| L'Épître de saint Jacques est l'une des épîtres dites catholiques; en voici le titre exact : « Jacques, serviteur de Dieu et du Seigneur Jésus-Christ, aux douze tribus qui sont dans la dispersion, salut! » L'auteur invite ses lecteurs à considérer leurs épreuves comme un sujet de joie; ils doivent demander à Dieu la sagesse et mettre leur gloire, non dans les biens extérieurs, mais dans l'humilité, parce qu'elle élève véritablement. La tentation ne vient pas de Dieu, mais de la convoitise qui est au fond du coeur de l'homme. La vraie religion est essentiellement pratique. Une foi qui s'allie avec la préférence montrée pour certaines personnes n'a de la foi que le langage, tandis que les oeuvres sont l'expression parfaite d'une foi véritable, si bien que « la foi sans les oeuvres est morte ». Le chrétien doit tenir sa langue en bride, le zèle amer qu'exhale la langue ne produisant que du trouble et fomentant les plus regrettables divisions. L'auteur termine par une série de recommandations : éviter de condamner légèrement le prochain, imprudence qu'il y a à disposer de l'avenir, sévères avertissements aux riches qui verront succéder au luxe et aux exactions envers le pauvre le plus effroyable châtiment, patience inaltérable dans l'attente de l'avènement du Seigneur. L'écrit est nettement moral et pratique, beaucoup plus que mystique et théologique; il se rat tache à l'inspiration des évangiles synoptiques et de l'Apocalypse plus qu'à toute autre. La langue en est originale, d'une allure vive et d'une correction qui se rencontre rarement dans le Nouveau Testament. En revanche, toutes les questions qui se rattachent à son lieu d'origine, à sa date et à son auteur, restent insolubles. Il est à noter que l'épître de saint Jacques semble avoir été inconnue de plusieurs des écrivains de la première Eglise; des théologiens autorisés ne la citent qu en faisant d'expresses réserves, notamment saint Jérôme, qui ne se gêne pas pour la soupçonner de pseudépigraphie. Luther, à son tour, l'a traitée d' « épître de paille » à cause de la polémique à laquelle son auteur se livre contre la doctrine paulinienne de la foi. Au XIXe siècle, on a assisté à plusieurs tentatives de réhabilitation d'un écrit trop sévèrement apprécié ; mais ceux qui ont voulu prétendre que le désaccord entre Paul et Jacques sur la question de la foi se réduit à une simple différence dans la forme ont méconnu le sens des attaques très vives et très résolues dirigées par l'auteur contre la dogmatique de l'apôtre des Gentils. Comme le dit justement Sabatier, on doit noter entre les deux écrivains « l'antithèse du mysticisme et de la morale pratique, de l'idéalisme philosophique et de l'empirisme populaire ». De la discussion à laquelle l'épître de saint Jacques soumet les thèses de saint Paul, il résulte, non moins évidemment, que « notre épître suppose l'entier développement de la doctrine paulinienne » et qu'il y a là, pour fixer sa date, « un terminus a quo, au delà duquel il est interdit de remonter ». Il ne semble pas qu'il y ait lieu, d'autre part, de rejeter la composition de l'écrit jusqu'au IIe siècle. Dans ces conditions, la date de composition la plus probable est le dernier quart du Ier siècle. L'auteur, bien qu'il ne se désigne pas catégoriquement comme un apôtre, a visiblement voulu faire passer son oeuvre comme émanant d'un personnage considérable de la primitive Eglise, soit Jacques le Majeur, soit Jacques le Juste, de manière à lui assurer du crédit auprès des lecteurs. (M. Vernes). | |