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Chester Himes

Chester Himes est un écrivain américain né le 29 juillet 1909 à Jefferson City (Missouri), et mort le 12 novembre 1984 à Moraira (Espagne). Il est l'auteur de romans policiers et ses récits traitant de la couleur de peau (ce qu'aux Etats-Unis on appelle la "race"), de la violence et de l'injustice sociale aux États-Unis. Au cours de sa vie, il a surmonté d'importants obstacles, en particulier un séjour en prison, pour devenir une voix puissante dans la littérature noire américaine. Son oeuvre, marquée par une dénonciation constante du racisme et des inégalités sociales. Son style, volontiers violent et satirique, a redéfini les frontières du roman noir et du roman policier.

Chester Bomar Himes est issu d'une famille afro-américaine de la classe moyenne. Son père, Joseph Sandy Himes, est professeur, et sa mère, Estelle Bomar Himes, enseigne également. Ses premières années sont marquées par des difficultés économiques et des conflits familiaux. Ses parents, qui se disputent souvent finissent finalement par divorcer. Une expérience  autre marquante survient à l'âge de 12 ans, lorsque son frère aîné, Joseph, est gravement blessé dans une explosion accidentelle, qui le laisse aveugle. Cet événement bouleverse profondément Chester, exacerbant son sentiment d'impuissance face à l'injustice et à la souffrance.

Himes fréquente l'Université d'État de l'Ohio à partir de 1926, mais il en est renvoyé en 1928 à cause de sa conduite. Il a alors 19 ans, et sa vie prend un tournant décisif quand, peu de temps après, il est condamné à une peine de 20 à 25 ans de prison pour un cambriolage à main armée. Il est incarcéré au pénitencier d'État de l'Ohio, où il passe près de huit ans. C'est pendant son séjour en prison qu'il découvre son talent pour l'écriture. Himes commence à écrire des nouvelles qui sont publiées dans des magazines populaires comme Esquire et Crisis, un magazine publié par la NAACP (National Association for the Advancement of Colored People). Il trouve dans l'écriture un moyen de surmonter la violence et l'oppression qu'il ressent, tant dans la société que dans le système carcéral. Sa première nouvelle, To What Red Hell, date de 1934. Eller traite des conditions déplorables dans une prison pendant un incendie. Cet intérêt pour la dure réalité de la vie en prison va devenir un aspect central de son oeuvre. En 1936, Himes est libéré de prison pour bonne conduite, ce qui lui permet de se consacrer entièrement à l'écriture.

Après sa libération, Chester Himes commence à publier des romans qui reflètent ses expériences personnelles, marquées par la ségrégation raciale, la pauvreté et la violence. Son premier roman, If He Hollers Let Him Go ( S'il braille, lâche-le, 1945), traite du racisme et des tensions sociales qui se manifestent dans les usines de Los Angeles pendant la Seconde Guerre mondiale. Le protagoniste, Bob Jones, un ouvrier noir, lutte contre le racisme institutionnel et les humiliations quotidiennes dans une société qui le considère comme inférieur. Le roman est bien accueilli pour son portrait brut et réaliste des frustrations des Noirs américains dans une société raciste, mais il est aussi controversé en raison de son ton pessimiste et de sa représentation directe du racisme. 

Si Himes est salué pour sa voix unique et son écriture percutante, il a encore du mal à vivre de sa plume. Dans les années qui suivent, l'écrivain éprouve des difficultés à s'intégrer dans le milieu littéraire américain, où les écrivains noirs sont marginalisés. Déçu par le manque de reconnaissance et les discriminations qu'il subit aux États-Unis, il décide, comme d'autres écrivains noirs avant lui (notamment Richard Wright et James Baldwin), de partir pour l'Europe. En 1953, Chester Himes s'installe à Paris, où il trouve un environnement plus accueillant pour les artistes noirs. Il se lie d'amitié avec d'autres écrivains et intellectuels expatriés, et cette période marque un tournant décisif dans sa carrière.

C'est en France que sa carrière littéraire prend un nouvel élan. Son travail attire l'attention d'un éditeur, Marcel Duhamel, qui dirige la célèbre collection Série noire. Duhamel encourage Himes à écrire des romans policiers dans le style du roman noir, un genre littéraire populaire en France à l'époque. Sous l'influence de Duhamel, Chester Himes commence à écrire une série de romans policiers situés dans le Harlem des années 1950, mettant en scène deux détectives noirs, Coffin Ed Johnson et Grave Digger Jones. Ces romans, violents et satiriques, sont également une réflexion sur le racisme, la brutalité policière et la criminalité qui gangrènent la société américaine. Le premier de la série, For Love of Imabelle (La Reine des pommes, 1957) connaît un succès immédiat en France. Le roman est un mélange de comédie noire, de violence brute et de critique sociale. Le style unique de Chester Himes, qui allie le langage cru et la critique acerbe des inégalités raciales, le distingue des autres auteurs de romans policiers. Himes continue la série avec des titres comme The Real Cool Killers ( Il pleut des coups durs, 1959), Cotton Comes to Harlem ( Retour en Afrique, 1965) et Blind Man with a Pistol (L'Aveugle au pistolet, 1969). Ces romans, en plus de leur intrigue policière, offrent une vision percutante de Harlem en tant que microcosme des tensions fondées sur la coleur de peau américaines. Cotton Comes to Harlem sera adapté au cinéma en 1970, contribuant à la notoriété de Himes aux États-Unis et à l'étranger.

Dans les années 1970, Chester Himes déménage en Espagne, où il passe les dernières années de sa vie, souffrant de problèmes de santé. Il continue d'écrire, bien que ses romans policiers connaissent un succès inégal. En 1972, il publie la première partie de son autobiographie (publiée en français sous le titre de Regrets sans repentir), The Quality of Hurt, dans laquelle il raconte son enfance, son incarcération et ses premières années d'écrivain. En 1976, il publie le deuxième volume, My Life of Absurdity, qui parle de ses années en France et de ses succès littéraires. Ces mémoires témoignent de son parcours exceptionnel, de son combat contre le racisme et de sa vision désenchantée du rêve américain. Il meurt en 1984 près d'Alicante, à l'âge de 75 ans.

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Dictionnaire biographique
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