étaient
des ceintures, desbandeaux et des cordons fabriqués à partir de fibres
tressées, de poils d'animaux et de plumes, ces accessoires servaient non
seulement de décoration mais pouvaient aussi être fonctionnels, par exemple
pour transporter de petits objets.
Bâtons
de message.
Les bâtons de message
étaient utilisés pour transmettre des informations entre différents
groupes. Les motifs gravés sur le bâton avaient une signification spécifique
que seuls les membres de la communauté pouvaient comprendre, facilitant
ainsi les communications entre tribus éloignées.
L'agriculture
aborigène.
Bien que les Aborigènes
d'Australie soient parfois perçus comme des chasseurs-cueilleurs nomades,
ils ont en réalité développé des pratiques agricoles efficaces pour
gérer leur environnement, notamment en utilisant le brûlis contrôlé
pour maintenir la santé des écosystèmes et favoriser la croissance de
certaines plantes. Il est reconnu que les Aborigènes ont cultivé une
grande variété de plantes, notamment des céréales, des légumineuses,
des fruits et des légumes indigènes comme le kangkari (tomate sauvage)
et le boondilla (patate douce sauvage), deux espèces qui ont joué
un rôle essentiel dans leur alimentation. D'autres plantes étaeint également
connues : le millet des oiseaux (Panicum decompositum), le sorgho (Sorghum
bicolor), le maïs (Zea mays), le taro (Colocasia esculenta). Les
Aborigènes connaissaient par ailleurs le potentiel des champignons sauvages.
Les Aborigènes ne
pratiquaient pas de semis conventionnels. Mais ils pouvaient recourir
à la plantation de semences en ligne pour favoriser la croissance des
plantes. Ils utilisaient des bâtons (tuteurs) pour soutenir les plantes
qui ont besoin d'appui. Ils construisaient éventuellement des murets de
pierre pour protéger les plantes des vents et des animaux. Parfois, ils
déplaçaient les roches pour exposer de nouvelles couches de sol et stimuler
la croissance de plantes spécifiques. Les systèmes d'irrigation et de
stockage de l'eau développés par les Aborigènes étaient cruciaux pour
leur survie dans des régions souvent arides. Ils ont notamment eu recours
à des fossés appelés larakia et à des barrages de cendres de
bois. Les méthodes de fertilisation utilisées par les Aborigènes comportainet
l'utilisation de déchets organiques et de cendres de bois. La rotation
des cultures était employée pour préserver la fertilité des sols et
éviter leur dégradation. Ces pratiques étaient étroitement liées Ã
des aspects religieux et sociaux, reflétant une approche communautaire
et collective de la gestion des ressources.
Les arts.
Les arts des Aborigènes
d'Australie sont parmi les plus anciens et les plus riches du monde. Les
formes d'expression artistique aborigène comprennent la peinture, la sculpture,
la danse, le chant, la narration orale et les arts visuels. Ces arts ne
sont pas seulement esthétiques : comme tous les autres aspects de la culture
autochtone australienne, ils sont profondément liés aux croyances, aux
traditions et aux histoires du Rêve.
Dans l'art aborigène,
chaque forme, couleur et symbole a une signification précise. Les oeuvres
d'art fonctionnent souvent comme des cartes ou des récits visuels : elles
permettent de transmettre des connaissances géographiques, de localiser
des points d'eau, des territoires de chasse et des chemins de migration.
Elles sont également des supports de transmission des mythes et des lois
tribales.
Les
peintures sur rochers et les pétroglyphes.
Les peintures rupestres
sont parmi les premières formes d'art aborigène. Ces peintures, trouvées
dans des grottes et sur des rochers, datent de milliers d'années et racontent
les récits du Rêve. Elles représentent fréquemment des esprits ancestraux,
des animaux totémiques et des scènes de chasse.
Les pétroglyphes
(gravures sur pierre) sont des symboles gravés dans la pierre, généralement
des formes géométriques ou des silhouettes d'animaux.
La peinture rayon
X est une technique est typique du nord de l'Australie, où les artistes
aborigènes peignent les animaux et les figures humaines en montrant les
organes internes comme sur une radiographie aux rayons X.
Les
peintures sur écorce.
Les Aborigènes
utilisent aussi des écorces d'arbres, notamment des eucalyptus, pour créer
des oeuvres picturales. La technique consiste à détacher une grande plaque
d'écorce, puis à la sécher et à la peindre avec divers pigments. Les
peintures sur écorce se rapportent à des récits du Rêve et représentent
des figures symboliques, des animaux totémiques et des motifs géométriques.
