| Épître aux Hébreux. - Un des livres canoniques du Nouveau Testament, mais que l'ancienne Eglise n'y a cependant fait entrer qu'après bien des hésitations; c'est un traité dogmatique rédigé sous forme de discours et offrant dans sa dernière page les formules propres au style épistolaire. C'est à tort qu'on indique parfois cette épître comme l'eeuvre de saint Paul, puisque, d'une part, elle ne porte pas son nom et que, d'autre part, un examen attentif a fait ressortir les différences de style et les nuances doctrinales qui la séparent des oeuvres placées sous le nom de l'apôtre des Gentils. L'Epître aux Hébreux dont l'auteur reste inconnu et dont on a proposé d'attribuer la paternité à Clément de Rome, à Barnabas, surtout à Apollos, disciple de saint Paul, est une véritable apologie ou démonstration du christianisme, adressée aux Juifs ou Hébreux; elle ne signifie rien, en effet, pour quiconque n'a pas été nourri dans la lecture de la Bible. L'auteur se propose de démontrer à l'aide de l'Ancien Testament, auquel il emprunte ses arguments selon les procédés subtils de l'exégèse pratiquée de son temps, que Jésus est le terme et offre la réalisation complète des révélations anciennes. Il s'acquitte de cette tâche avec une chaleur remarquable; sa phrase élégante, le tour oratoire de son exposé forment un contraste agréable avec la plupart des livres du Nouveau Testament, qui, sous le rapport de la perfection littéraire, langue ou composition, laissent tant à désirer. Disons enfin que l'Épître aux Hébreux a pu être écrite aux environs de l'an 100 de l'ère chrétienne; elle témoigne d'un état déjà avancé de l'organisation et de la spéculation chrétiennes. En voici une courte analyse. L'alliance de grâce, instituée par Jésus-Christ, est supérieure à l'ancienne alliance; aux multiples révélations prophétiques, l'auteur oppose la révélation unique qu'apporte le Fils de Dieu. Ce Fils est infiniment supérieur aux anges et, s'il a occupé momentanément une position humiliée, c'était pour notre salut, afin de remplir le rôle suprême de souverain sacrificateur. Comparé à Moïse, Jésus est établi sur la maison de Dieu, tandis que Moïse n'était qu'employé dans cette maison. A la prêtrise temporaire d'Aaron et de ses successeurs, Jésus substitue la prêtrise selon Melchisédech; la première est obligée de renouveler sans cesse ses expiations pour faire face aux transgressions qui recommencent; la seconde, en une seule fois, atteint son but et achève son oeuvre, grâce au caractère de sainteté de son auteur. L'obstination avec laquelle on a disputé sur l'auteur de l'Épître aux Hébreux, a malheureusement fait perdre de vue son originalité; c'est un véritable traité dogmatique, dont la forme achevée devait singulièrement plaire à ceux que leur éducation ne mettait pas en garde contre les tours de force d'une exégèse subtile, hardie, parfois étrange. Les réserves que nous faisons à cet égard auraient peu touché les contemporains de l'auteur. (Maurice Vernes). | |