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L'histoire de l'île de Pâques
Les premiers habitants de l'île de Pâques seraient venus de Polynésie. Selon la tradition orale, ils auraient été guidés par un chef appelé Hotu Matu'a, qui aurait mené son peuple à Rapa Nui. Les études archéologiques indiquent que la colonisation a probablement eu lieu entre 800 et 1200 apr. JC.

La société de l'île de Pâques s'est développée de manière spectaculaire, avec l'érection de statues géantes connues sous le nom de moaï. Ces statues, qui représentent des ancêtres déifiés, étaient érigées sur des plateformes cérémonielles appelées ahu. Les moaï étaient une expression du pouvoir et du prestige des différentes lignées familiales (clans) de l'île.

Les Rapa Nui ont érigé des centaines de moaï sur l'île. Le processus de construction de ces statues nécessitait des ressources considérables, notamment pour le transport des moaï depuis la carrière de Rano Raraku jusqu'aux ahu situés sur les côtes. Cette période est considérée comme l'âge d'or de la société Rapa Nui.

Vers 1600, la société de l'île de Pâques a commencé à connaître un déclin marqué. Les études indiquent qu'une surpopulation, combinée à une surexploitation des ressources naturelles (comme la déforestation), a conduit à une crise écologique. L'abattage excessif des palmiers aurait empêché la construction de pirogues, limitant les possibilités de pêche en haute mer.

La crise écologique aurait provoqué des conflits internes entre les clans pour le contrôle des ressources. Ces luttes auraient entraîné la chute des élites traditionnelles et l'abandon de la construction des moaï. Beaucoup de statues ont été renversées, probablement au cours des guerres entre clans.

Après le déclin du culte des moaï, une nouvelle forme de leadership a émergé, centrée sur le culte de l'homme-oiseau  (tangata manu). Ce rituel annuel, organisé au village cérémoniel d'Orongo, consistait en une compétition où des représentants des clans tentaient de récupérer le premier oeuf de sterne dans les îlots voisins. Le gagnant devenait le tangata manu, une figure de pouvoir pour l'année suivante.
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Cook à l'île de Pâques.
James Cook à l'île de Pâques.

L'île de Pâques a été connue des Européens en 1687 quand elle fut signalée par le boucanier anglais Davis. Le le 5 avril 1722,  le navigateur hollandais Jakob Roggeveen y débarqua. Ce jour-là étant le dimanche de Pâques, il nomma l'île Paasch-Eyland ( = île de Pâques). Behrens, Cook, La Pérouse et d'autres visitèrent par la suite l'île de pâques et en rapportèrent des récits pleins d'imagination.  En 1770, don Philippe Gonzalès prit possession de l'île de Pâques au nom du roi d'Espagne.

Au début du XIXe siècle, l'île de Pâques a encore été visitée par plusieurs navires européens et américains. Ces contacts ont souvent été violents, avec des enlèvements d'habitants pour les réduire en esclavage ou les emmener comme travailleurs forcés, notamment sur les navires baleiniers. Pendant cette période, des maladies introduites par les étrangers ont dévasté la population Rapa Nui, qui n'avait aucune immunité contre ces nouvelles infections.

En 1862, des raids esclavagistes organisés par des marchands péruviens ont capturé environ 1500 habitants de l'île de Pâques, dont une grande partie de l'élite, les chefs et les prêtres. Ces captifs ont été emmenés au Pérou pour travailler dans les mines et les plantations. La majorité est morte à cause des conditions inhumaines et des maladies. Quelques survivants ont été renvoyés sur l'île, mais ils ont apporté avec eux la variole, qui a décimé encore plus la population locale. À la fin de cette période, la population de Rapa Nui était réduite à quelques centaines de personnes.

En 1864, des missionnaires catholiques dirigés par Eugène Eyraud se sont établis sur l'île. Leur influence a conduit à la conversion massive des Rapa Nui au christianisme. Ils ont aussi contribué à la perte de la culture et des traditions locales, et en particulier à la disparition du rongorongo, un système d'écriture unique qui n'a jamais été totalement déchiffré. Un grand nombre des habitants de l'île ont aussi été emmenés, en 1878, par les missionnaires aux îles Gambier.

Le 9 septembre 1888, l'île de Pâques a été annexée par le Chili, à la suite d'un traité signé par le capitaine chilien Policarpo Toro et certains chefs Rapa Nui. Cependant, ce traité est controversé, car la version en espagnol stipulait une cession complète de l'île au Chili, tandis que la version en langue Rapa Nui mentionnait une protection de la part du Chili, laissant entendre que la souveraineté locale serait préservée. Après l'annexion, l'île a été louée à des compagnies d'élevage, transformant la majorité des terres en pâturages pour les moutons.

Pendant plusieurs décennies, les habitants Rapa Nui ont été confinés dans le village de Hanga Roa, tandis que le reste de l'île était contrôlé par une compagnie chilienne, la Compañía Explotadora de la Isla de Pascua. Les Rapa Nui étaient traités comme des travailleurs sous contrat, avec des restrictions sévères à leur liberté de mouvement. Pendant cette période, les traditions et la langue Rapa Nui ont continué de se dégrader sous la pression extérieure.

En 1953, l'administration de l'île a été transférée à la marine chilienne, mais les conditions de vie des Rapa Nui sont restées difficiles. Ce n'est qu'en 1966 que les habitants ont finalement reçu la citoyenneté chilienne et ont acquis le droit de circuler librement. Cela a été un moment important dans l'histoire de l'île, marqué par une révolte des Rapa Nui contre les abus dont ils étaient victimes.

À partir de la fin du XXe siècle, on observe une revitalisation de la culture Rapa Nui. Le tourisme s'est développé, attirant des visiteurs du monde entier pour voir les célèbres moai. En parallèle, des mouvements pour la reconnaissance des droits des Rapa Nui et la restitution des terres ont émergé. Ces revendications continuent aujourd'hui, avec des tensions périodiques entre les autorités chiliennes et les communautés locales.

En 2007, l'île de Pâques a obtenu un statut spécial en tant que territoire spécial du Chili, avec des lois locales plus adaptées à sa situation particulière. La préservation du patrimoine culturel et archéologique de l'île reste une priorité, mais les Rapa Nui luttent encore pour un contrôle plus autonome de leurs terres et pour la préservation de leur identité culturelle.

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