|
. |
|
pour le passage de Vénus sur le Soleil | ||
Chappe d'Auteroche |
|
Le phénomène de l'électricité a jeté la plus vive lumière dans la science de la nature. Sans doute il était aisé de voir que la Terre se composait à elle-même son atmosphère, élevant de son sein les vapeurs qui l'arrosent, et recouvrant en un jour, par les pluies, tout ce qu'elle a perdu d'exhalaisons en plusieurs mois. Par la raison qu'elle était la source des nuages, elle devait être le foyer des orages; mais on n'avait pas vu que la foudre partait de la terre, au lieu de tomber du ciel. Chappe était, en 1757, dit-il, dans cette erreur, combattue en 1813 par Maffei. « J'étais persuadé, dit-il, que les nuages orageux étaient toujours enveloppés d'une matière électrique, et qu'ils étaient des conducteurs d'où partaient ces éclats de foudre qui, après avoir traversé les airs, portent l'effroi et le désordre sur la surface du globe [...]. Je reconnus et m'assurai bientôt, dans presque toutes mes observations, que l'inflammation s'était faite à. la surface de la terre; d'où la foudre s'élevait, au lieu de se précipiter des nuages. Presque tous les physiciens sont maintenant également convaincus de cette vérité. »La physique détermine la distance de l'endroit où est l'observateur à l'endroit d'où, part l'éclair par l'intervalle du temps compris entre l'éclair et le bruit, en supposant qu'une seconde répond à cent soixante-treize toises. Chappe a fait des observations en Lorraine et en Sibérie. - | ||
Mais, comme celles-ci sont les plus récentes, et presque les seules de ce genre qu'on ait faites en ce pays étranger aux sciences et aux savants, elles appartiennent doublement à l'histoire des voyages, qui n'a souvent rien de plus curieux et de plus nouveau, que de présenter dans des pays éloignés les phénomènes de la Nature que chacun retrouve dans son pays. L'auteur avait élevé en plein air une barre de fer suivant la méthode ordinaire, dans le dessein de déterminer l'étendue de l'atmosphère, électrique des nuages, et les rapports des degrés d'électricité, analogues aux différentes distances où se trouvait la barre électrique par rapport au nuage d'où paraissait, sortir l'inflammation. Le 11 juin 1761, le ciel était serein; cependant tout semblait annoncer un orage. On respirait à peine, quoique la thermomètre ne fût qu'à 18 degrés: Un nuage sombre parut vers midi à l'horizon; il s'éleva insensiblement, et bientôt un sourd bourdonnement annonça son approche; mais on ne voyait point d'éclair, on n'entendait point le tonnerre; un vent impétueux succéda à ce bruit; des tourbillons de poussière parurent au loin, c'était l'avant-garde de la nuée orageuse. Bientôt les éclairs sillonnèrent l'espace; le tonnerre se fit entendre et la lu mière du soleil s'affaiblit, A midi vingt-hui minutes, l'abbé Chappe vit la foudre s'élever de terre sous la forme d'une fusée, à environ 2592 toises de lui, et jusqu'à 110 toises de hauteur; la barre donnait alors de faibles signes d'éléctricité. A midi trente-cinq minutes, l'électricité était si considérable qu'on n'osait plus toucher à la barre : on en tirait des étincelles à quatre pouces, avec un morceau de fer attaché a un tuyau de verre. Les éclairs se multipliaient, le tonnerre grondait toujours, et l'électricité était devenue si intense qu'elle produisait un sifflement effrayant. L'observateur et les assistants durent se retirer à l'autre-extrémité de l'observatoire. Une expérience de Chappe sur l'électricité naturelle : "tous ces gens se culbutèrent les uns sur les autres en voulant se sauver". L'instant d'après, la flamme disparut, et la barre ne donnait plus que de faibles signes d'électricité. Le vent, d'abord d'Est, tourna au Nord, puis au Nord-Ouest, et le nuage disparut au Sud-Ouest. Cet orage, dit-il, parcourut 70 degrés dans l'espace de trente-sept minutes. Le 12 juin, à deux heures trente-quatre minutes après midi, la barre donna de faibles marques d'électricité. Le ciel était couvert, sans éclairs, sans tonnerre. A trente six minutes, il plût un peu. A quarante-deux minutes, l'électricité cessa avec la pluie. A quarante-huit minutes, la pluie recommença. L'électricité augmenta et diminua alternativement jusqu'à cinquante-cinq minutes, que la pluie cessa. On tirait des étincelles, en présentant le doigt à huit lignes du conducteur. « La pluie recommença à trois heures, et l'électricité diminua jusq'à trois heures, sept minutes, qu'elle cessa totalement. La nue orageuse était à l'Ouest, ainsi que le vent; le thermomètre à 14 degrés, et le baromètre à vingt-quatre pouces, deux lignes. »L'académicien ne put observer, le reste du mois, d'autre orage que celui du 28. Mais il n'eut pas dans cet orage la plus petite marque d'électricité. Il y eut encore plusieurs orages en juillet, mais sans aucune marque d'électricité, dans leurs cas non plus. « Le 9 juillet, à midi, commença un orage à l'est de Tobolsk, par un ciel serein à l'ouest, presque sans électricité, jusqu'à une heure, quinze secondes. Ensuite, après un grand vent accompagné d'un nouvel orage, l'électricité fut assez forte. Elle cessa à neuf minutes vingt-cinq secondes, et recommença; à vingt-cinq minutes quarante secondes. On vit un éclair pour la première fois dans cet orage; l'intervalle de l'éclair et du bruit fut observé de quarante-cinq secondes, ou de sept mille sept cent quatre-vingt-cinq toises. L'orage était vers l'horizon; l'électricité fut très forte pendant six minutes, et cessa totalement; le baromètre était à 27 pouces 8 lignes 8/12, et le thermomètre à 18 degrés.Enfin, pour ne rien omettre d'utile et d'important dans l'ouvrage de Chappe, ajoutons aux expériences qu'il a faites sur l'électricité un mot de ses observations sur le baromètre et la boussole. La plus grande hauteur du baromètre à Tobolsk, dit-il, fut le 25 mai (1761), de 28 pouces 10 lignes 8/12 , par un vent du nord et un ciel serein. La plus petite hauteur fut, au mois de juin, de 27 pouces 6 lignes. Le thermomètre qui, comme on l'a vu, descend en hiver à plus de 60 degrés au-dessous de la congélation, est monté, le 19 juillet, dans la plus grande chaleur de l'été, à 26 degrés 3/4 au dessus de la congélation. C'est donc une différence de plus de 80 degrés entre les limites du froid et celles du chaud. A Tobolsk, l'auteur a vu les grains poindre au 15 juin, s'élever à dix pouces le 25, sans être à leur maturité vers la fin d'août. Quant à la boussole, Chappe dit qu'à Tobolsk, il l'a vue décliner de 3 degrés 45 minutes 58 secondes vers l'orient. En 1720, dit-il, elle n'avait point de déclinaison, si l'on en croit Strahlenberg. Chappe dit qu'elle varie de 12 minutes et demie par an vers l'orient, tandis que sa variation est à Paris de 10 minutes par an vers le couchant. Encore une expérience sur l'électricité naturelle... |
. |
|
| |||||||||||||||||||||||||||||||
|