Elles sont également utilisées pour transmettre des connaissances tribales
et pour des rituels.
Les
sculptures et totems.
La sculpture fait
également partie de l'art aborigène, bien que souvent plus discrète.
Les artistes aborigènes sculptent des figures en bois représentant des
ancêtres, des animaux totémiques ou des esprits protecteurs. Les totems,
qui symbolisent les liens entre une famille ou un individu et un animal
ou un élément naturel spécifique, sont généralement créés pour être
placés dans des lieux sacrés. Dans la culture tiwi des îles Tiwi, des
poteaux funéraires (pukamani) en bois, peints de motifs géométriques,
sont érigés pour marquer les tombes et honorer les défunts.
Les
peintures corporelles.
Les peintures corporelles
font partie intégrante des rituels aborigènes et des cérémonies religieuses.
Les peintures corporelles sont réalisées avec des pigments tels que des
ocres, de l'argile ou du charbon. Les motifs peints sur le corps varient
en fonction des cérémonies et symbolisent le clan, le statut social
ou des récits du Rêve.
Les
arts visuels modernes.
Depuis les années
1970, l'art aborigène a évolué pour inclure des formes contemporaines
qui restent ancrées dans les traditions. Des centres artistiques ont été
créés, comme à Papunya, près d'Alice Springs, où des artistes aborigènes
ont commencé à représenter leur culture sur des toiles, attirant un
public mondial. Aujourd'hui, les artistes aborigènes combinent les symboles
et techniques ancestrales avec de nouvelles formes d'expression, contribuant
à faire connaître et à protéger leur culture. Les oeuvres contemporaines,
bien que commercialisées à travers le monde, restent profondément ancrées
dans la culture traditionnelle aborigène et la cosmologigie du Temps
du rêve.
La
peinture par points (dot painting), a émergé dans les
années 1970 avec l'adoption de nouveaux supports comme les toiles et les
peintures acryliques. Les points créent des motifs géométriques complexes
qui représentent des symboles du Rêve et des cartes de territoire. Par
exemple, un cercle peut symboliser un camp ou une source d'eau, et les
lignes peuvent représenter des chemins ou des déplacements d'ancêtres
mythiques. Ce style est devenu emblématique de l'art aborigène contemporain
et est parfois vu comme un art abstrait par les observateurs extérieurs,
bien que chaque forme ait une signification précise et symbolique pour
les artistes et leurs communautés.
Les
istruments de musique et l'art de la danse.
Plusieurs instruments
ne sont utilisés, qui ne sont pas seulement des outils musicaux. Ils sont
aussi investis du pouvoir de relier le monde humain au Temps du rêve.
Le didgeridoo,
fabriqué à partir de troncs d'arbres naturellement évidés par les termites,
est un instrument à vent traditionnel, typique des populations du nord
de l'Australie. C'est sans doute l'un des symboles les plus emblématiques
de la culture aborigène.Il produit un son profond et vibrant utilisé
lors de cérémonies et de rassemblements religieux. Les bâtons Ã
percussion sont des bâtons en bois servent d'accompagnement rythmique
pour la danse et le chant.
La danse aborigène,
accompagnée de chants et de musique, est une expression de communication
avec le monde du Rêve. Les danseurs imitent les mouvements des animaux
et des ancêtres, et chaque danse raconte une histoire particulière ou
rend hommage aux esprits.
La connaissance du monde
alentour
Le ciel et les étoiles.
Constellations
sombres et lumineuses
Contrairement aux
cultures occidentales qui ont d'abord défini des constellations par des
motifs formés par des étoiles brillantes, les Aborigènes d'Australie
parlent aussi des constellations sombres, qui prennent forme dans les espaces
sombres de la Voie lactée. Ces constellations de vide ou ombres
(créées par les nuages de poussière interstellaires qui bloquent la
lumière des étoiles derrière eux) ont une place sur la voûte céleste
au même titre que les constellations lumineuses. Un exemple emblématique
de constellation sombre est l'Émeu dans le ciel, dont la forme sombre
ressemble à une grande émeu (un oiseau australien), un animal sacré
pour de nombreux peuples aborigènes. La tête de l'émeu est marquée
par le Sac à Charbon, une zone sombre près de la Croix du Sud, et son
corps s'étend tout le long de la Voie lactée.
La
Voie lactée.
La Voie lactée
elle-même est souvent vue comme une rivière céleste ou un grand serpent.
