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Ataulf,
Ataulphe
ou
Athaulphe, roi des Wisigoths
(410-415), successeur et beau-frère d'Alaric
qui, après la prise de Rome, mourut à
Cosenza, près de Regggio, en 410.
Elu par son peuple, Ataulf eut la grandiose idée de convertir l'empire
romain en un Etat wisgothique. Cependant, il ne tarda pas à se convaincre
que cette idée était irréalisable aussi longtemps
qu'il ne réussirait pas à faire respecter les lois par les
Goths ( Paul Orose,
VII, ch. XLIII). Il comprit qu'il lui était impossible de prétendre
à la domination universelle en s'appuyant sur des hordes barbares.
et qu'il lui faudrait une longue ère de paix pour faire participer
sa nation aux bienfaits de la civilisation et pour amener peu à
peu la fusion de l'élément barbare avec le peuple romain.
Profiter d'une paix durable et de l'amitié de la cour de Ravenne
pour amener les Wisigoths à la hauteur de la civilisation romaine,
tel fut le rêve de sa vie. Il se réconcilia donc avec l'empereur
romain Honorius, lui abandonna l'ltalie et se
retira en Gaule, en 442, en emmenant Placidie,
la soeur de l'empereur. A la prise de Rome, cette princesse était
tombée entre les mains des Wisigoths, et Ataulf la retenait comme
otage dans l'espoir d'obtenir sa main et de sceller par un mariage une
alliance durable avec la maison impériale.
Peu après
son arrivée en Gaule, Ataulf trouva l'occasion de rendre des services
à son futur beau-frère. Constantin,
il est vrai, venait d'être battu par Constance; mais un autre tyran,
Jovin,
d'origine gauloise qui, déjà en 411, s'était fait
proclamer auguste à Mayence, s'était
associé comme second auguste son frère Sébastien et
s'était ligué avec les Alémans et les Francs contre
l'empereur Honorius. Primitivement, Ataulf avait
la secrète pensée de joindre le tyran avec son armée
et de partager avec lui la domination de la Gaule. Quand Jovin, en associant
à l'empire son frère Sébastien, eut contrarié
les desseins d'Ataulf, celui-ci fit volte-face et, de concert avec Dardane,
le préfet de la Gaule, il marcha contre les deux frères.
Il commença par attaquer un de ses ennemis personnels, Saros, général
de l'empereur Honorius, qui venait de faire défection et qui, à
la tète d'une vingtaine d'hommes, allait offrir ses services à
Jovin. Ataulf le surprit avec une armée de 10 000 hommes et le fit
mourir pour satisfaire sa vengeance. Alors, pendant que Dardane combattait
Sébastien à Narbonne, le roi
des Wisigoths assiégea Valence, où Jovin s'était enfermé,
prit cette ville de force et fit prisonnier le tyran. Il voulut l'envoyer
à Honorius; mais Dardane, auquel il l'avait remis, le fit exécuter
pour envoyer à l'empereur sa tête ainsi que celle de Sébastien
(413).
Auparavant déjà,
un traité formel avait été conclu entre l'empereur
romain et le roi des Wisigoths. Le premier s'engagea à approvisionner
de blé l'armée d'Ataulf et celui-ci promit de rendre la liberté
à Placidia. Ni l'un ni l'autre ne tint
sa
promesse : Honorius n'envoya pas de blé
et Ataulf ne songeait pas à renvoyer la princesse romaine. Pressé
par la famine, le roi wisigoth tourna ses armes contre les Romains. Il
s'avança sur Marseille dans le dessein d'en faire le siège
mais le comte Boniface, qui y commandait,
le prévint, attaqua l'armée des Wisigoths et la mit en déroute.
Le roi, dangereusement blessé, se retira vers l'occident et prit
successivement les villes de Narbonne, de Toulouse et de Bordeaux. Ce fut
pendant les vendanges de l'année 413 (
Idace, Chron., p. 53) qu'il fit son entrée à Narbonne.
Là, il réussit enfin à gagner le coeur de Placidie,
grâce aux soins empressés dont il ne cessait de l'entourer,
et à l'intercession de Candidien, l'ami de la princesse. La fille
de Théodose le Grand finit par accorder
sa main au roi barbare, sans violence, de son plein consentement. Au mois
de janvier 414, le mariage fut conclu et, chose bien caractéristique,
les noces, décrites par Olympiodore
(fragm. 21) furent célébrées, à la manière
des Romains, avec beaucoup de pompe et de magnificence.
Cependant, Honorius
vit toujours une mésalliance dans cette union. Jamais il ne put
surmonter l'antipathie qu'il ressentait à l'endroit de ce barbare,
qui avait réussi à entrer dans sa famille en épousant
sa soeur. Impitoyablement, il repoussait toutes les avances que lui faisait
Ataulf, de concert avec son épouse. Il promit même la main
de Placidie à son général Constance, le vainqueur
de Constantin, s'il parvenait à chasser les Wisigoths de la Gaule.
Constance, épris de la reine des Wisigoths, quitta la ville d'Arles,
passa le Rhône à la tête de ses troupes, se rendit maître
de tout le littoral de la Méditerranée et coupa les vivres
à son rival en s'emparant de Narbonne. Ataulf, pressé par
les Romains et cédant aux instances de Placidie, à qui cette
guerre contre ses compatriotes était odieuse, quitta la Narbonaise,
traversa les Alpes et passa en Espagne où, vers la fin de l'année
414, il s'empara de la ville de Barcelone.
Là, un fils lui naquit; il lui donna le nom significatif de Théodose.
C'était pour lui l'occasion de faire une dernière tentative
pour se réconcilier avec son beau-frère. L'enfant mourut
bientôt et Ataulf ne survécut pas longtemps à cette
mort.
Il avait à
son service un ancien domestique de Sarus, appelé Evervulf, suivant
les uns, et Doubios selon d'autres. Cet homme n'avait jamais oublié
l'assassinat de son premier maître; un jour, lorsque Ataulf entra
dans l'écurie pour voir ses chevaux, il le frappa d'un coup de poignard.
Il est permis de croire que Sigéric, qui devint le successeur d'Ataulf,
n'était pas étranger à ce meurtre. Sigéric
était à la tête d'un parti wisigothique qui, demandant
la guerre avec Rome, était hostile à tout accommodement pacifique.
Blessé à mort, Ataulf était encore rempli de la grande
idée qu'il avait poursuivie pendant sa courte carrière :
il voulait la paix et l'alliance d'Honorius à tout prix pour trouver
le temps nécessaire d'initier son peuple aux moeurs et à
la civilisation romaines. En mourant, il pria son frère Wallia de
renvoyer Placidie à l'empereur et le
conjura de consolider la paix et de cultiver l'amitié des Romains.
(L.
Will). |
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