Martha Nussbaum

Martha Craven naît dans une famille aisée et intellectuellement stimulante. Son père, George Craven, est avocat, et sa mère, Betty Warren, est une décoratrice d'intérieur. Dans les années 1960, elle fréquente l'École Baldwin, une institution privée pour filles à Bryn Mawr, en Pennsylvanie. Elle y développe un intérêt pour la littérature classique et la philosophie. A partir de 1964, elle fréquente l'Université de New York, où elle obtient son Bachelor of Arts en études théâtrales et classiques. Elle entre ensuite à l'université Harvard pour des études de deuxième cycle en philosophie classique. En 1972, elle obtient son Master of Arts de Harvard, et l'année suivante son doctorat (Ph.D.) en philosophie classique, avec une thèse sur Aristote. Elle commence à enseigner à l'Université Harvard, devenant l'une des premières femmes à obtenir un poste de professeure dans le département de philosophie de cette institution prestigieuse. C'est vers cette époque qu'elle épouse Alan Nussbaum, un linguiste classique.

Dans les années 1970 et au début des années 1980, elle enseigne également à l'université Brown et à l'université d'Oxford. En 1978, Martha Nussbaum commence à publier des articles influents sur la philosophie grecque et la philosophie morale. Elle se concentre sur l'éthique aristotélicienne et les implications de la philosophie ancienne sur les questions modernes de justice et de bien-être humain. Son premier livre, Aristotle's De Motu Animalium, paraît en 1985. Il s'agit d'une étude détaillée du traité d'Aristote sur le mouvement des animaux. Ce travail marque le début de sa réputation internationale en tant que spécialiste de la philosophie ancienne.

Vers la moitié des années 1980, Martha Nussbaum commence à collaborer avec Amartya Sen sur le développement du concept de capabilité et de l'approche par les capacités, une théorie du développement humain qui se concentre sur les opportunités et les libertés réelles dont disposent les individus pour mener une vie qu'ils ont des raisons de valoriser.En 1988, elle co-édite avec Amartya Sen The Quality of Life, un recueil d'essais qui parcourt les différents aspects du bien-être humain et pose les bases de l'approche par les capacités. En 1993, publie Cultivating Humanity: A Classical Defense of Reform in Liberal Education, où elle défend une éducation libérale qui forme les étudiants à être des citoyens du monde, capables de penser de manière critique et de comprendre les autres cultures.

 Elle continue a publier dans les années 2000 plusieurs ouvrages importants. Women and Human Development: The Capabilities Approach (2000) développe son approche des capacités en mettant l'accent sur les femmes et les questions de genre. Ce travail est une contribution majeure à la philosophie politique et aux études de développement. Upheavals of Thought: The Intelligence of Emotions (2001) traite du rôle des émotions dans la vie éthique et humaine. La philosophe affirme que les émotions sont essentielles à notre compréhension de la justice et du bien-être. Frontiers of Justice: Disability, Nationality, Species Membership (2006) étend  l'approche des capacités pour inclure les personnes handicapées, les questions de justice mondiale et les droits des animaux.

Parmi les derniers ouvrages de Martha Nussbaum, on remarque Not For Profit: Why Democracy Needs the Humanities (2011) où elle défend l'importance des humanités dans l'éducation démocratique et la formation des citoyens; Political Emotions: Why Love Matters for Justice (2013), où elle étudie le rôle des émotions publiques dans le soutien à la justice et à la démocratie; Anger and Forgiveness: Resentment, Generosity, Justice (2016), où elle analyse les émotions de colère et de pardon dans les contextes personnel, politique et social, et plaide pour une approche de la justice qui dépasse la rétribution; The Monarchy of Fear: A Philosopher Looks at Our Political Crisis (2018), où elle questionne les peurs et les émotions qui sous-tendent les crises politiques contemporaines, en particulier aux États-Unis; Citadels of Pride: Sexual Abuse, Accountability, and Reconciliation (2020), où elle s'intéresse aux dynamiques de pouvoir et de responsabilité dans les cas d'abus sexuels.