Le cheval Bayard

Bayard est le nom d'un cheval rendu célèbre par la légende des Quatre Fils Aymon. Etymologiquement, bayard est un adjectif et l'on disait au Moyen âge un cheval bayard, comme nous disons aujourd'hui un cheval bai. 

Dans la plus ancienne rédaction française de la chanson de geste des Quatre Fils Aymon, Bayard nous est représenté comme faé, c.-à-d. doué de qualités surnaturelles. Lorsque Renaud de Montauban et ses trois frères sont obligés de s'enfuir dans la forêt des Ardennes, Bayard les reçoit tous les quatre sur sa croupe, sans que sa rapidité en soit diminuée; il vit de feuilles et de racines et s'en trouve mieux qu'un autre cheval de blé et d'avoine; bien plus, lorsque les quatre frères assiégés dans Montauban sont pressés par la famine, il les nourrit de son sang pendant quinze jours. Aussi lorsque Charlemagne triomphe enfin de ses vassaux révoltés, exige-t-il qu'on lui livre leur précieux auxiliaire, et il le fait jeter dans la Meuse, une pierre an cou. Mais le merveilleux cheval s'échappe à la nage et va se réfugier dans la forêt des Ardennes, où, d'après la légende, on l'aperçoit encore de temps en temps.

La popularité du cheval Bayard n'a pas disparu avec le Moyen âge; elle a survécu jusqu'à nos jours dans le Nord de la France et surtout aux Pays-Bas. A Louvain et à Malines, il est de presque toutes les fêtes populaires et au jubilé de cette dernière ville, en 1825, on lui donna une place d'honneur dans les réjouissances publiques. Malherbe, dans une de ses lettres à Peiresc, dit en parlant de Château-Renaud, village des Ardennes : « C'est un vieux chasteau ruiné où l'on voit encore l'estable de Bayard ». Encore aujourd'hui à Berthem, près de Louvain, on montre sa mangeoire et l'empreinte de son pied; il y a mieux encore, puisque l'église de Saint-Renaud (Reinoldkirche) à Dortmund (Westphalie) conserve précieusement un fer à cheval lui ayant appartenu : voilà une relique vraiment originale et qui, après tout, en vaut beaucoup d'autres comme authenticité. (A. Thomas).