Dans certaines cultures aborigènes, elle représente les ancêtres qui
voyagent à travers le ciel et observent les activités des humains. Les
étoiles visibles au sein de la Voie lactée peuvent être vues comme des
feux de camp des ancêtres. La Voie lactée est également parfois vue
comme un espace où des animaux mythiques chassent ou jouent, et ses motifs
changeants avec les saisons inspirent des récits sur le cycle de la vie
et des ressources dans les environnements australiens.
La
Croix du Sud.
La Croix du Sud
est une constellation visible uniquement depuis l'hémisphère sud. Lorsqu'elle
est reconnue comme une entité distincte, elle porte différents noms selon
les populations australiennes : Julpan ou Nguruvilu (chez les Yolngu),
Iritjinga (Arrernte), Kungkarangkalpa (Pitjantjatjara) ou encore
Wati Nyiru (chez les Yankunytjatjara et Pitjantjatjara). Pour ces populations,
elle est fréquemment associée à des personnages mythologiques ou des
animaux, selon les différentes régions et nations. Par exemple, dans
certaines traditions, les étoiles de la Croix du Sud représentent des
jeunes hommes en quête de devenir des hommes, ou encore des êtres ancestraux
poursuivant un animal. Chez les Aranda, la constellation est associée
à des créatures féminines, décrites comme des femmes rêvant dans un
rêve. Les Yankunytjatjara et Pitjantjatjara la voient comme une femme
dansant autour d'un feu (ngurrara), central dans de nombreuses pratiques
cérémonielles.
Les
Pléiades et Orion.
Les Pléiades et
Orion portent divers noms selon les cultures. Par exemple, pour les
Pléiades, c'est Makara ou Makarri (région de Sydney et Victoria),
Banbi (chez les Larrakia du nord de l'Australie, Ngurrundjarra (également
dans des populations du le Nord), Bibbulmun (chez les Noongar, du Sud-Ouest).
Dans certaines cultures, les Pléiades sont associées à des rituels de
fertilité et de procréation, où les femmes dansent et chantent pour
invoquer la fertilité de la terre et la procréation des animaux. Ces
rituels sont souvent liés à la saison des pluies et à la croissance
des plantes, et les Pléiades sont considérées comme des symboles de
la fertilité et de la vie.
Orion, pour sa part
est nommé Kungkarungkara ou Kungkarungkara Minymaitya chez les Papangurrung,
Luritja et Anangu Pitjantjatjara, et il correspond à cinq frères transformés
en étoiles. Dans certaines traditions, Orion est vu comme un canot traversant
l'océan austral. Les étoiles de la ceinture d'Orion forment le canot,
tandis que les étoiles de la bretelle représentent les voiles. Cette
légende est souvent liée aux migrations des peuples aborigènes et Ã
leur déplacement sur les vastes eaux de l'océan. Chez les aborigènes
de la Terre d''Arnhem, Orion est associé à la chasse. La ceinture d'Orion
représente cette fois un groupe de chasseurs qui poursuivent un kangourou,
symbolisé par les constellations du Grand Chien et du Petit Chien..
Dans certaines cultures,
les astérismes qui correspondent à Orion et aux Pléiades sont considérés
indépendamment, et des mythes distincts leurs sont attachés, mais dans
d'autres, les Pléiades et Orion sont associés dans un même mythe. Elles
y apparaissent souvent dans les récits sur les relations entre hommes
et femmes. Ainsi, par exemple, dans la région de Sydney, où Orion porte
le nom le nom de Yuree, celui-ci représente un chasseur poursuivant les
Pléiades. De même, dans la culture Yolngu de la Terre d'Arnhem (au nord
de l'Australie), où les Pléiades sont connues sous le nom de Djulpan,
elles sont des soeurs, dont les mythes racontent la traversée du ciel
pour échapper aux avances d'un chasseur. Ces mythes rappellent curieusement
le mythe grec, où la constellation d'Orion représente le chasseur Orion
qui poursuit de ses assiduités les nymphes appelées Pléiades et transportées
au ciel sous la forme de l'astérisme du même nom.
Vénus
comme étoile du matin.
Vénus, visible
comme une étoile brillante soit au lever, soit au coucher du soleil, a
également une place particulière. Son lever est fréquemment associée
à des récits de renouveau et de régénération, ou même de lien avec
les ancêtres. Chez les Wardaman, par exemple, ce lever est vu comme un
signal pour commencer certains rituels ou cérémonies importantes.
Le savoir botanique
et médicinal.
