|
Harry
Martinson
est un poète, romancier et essayiste suédois,
né le 6 mai 1904 à Jämshög, dans le sud de la Suède
et mort à Stockholm le 11 février 1978.
Son oeuvre poétique lyrique, ses récits de voyage et ses romans puisent
leur inspiration dans la nature, la vie maritime et les grandes questions
existentielles. Martinson s'intéresse aux liens entre l'humanité et la
nature. Sa poésie est ancrée dans une profonde conscience écologique,
et il a été l'un des premiers écrivains à aborder la question des
conséquences de la modernité industrielle sur l'environnement. Son
attachement à la mer et aux paysages suédois est palpable dans de nombreuses
de ses oeuvres. Il développe parallèlement des thèmes existentiels,
notamment dans ses écrits plus tardifs, où il traite les mystères de
la vie et de la mort, de l'infini et de l'espace. Martinson est considéré
comme un poète philosophique, cherchant à comprendre la place de l'humain
dans l'univers, à une époque où la technologie et les découvertes
scientifiques redéfinissent constamment cette place. C'est le sujet de
son chef-d'oeuvre, le poème épique de science-fiction Aniara (1956).
Sa jeunesse a été
marquée par la pauvreté et l'instabilité. Son père meurt lorsqu'il
avait six ans, et sa mère émigre aux États-Unis
peu de temps après, le laissant, ainsi que ses frères et soeurs, orphelins.
Martinson est confié à des familles d'accueil, où il subit des conditions
de vie difficiles et parfois cruelles. Cet abandon et cette enfance difficile
marqueront profondément son oeuvre littéraire, où l'on retrouve souvent
des personnages en quête d'appartenance et de compréhension du monde.
À l'adolescence,
Martinson fuit la vie agricole pour devenir marin. Il embarque à bord
de navires marchands. Pendant sept ans, il voyage à travers le monde,
visite notamment les ports de l'Inde, de l'Afrique et de l'Amérique du
Sud, mais passe le plus clair de son temps à trimer dans la soute des
cargos qu'il l'emportent. Parfois, il court les prairies, mais souvent
il ne fait que frotter les parquets. Ses récits de voyage (En particulier
Voyages sans but, Resor utan mål, 1932; et Cap adieu,
Kap
Farväl, 1933) et sa sensibilité à la nature deviendront des thèmes
récurrents dans ses oeuvres.
À la fin des années
1920, Martinson - le vagabond unbivesel, comme le qualifie
Paul Morand - alors souffrant de tuberculose, dut abandonner la mer. Après
cette période difficile, il s'installe en Suède et commence à écrire.
Ses premiers poèmes sont publiés dans des revues littéraires suédoises
et attirent l'attention pour leur sensibilité et leur lyrisme.
En 1931, il pu blie
son premier recueil de poésie, Spires (Spökskepp), suivi
d'autres recueils poétiques qui établiront rapidement sa réputation
d'écrivain majeur en Suède. En plus de la poésie, Martinson se lance
dans la prose, et ses premières oeuvres en prose montrent une grande maîtrise
narrative et un amour profond pour la nature. Son roman autobiographique,
Il faut partir (Vägen ut, 1936), qui raconte son enfance difficile
et sa jeunesse errante, est l'un de ses ouvrages les plus marquants. Ce
récit dépeint avec force la lutte d'un jeune garçon pour trouver sa
place dans un monde dur et impitoyable.
En 1956, Martinson
publie Aniara, son oeuvre la plus connue. Il s'agit d'un long poème
épique de science-fiction, qui raconte le voyage sans retour d'un vaisseau
spatial transportant des réfugiés fuyant une Terre dévastée par la
guerre nucléaire. Aniara est une méditation sombre sur la condition
humaine, la fuite, l'exil, et la perte de direction dans un univers infini.
Le vaisseau errant dans l'espace devient une métaphore puissante de
l'humanité en quête de sens, confrontée à sa propre destruction et
à l'indifférence de l'univers.
• Aniara
est un poème épique publié pour la première fois en 1956 et se présente
comme une narration en vers. Il raconte l'histoire d'un vaisseau spatial,
l'Aniara, qui transporte des réfugiés d'une Terre en crise vers
une nouvelle vie sur une planète colonisée. Cependant, au cours du voyage,
le vaisseau subit une défaillance technique qui l'éloigne de sa destination
et le fait dériver à travers l'espace, perdant tout espoir de retour.
L'oeuvre est composée de 103 chants (ou sections), chacun abordant des
aspects différents du voyage, des réflexions des passagers et de l'état
de l'humanité. Aniara utilise des symboles pour exprimer des idées
complexes. Le vaisseau représente non seulement l'humanité, mais aussi
ses aspirations, ses désillusions et son incapacité à échapper à son
destin. La dérive du vaisseau symbolise l'aliénation de l'humanité face
à l'immensité de l'espace et à la fragilité de la condition humaine.
Les passagers se retrouvent confrontés à leur isolement, à la perte
de leurs rêves. La vaste étendue de l'espace rappelle la petitesse
de l'humain et soulève des questions sur le temps, l'éternité et le
passage de l'existence humaine. Le style de Martinson est lyrique et évocateur,
mêlant des éléments de la science-fiction à des réflexions philosophiques
sur la condition humaine. Au fur et à mesure que le vaisseau dérive dans
l'espace, les passagers commencent à se poser des questions existentielles
sur leur identité, leur place dans l'univers et le sens de leur existence.
Martinson interroge la recherche de sens dans un monde qui semble désordonné
et absurde. Aniara soulève des questions sur le rapport de
l'humanité à la technologie. Le vaisseau, qui est censé être une avancée
pour l'humanité, devient finalement un piège. Cela soulève des préoccupations
sur les conséquences de la technologie et sur la façon dont elle peut
transformer notre existence. Les passagers évoquent leurs souvenirs de
la Terre, un monde qu'ils ont laissé derrière eux, mais qui est maintenant
en déclin à cause de l'exploitation et de la négligence. Aniara
a été salué comme une oeuvre magistrale de la littérature suédoise
et mondiale.
Ce poème est salué
pour son style lyrique et sa profondeur philosophique, et il est considéré
comme un texte pionnier dans la littérature suédoise et internationale.
Aniara
a également été adaptée en opéra, au théâtre et en film.
En 1974, Harry Martinson
reçoit le prix Nobel de littérature avec Eyvind Johnson. Cette attribution
suscite une controverse, car Martinson et Johnson étaient tous deux membres
de l'Académie suédoise, l'institution qui décerne le prix. Certains
critiques estiment qu'il y avait un conflit d'intérêts et que d'autres
écrivains méritaient davantage cette distinction. Martinson, profondément
touché par cette controverse, se retire progressivement de la scène publique
après l'obtention du prix. Durant les dernières années de sa vie, Il
souffre de dépression et de maladie. Les pressions de la célébrité
et la critique qui entourent son prix Nobel affectent profondément son
moral. En février 1978, Martinson met fin à ses jours. |
|