| Contrastes, oppositions que l'art emploie pour donner de la variété à ses ouvrages. Ce n'est pas un moyen factice, puisque les contrastes sont partout dans la nature physique et dans l'ordre moral; en les imitant, l'artiste ne fait que chercher à reproduire des effets vrais et originaux. Le monde matériel offre des oppositions constantes de forme, de lumière, de couleur, que les beaux-arts mettent plus ou moins en oeuvre, selon leur nature ou leurs procédés. L'architecture classique exige plutôt la symétrie que les contrastes. La sculpture, poursuivant principalement la perfection de la forme, trouve peu de secours aussi dans les contrastes; elle ne peut les rencontrer que dans la pose, le mouvement et l'expression. Il en est de même du simple dessin. Mais le peintre, avec la couleur, est maître de la lumière et de l'ombre, les deux grands éléments des contrastes. En musique, on trouve des contrastes dans le sens de la mélodie, dans le mouvement, le rythme et les accompagnements. Dans la littérature, dans les oeuvres poétiques surtout, il est loisible d'employer tous les genres de contrastes, contrastes de situations, de caractères, de passions, etc. Au théâtre, par exemple, il y a des oppositions tout à la fois pour les yeux, pour les oreilles et pour l'esprit; certains épisodes mettent en lumière l'action principale, et des personnages accessoires font ressortir le rôle important : ce sont les fureurs coupables de Phèdre à côté de l'amour pur d'Aricie, c'est Philinte près d'Alceste, Éliante à côté de Célimène, etc. Les contrastes peuvent aussi exister dans un seul caractère. Au XIXe siècle, l'école romantique a usé avec prédilection de la méthode des contrastes : elle a partout introduit le laid à côté du beau, le grotesque à côté du sublime; Marion Delorme, flétrie par ses amours passées, redevient pure par son amour présent; et Triboulet, bouffon à la cour et père chez lui, est tour à tour, ignoble et sympathique. Dans le poème épique, Milton, après avoir révélé les terribles mystères de la demeure de Satan, décrit les voluptés calmes et pures de l'Éden; du milieu des combats et des scènes de carnage, le Tasse nous transporte avec Herminie dans le riant séjour de l'innocence et de la paix. L'emploi des contrastes fait ressortir les objets opposés l'un à l'autre, et rend plus vives les impressions qu'on veut leur faire produire. (B.). | |