La médecine aborigène
repose sur une vision holistique de la santé, où les maladies sont perçues
comme ayant des causes surnaturelles ou environnementales. Les traitements
visent donc à soigner non seulement les symptômes physiques, mais aussi
à rétablir un équilibre entre l'individu, son environnement et sa relation
au Temps du rêve. Les guérisseurs, connus sous des noms variés selon
les régions, jouent un rôle de médiateurs, transmettant leurs croyances
et réalisant des rituels pour accompagner les soins.
Les
plantes.
Les Aborigènes
chaque plante a une place dans les les histoires sacrées qui expliquent
la création du monde et le rôle de chaque élément naturel. Leur savoir
botanique empirique trouve ainsi une justification de caractère purement
mythique. Cela n'empêche pas que parfois l'efficacité de certains remèdes
traditionnels puis être réelle et reposer sur de bonnes raisons. Ainsi,
de nos jours, les connaissances botaniques des Aborigènes d'Australie
suscitent-elles l'intérêt des chercheurs qui reconnaissent par
exemple les vertus médicinales de plantes, comme la prune kakadu ou le
melaleuca. Quelques-unes des plus importantes plantes de la pharmacopée
aborigène :
• Eucalyptus.
- L'eucalyptus est l'un des arbres les plus emblématiques d'Australie,
et plusieurs de ses espèces ont des propriétés médicinales. Les feuilles
sont utilisées pour traiter les infections respiratoires et les blessures.
Les feuilles écrasées ou en décoction peuvent libérer des huiles aux
propriétés antiseptiques et décongestionnantes, efficaces contre le
rhume et la toux.
• Melaleuca
(arbre à thé). - L'huile extraite des feuilles du Melaleuca est connue
pour ses propriétés antiseptiques, antifongiques et antibactériennes.
Elle est utilisée pour soigner les coupures, les infections cutanées
et les inflammations. Les feuilles sont également frottées ou trempées
dans l'eau pour en faire des infusions destinées à la peau et aux voies
respiratoires.
• Prune kakadu
(Terminalia ferdinandiana). - La prune kakadu, est une petite prune originaire
d'Australie tropicale et extrêmement riche en vitamine C. Elle est utilisée
comme remède pour booster le système immunitaire et pour son effet antioxydant.
Elle est également appliquée pour favoriser la cicatrisation des plaies
et apaiser les inflammations.
• Feuilles de
médecine de brousse (Alyxia ruscifolia). - Les feuilles de l'arbuste
Alyxia ruscifolia, appelées "feuilles de médecine de brousse", sont utilisées
par les Aborigènes des régions arides pour traiter les douleurs articulaires
et musculaires. Elles sont broyées et appliquées sous forme de cataplasmes
ou d'infusions pour soulager les douleurs.
• Quandong
(Santalum acuminatum). - Les fruits du Quandong, ou pêche du désert,
sont utilisés comme aliment et comme médicament. Les noyaux et les feuilles
de cette plante sont appliqués en pâte sur les plaies et les abcès pour
aider à leur guérison, tandis que les fruits peuvent être consommés
pour leurs propriétés énergétiques et nutritives.
• Larves de
sorcières (Acacia kempeana). - Les racines de l'Acacia kempeana, fournissent
des "larves de sorcières" (larves comestibles) riches en protéines, mais
les racines elles-mêmes sont aussi utilisées pour leurs propriétés
médicinales. Elles sont parfois mâchées pour extraire des liquides qui
peuvent soulager la toux ou les douleurs mineures.
• Gubinge
(Terminalia ferdinandiana). - Le gubinge est une autre plante riche en
vitamine C. Les Aborigènes utilisent cette plante pour ses propriétés
anti-inflammatoires et antibactériennes, particulièrement en cataplasme
pour les infections cutanées et les plaies.
Utilisations
thérapeutiques des graines, écorces et résines.
Les Aborigènes
d'Australie utilisent également des graines, des écorces et des résines
pour leurs vertus curatives réelles ou supposées :
• L'écorce
et la résine de certaines espèces d'Acacia est utilisée pour soulager
les maux de dents et les douleurs musculaires. Elle est mâchée ou mélangée
à d'autres plantes pour renforcer ses effets anti-inflammatoires et analgésiques.
• Les graines
de banksia sont grillées et utilisées pour apaiser les douleurs d'estomac.
Les Aborigènes ont également recours aux infusions de banksia pour traiter
des affections respiratoires.
• La fleur de
Grevillea produit un nectar doux (le "miel des fleurs") qui est
consommé pour augmenter l'énergie.
Techniques
et préparations traditionnelles.
Les plantes médicinales
sont préparées de différentes manières en fonction de leurs propriétés
et de leur usage. Les plantes peuvent être écrasées et appliquées directement
sur la peau (cataplasmes) pour soigner les infections, les inflammations
et les douleurs. Les feuilles ou les écorces peuvent être bouillies pour
en faire des infusions, qui sont bues ou appliquées sur les plaies. Certaines
plantes, comme l'eucalyptus, sont brûlées pour libérer des vapeurs,
qui, inhalées, aident à dégager les voies respiratoires. Les Aborigènes
utilisent aussi les feuilles de certaines plantes pour les ajouter dans
l'eau des bains, afin de soulager les douleurs musculaires et les maux
de peau.
Géographie et
écologie aborigènes.
Pour les Aborigènes,
le territoire est plus qu'un simple espace physique : il est un lieu sacré,
habité par les esprits des Ancêtres. Chaque lieu porte un nom, une histoire,
et une signification culturelle. Les montagnes, les rivières, les rochers
et les arbres spécifiques sont associés à des événements du Temps
du rêve, et il est important de les respecter. En ce sens, leur géographie
revêt un caractère religieux. Les déplacements à travers le territoire
ne sont pas seulement actes concrets, mais font partie de cérémonies
et de rites qui renforcent les liens entre les gens, leur terre et leurs
croyances.
Les
lignes de chant : des cartes orales du territoire.
Les lignes de
chant constituent le coeur de la géographie aborigène. Ce sont des
récits chantés qui relient des lieux importants et des paysages à travers
l'Australie. Selon la tradition, les lignes de chant ont été tracées
par les Ancêtres durant la création du monde. Chaque ligne de chant raconte
l'histoire d'un être ancestral et décrit le paysage de manière extrêmement
précise, servant de carte mentale. Les Aborigènes utilisent les lignes
de chant comme des guides pour voyager sur de vastes distances. En chantant,
ils suivent des descriptions détaillées de chaque colline, rivière,
point d'eau, montagne, ou arbre spécifique. Les lignes de chant permettent
donc une orientation à la fois géographique et mythique, reliant les
peuples à leur terre et à leur histoire ancestrale.
Les lignes s'étendent
à travers les frontières tribales et servent de ponts culturels et diplomatiques.
Chaque peuple aborigène a ainsi ses propres récits géographiques, mais
ils sont interconnectés, formant un vaste réseau de connaissances partagées
sur le continent.
Techniques
de navigation sans boussole ni carte.
Les Aborigènes
se servent de repères naturels tels que les montagnes, les formations
rocheuses, les cours d'eau, et même les motifs dans la végétation pour
établir des itinéraires et se repérer. Le ciel nocturne, avec ses constellations
et ses cycles saisonniers, est également un guide. Ils utilisent des constellations
spécifiques pour déterminer la direction et l'époque de l'année, et
adaptent leurs déplacements en fonction des conditions saisonnières.
Connaissances
de l'environnement et des écosystèmes.
Les Aborigènes
d'Australie ont une connaissance détaillée de leur environnement, ce
qui inclut la faune, la flore, le climat et même les cycles naturels.
Chaque région est étudiée et comprise, permettant aux Aborigènes de
lire des signes naturels pour prédire la météo, détecter la présence
d'eau et savoir où trouver des ressources alimentaires. Ils peuvent aussi
intervenir sur leur environnement, en particulier par la technique des
feux de brousse contrôlés.
• Localisation
de l'eau. - L'eau est rare dans de nombreuses régions d'Australie,
et les Aborigènes connaissent les emplacements exacts de sources, puits,
et trous d'eau (appelés soaks en anglais) que l'on trouve sous
des lits de rivière asséchés ou dans les creux de rochers. Ils ont aussi
développé des techniques avancées pour localiser l'eau. Par exemple,
ils observent le comportement des animaux pour déduire la présence d'eau,
ou se servent de certaines plantes considérées comme des indicateurs
de la présence d'eau en sous-sol.
• Utilisation
des feux de brousse. - Les Aborigènes australiens pratiquent le feu
de brousse contrôlé, une technique, parfois appelée feu mosaïque,
qui consiste à allumer de petits feux dans certaines zones pour réduire
la végétation dense et prévenir les incendies de grande envergure. Cela
favorise la croissance de nouvelles plantes et attire des animaux, facilitant
ainsi la chasse et la collecte. Les Aborigènes ont appris à brûler les
bonnes zones au bon moment, en fonction de la saison, du type de végétation,
et du climat. Ces feux de brousse, en plus de régénérer le sol, contribuent
à la formation de corridors écologiques qui facilitent le déplacement
sur le territoire.
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